
La route de Versailles, Louveciennes, neige, 1870
Camille Pissaro
« le premier des impressionnistes »
1830-1903
Musée Marmottan-Monet
jusqu’au 2 juillet 2017
Gilles Castelnau
13 mai 2017
Au printemps 1863, Camille Pissaro et ses amis claquent la porte de l’école des Beaux-Arts et vont boire ensemble un verre à la Closerie des Lilas à Montparnasse.
C’est un petit groupe qui se constitue et se révolte : Frédéric Bazille, Claude Monet, Auguste Renoir, Alfred Sisley...
On est à la fin du Second empire. Le romantisme bat son plein. Révulsés par les autorités officielles qui excluaient du Salon les jeunes peintres entreprenants, l’Empereur avait ouvert le Salon des refusés. C’était une porte ouverte à la liberté.
Aux Beaux-Arts, le groupe suivait les cours de Charles Gleyre dont on a vu une belle exposition l’an dernier au musée d’Orsay.
C’est un homme pleinement engagé dans le mouvement romantique de son temps. Il incite à une libre expression libre des états d’âme. On ne représente plus les grandes scènes ennuyeuses de batailles ou de récits bibliques : on laisse libre cours à des rêves fantastiques, surnaturels, morbides ou magnifiques… on peut être entousiaste ou désolé, amoureux ou déçu.
C’est bien.
Mais ceux que l’on va appeler les « impressionnistes » sont choqués de l’importance ainsi apportée à des rêveries bourgeoises et finalement prétentieuses.
Ils sont sensibles à l’état d’esprit de ceux, peintres, poètes, romanciers, qui entendent susciter de la sympathie pour leurs contemporains qui vivent dans la misère l’humble réalité de la vie quotidienne (sur ce site) Ainsi Gustave Courbet a peint sur une toile de 6,60 mètres un « Enterrement à Ornans » qui ne représentait qu’un monde simple et qui n’avait rien d’extraordinaire !
Et les « impressionnistes » sortent de leurs ateliers parisiens où l’on ne pouvait qu’imaginer le monde. Ils transportent leurs chevalets dans la vraie nature et... la regardent de tous leur yeux. Ils s'efforcent alors de rendre l’ « impression » qu’elle leur fait telle qu’elle est. Et peu importent les règles traditionnelles de la perspetive, du cadre à respecter et de l’importance du « sujet » représenté.

La route de Versailles, Louveciennes, soleil d’hiver et neige, 1870
Cette appellation si juste d’ « impressionnistes » leur est donnée – par dérision – dans le journal « Le Charivari » par un humoriste et critique d’art qui est amusé par le titre « impression soleil levant » d’un tableau de Claude Monet (voir sur ce site)
Camille Pissaro contemple la nature comme les autres impressionnnistes et il partage avec plusieurs d’entre eux les idées d’anarchie libertaire qui le rendent sensible aux inégalités sociales, à la pauvreté qu’il ne manque pas de remarquer chez ses contemporains.
On remarquera dans ses tableaux la représentation toujours présente de petits personnages partageant la vie que l’on devine bien dure de cette nature pourtant si belle.
Et si l'on profite d'être dans ce musée pour jeter un coup d'oeil aux « Nymphéas » que Claude Monet cultivait dans son jardin de Giverny, on pensera que, près de là, Camille Pissaro faisait pousser dans le sien carrottes et pommes de terre en une sorte de jardin ouvrier participatif.

La Meule, Pontoise, 1873
L’exposition au musée du Luxembourg mentionne cette orientation de ses pensées. Son père était juif d'origine portugaise et sa mère, juive également était une créole des Antilles danoises. Cette origine l'amenait-elle plus encore que ses amis à se sentir proche des exclus ?

Les Boulevards extérieurs, effet de neige, 1879
Il a remarqué parmi les passants de ce boulevard un homme frigorifié, courbé et dérapant dans la neige glacée.

La Seine à Rouen, l’ile de Lacroix, effet de brouillard, 1888
La technique du « pointillisme » état issue des recherches de Michel-Eugène Chevreul, directeur de la Manufacture des Gobelins. Il avait remarqué la réaction mutuelle des couleurs les unes sur les autres lorsqu’elles se trouvaient juxtraposées. Ainsi, disait-il, un jaune placé près d'un vert semble plus rouge.
Pissaro s’essaye ici à une méthode que Georges Seurat et Paul Signac utiliseront systématiquement.

La Place du théâtre français et l’avenue de l’opéra, temps de brouillard, 1897
Claire Durand-Ruel qui est commissaire de l’exposition écrit :
Pissarro peint cette vue sur la Seine depuis son appartement place Dauphine. De ce motif, où son regard embrasse le fleuve, le pont des Arts et le Musée du Louvre, l’artiste exécute trente-deux toiles, au cours de trois intenses campagnes de travail, entre 1900 et 1903. Or, chaque tableau a sa spécificité, le peintre jouant sur les angles de vue, sur les positions des personnages et des bateaux et, surtout, sur la lumière. Ici, elle est diffusée à travers une gamme étendue de couleurs pâles.

Automne, peupliers, Eragny, 1894
Retour vers
spiritualité des images
Vos
commentaires et réaction