Historicité
des récits de la résurrection
Les évangiles
Les récits de la mort du
Christ sur la croix la présentent comme un fait historique
indubitable, dont tous les passants de Jérusalem pouvaient
être témoins mais dont le sens profond dépend de
la foi de chacun, de sa capacité à reconnaître
l' « accomplissement des
Écritures , de sa
lucidité spirituelle.
Les récits de la résurrection
du Christ le matin de Pâques, son passage de la mort sur la
croix à la vie divine, sont d'un genre différent :
ils nous décrivent un fait dont le sens profond dépend,
lui aussi de la foi de chacun mais dont la réalité
n'est sensible qu'à la foi ; les passants
indifférents n'auraient pu en être témoins. Cela
ne signifie pas que l'événement de la
Résurrection du Christ est moins « vraie » que sa mort ; elle se situe à un autre
niveau d'existence.
C'est ainsi qu'on ne peut harmoniser les
récits des quatre évangiles et que des
difficultés insurmontables se présentent à celui
qui voudrait faire l'économie de cette réflexion. Une
lecture attentive et positive de ces récits nous en fait mieux
pénétrer le sens que la lecture fondamentaliste qui
s'appuie sur une prétendue « inerrance » (vérité littérale) du texte
biblique.
Loin de rejeter l'autorité de la
Bible, nous cherchons à lui donner toute son importance. Ce
sont bien les auteurs bibliques dont le témoignage fonde notre
foi. Rechercher les ressemblances et différences entre les
évangiles par exemple et les rapports entre les diverses
affirmations du Nouveau Testament ne met pas en question la certitude
de ceux qui se savent transformés par la foi.
Si nous croyons en la Résurrection de
Celui que nous appelons « Seigneur », c'est bien parce que nous participons avec lui au
passage de la mort à la vie ; parce que nous laissons, comme
il nous l'a enseigné lui-même, l'Esprit divin envahir
notre propre esprit. Ce ne sont pas les détails historiques
rapportés par les évangélistes qui sont
importants, mais le pouvoir puissant qu'ont sur nous leurs
évangiles, comme le savent bien ceux qui ont l'habitude de les
méditer.
Lisons donc, et remarquons les
différences :
- L'évangéliste Matthieu nous
décrit un ange formidable descendant du ciel alors que Marc
montre dans le tombeau un jeune homme assis, Luc deux hommes et Jean
personne du tout.
- Les apparitions du Ressuscité sont, elles
aussi, différentes. Non seulement les disciples qui en sont
témoins ne sont pas les mêmes (et la liste que Paul en
donne en I Corinthiens 15.5-7 est elle aussi
différente) mais leur intention même
diffère.
On peut distinguer les préoccupations
des évangélistes Matthieu et Marc d'une part, Luc et
Jean d'autre part. Les premiers rendent le lecteur sensible à
la puissance et à la gloire du Ressuscité qui
contrastent avec l'humiliation et la défaite du Vendredi
saint. Les seconds suggèrent le secret, l'incognito de sa
présence auprès des siens.
Ainsi, dans l'évangile de Matthieu le
Christ ressuscité est montré exalté,
vainqueur : l'ange descend du ciel et roule de force la pierre
gardée par les soldats. Les soldats qui, lors du Vendredi
saint, se moquaient, frappaient, crucifiaient sont « comme morts » le matin de Pâques !
Par contre le 4e évangile
nous présente Marie pleurant près du tombeau :
« on a enlevé mon
Seigneur et je ne sais pas où on l'a
mis » alors même que
Jésus se tient debout derrière elle et prononce son
nom :
« Marie ! »
Luc décrit les disciples cheminant
vers Emmaüs en compagnie de Jésus sans pour autant le
reconnaître, sinon dans le geste du partage du pain, comme cela
nous est proposé à tous.
Ce sont deux réflexions spirituelles
parallèles, deux méditations complémentaires de
la vie en communion avec le Ressuscité. Bien d'autres
remarques analogues jailliront d'une lecture attentive des textes si
seulement on prend garde à éviter tout fondamentalisme
écrasant les nuances souvent très subtiles avec
lesquelles les auteurs saints ont travaillé leurs
évangiles. Ils sont écrit avec tant de
délicatesse et nous lisons si vite !
- L'affirmation du
troisième jour qui
traversait déjà les récits
évangéliques (« le Fils de l'homme ressuscitera le
troisième jour »
Mat 17.22) est elle aussi hautement symbolique et chargée
de sens depuis les origines de l'Ancien Testament :
« L'Éternel
dit à Moïse : Va vers le peuple, sanctifie-les
aujourd'hui et demain, qu'ils lavent leurs vêtements, qu'ils
soient prêts pour le
troisième jour, car le
troisième jour l'Éternel descendra, aux yeux de tout le
peuple sur la montagne du Sinaï » (Ex 19.10).
« Ainsi parle l'Éternel,
le Dieu de David ton père : j'ai entendu ta
prière, j'ai vu tes larmes. Voici je te guérirai ;
le troisième jour tu pourras monter à la maison de
l'Éternel » (2 Rois 20.5).
« Venez, retournons à
l'Éternel ! Car il nous guérira, il bandera nos
plaies, il nous rendra la vie dans deux jours ; le troisième jour il nous relèvera, et nous vivrons devant lui... sa venue est
aussi certaine que l'aurore. »(Osée 6.2)
« Préparez-vous des
provisions, car dans trois
jours vous passerez le
Jourdain. »(Josué
1.11).
Mentionnons aussi Jonas et ses
trois jours dans le ventre du poisson ainsi que la fugue de
Jésus à douze ans (Luc 2.41) que ses parents
retrouvent le troisième jour
dans le temple de Dieu !
Cette conviction de toute
l'Écriture que la
libération suscitée par Dieu se produit toujours
à nouveau, dans toutes les situations de malheur imaginables,
se manifeste par ce symbole permanent du troisième jour. Il faut bien sûr approfondir sa
signification : l'intervention de Dieu n'est jamais
instantanée et automatique elle ne se fait pourtant pas
attendre vraiment longtemps. Mais il serait dommage de prendre
à la lettre un symbole chargé de sens.
Quand le doigt indique la lune il ne faut
pas regarder le doigt ! Il est clair que ces diverses mentions
d'apparence historiques ont pour but d'attirer l'attention sur des
éléments théologiques et spirituels ; on
dévalorise les textes en y cherchant une vérité
historique et de plus on s'y perd à cause des contradictions
qui les rendent alors peu crédibles.
En effet, si la Résurrection de
Jésus avait dû se passer précisément le
troisième jour, il n'aurait pas pu dire au brigand :
« Ce soir même, tu
seras avec moi dans le paradis » (Luc 23.43)
Un journaliste qui aurait
été présent sur
les lieux des apparitions du Ressuscité n'aurait, sans doute,
rien enregistré sur la pellicule de sa caméra, sauf
bien entendu les visages émerveillés et apaisés
des disciples qui, eux, contemplaient le Ressuscité avec les
yeux de leur foi.
L'importance des récits de la
Résurrection n'est donc pas de rapporter, comme des
journalistes le feraient, des faits constatables, mais d'ouvrir nos
coeurs à l'intervention divine, décisive pour nous
comme pour la vie du monde. C'est l'acte créateur central de
Dieu qui récapitule et répète toutes ses
interventions antérieures (et postérieures) depuis la
première Pâque, passage du peuple hébreu des
ténèbres d'Égypte au pays d'Israël
où coulent le lait et le miel (Ex 13.5),
émerveillement du retour de la captivité à
Babylone : « Ce peuple
assis dans