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Spiritualité des images

 

 

Peinture de « droite »

ou peinture de « gauche » ?

 

 

Cabanel et Bouguereau, Manet et Courbet

Exposition Jules Bastien-Lepage

 

 

Gilles Castelnau

 

Alexandre Cabanel, Vénus, 1863

 

 

3 mars 2007

Au rez-de-chaussée du musée d'Orsay on voit (à droite) la grande et belle Naissance de Vénus d'Alexandre Cabanel. Elle fut exposée au Salon de 1863, y remporta un très vif succès et l'empereur Napoléon III la fit acquérir pour l'État. C'était la gloire pour Cabanel qui fut alors élu à l’Académie, nommé membre de l’Institut impérial et promu officier de la Légion d’Honneur. Il avait 40 ans.

Émile Zola écrira un peu plus tard :

Cabanel a reçu toutes les médailles - une deuxième médaille, une première médaille, une médaille d'honneur - il a reçu l'ordre de la Légion d'honneur, on l'a fait académicien, professeur à l'École des beaux-arts, membre de tous les jurys possibles. C'est un talent officiel, un talent devant lequel s'inclinent tous les honnêtes gens : essayez de mettre en doute le talent de Cabanel : on vous rira au nez et on répondra : « Vous divaguez ! En France, nous avons une Administration chargée de découvrir les hommes de talent, de les récompenser, de leur donner de l'avancement. Cabanel reçoit depuis vingt ans plus de récompenses et d'avancement que personne d'autre. C'est donc qu'il est le génie incarné. »

On approuvait l'idéal féminin de Cabanel, les angelots magnifiant la belle femme nue à la peau nacrée, à la pose à la fois sensuelle et pudique. On appréciait qu'il s'agisse d'une déesse, ce qui justifiait sa nudité et la rendait décente et honnête.

 

Édouard Manet, Olympia, 1863

Mais un peu plus loin, au même rez-de-chaussée, l'Olympia Édouard Manet, peinte en la même année 1863, souleva au contraire une clameur hostile.

Manet ignore la bienséance, l'académisme. L'Olympia n'est pas une déesse mais évidemment une femme offerte. Elle dévisage calmement le spectateur sans se soucier de sa nudité. Ce regard gênant ne manqua évidemment pas de choquer les visiteurs très attachés à cette époque aux convenances. Ce réalisme cru était révolutionnaire.

C'est Émile Zola qui vint à son secours et l'aida à créer sa propre salle d'exposition, place de l'Alma. Manet peignit le portrait de Zola, incliné sur sa table de travail, sur laquelle est posé le fameux tableau de l'Olympia.

Voir aussi Gilles Castelnau Le joueur de fifre 

 

.

 

William Bouguereau, La Danse, 1856


Bouguereau a une vision idéalisée de la vie
, comme Cabanel. Beauté, sérénité, joie. Tout va bien, les coeurs doivent s'élever dans le bonheur du Second Empire. Cette vision « idéaliste » du monde est bien différente de celle de Courbet, l'ami de Manet, dont une salle du musée d'Orsay présente deux immenses tableaux « réalistes », l'Enterrement à Ornans et l'Atelier.

 

Gustave Courbet, l'Atelier, 1855


« Réaliste » car récusant l'« idéalisme »
, comme Manet, Courbet s'attache à voir et à peindre la « réalité » du monde qui l'entoure. Il peint l'Enterrement à Ornans au lendemain de la grande révolution socialiste de 1848 qui avait notamment voulu instaurer le droit au travail en ouvrant des chantiers nationaux.

A propos de l'Atelier, exposé en 1855 dans son propre « Salon », car le tableau fut refusé à l'Exposition universelle, Courbet écrit :

Je suis au milieu peignant, à droite sont les amis, les travailleurs, les amateurs du monde de l'art. A gauche, l'autre monde de la vie triviale, le peuple, la misère, la pauvreté, la richesse, les exploités, les exploiteurs ; les gens qui vivent de la mort.

 

Courbet finit par atteindre au succès. Il était un homme de gauche. Au fait de sa gloire, en 1870, il refusa la Légion d'honneur. Lors de la Commune de Paris, il fut tellement impliqué dans la résistance, qu'il fut rendu responsable de la destruction de la colonne Vendôme portant à son sommet la statue de Napoléon et considérée comme le symbole de la Droite à abattre. Après la Commune, il fut condamné à en payer la restauration, dont il n'avait pas le premier sou. Il se réfugia en Suisse et il eut le malheur de mourir quelques jours après qu'on ait saisi et vendu tous les tableaux qu'il possédait encore.

 

Alfred Stevens, Ce qu'on appelle le vagabondage, 1854

Ce tableau de Stevens dénonçant la répression des Sans Domiciles Fixes de l'époque et leur arrestation est, lui aussi, un exemple saisissant de cette peinture réaliste, sensible aux malheurs des petits, dont le Second Empire se préoccupait si peu. Devant cette mère sans défense livrée à l'insensibilité de la soldatesque, le peintre se fait le porte-parole des pauvres.

Napoléon III qui déclarait s'attacher à l' « extinction du paupérisme » ne s'y est pas trompé. Choqué que ses gardes soient représentés si crûment, il fit en sorte que les vagabonds soient désormais emmenés en prison avec discrétion, en voiture close !

 

Jean-François Millet, l'Angélus, 1857-59


Il est difficile de décider
si  les tableaux de Millet nous font pencher à gauche ou à droite. D'un côté, sa peinture reflète l'esprit réaliste attaché à description des humbles paysans et à la dureté de leur travail. Mais inversement, leur vie est tellement transcendée et valorisée en exemple moral, religieux et esthétique qu'on y ressent évidemment l'idéal de droite du « Travail, Famille, Religion »

 

Rosa Bonheur, Labourage nivernais, 1849


La même ambiguïté se trouve
dans l'immense tableau de l'étonnante Rosa Bonheur (la première femme à être décorée de la Légion d'honneur).

 

Corot et les impressionnistes. Il est clair qu'en visitant les peintres réalistes du rez-de-chaussée, les impressionnistes de l'étage (il y en a aussi un certain nombre au rez-de-chaussée) paraîtront bien désincarnés de la réalité sociale de leur époque. Eux aussi s'attacheront à représenter la « réalité » mais centrée sur la représentation de la Nature Éternelle et fondue en osmose avec elle, pour esthétique et heureuse qu'elle paraisse, elle ne sera plus celle de la société des hommes.

 

Le « réalisme » de Manet et Courbet rayonne la beauté du souci fraternel et abaisse nos regards vers l'amour du prochain.

L'« idéalisme » de Cabanel et Bouguereau est plus esthétique que chrétien et élève nos regards vers une perfection abstraite et qu'il croit éternelle.

 

 

Ces tableaux sont tous au musée de Paris-Orsay

.

 

Jules Bastien-Lepage, Récolte des pommes de terre, 1884

Jules Bastien-Lepage

1848-1884

 

6 mars 2007

C'est une belle exposition que nous donne le musée d'Orsay. Bastien-Lepage a été initié à la peinture par Cabanel mais il s'est radicalement détourné de l' « idéalisme » dont nous avons parlé ci-dessus pour devenir un peintre « naturaliste » et « réaliste ». Il aimait la campagne et se sentait proche des paysans, qui peignait avec tendresse et compréhension.

Émile Zola disait qu'il était « le petit-fils de Courbet de de Millet ». Néanmoins son « réalisme » n'était pas du tout politique et social comme celui de Courbet (et de ses compagnons « réalistes »). Jamais il n'aurait participé à abattre la colonne Vendôme et fait le coup de feu sur les barricades. Zola voyait juste en le rapprochant de Courbet mais en ajoutant immédiatement le nom du doux Millet.

Bastien-Lepage était proche du naturalisme des « impressionnistes ». Comme eux il plantait son chevalet dans la campagne, sans laquelle il n'aurait pas pu vivre. Mais il ne les suivait pas au point d'oublier la réalité des hommes. Il ne cherchait pas, comme eux, à rendre avant tout les reflets de la lumière l' « impression » que provque l'atmosphère du temps. Il était trop proche des hommes et de leur « réalisme ».

C'est, sans doute, à cause de cette double proximité de la nature et des hommes qu'il connu un énorme succès, qui ne fut, de leur temps ni celui des véritables « réalistes » ni celui des « impressionistes » : Il fut décoré de la Légion d'honneur, il était un piliers du Salon, ses tableaux, impatiemment attendus par la critique, étaient régulièrement commentés, lui valaient des récompenses et plusieurs d'entre eux furent achetés par l'État !

 

Jules Bastien-Lepage, les Foins, 1882


Courbet aurait apprécié dans ce tableau
le réalisme de la fatigue - de la souffrance ? - de ces paysans. L'homme est écrasé. La jeune femme a un regard halluciné d'épuisement.
Millet aurait partagé la communion du peintre avec ces paysans qu'il comprenait se bien.

Les impressionnistes auraient certainement admiré son amour de la campagne mais... l'auraient sans doute trouvé trop proche du monde des hommes, trop réaliste ! Voyez Renoir !

 

Auguste Renoir, les Moissonneurs, 1873


Et le visiteur d'aujourd'hui
apprendra devant ces tableaux, à ouvrir son cœur à son prochain.

 

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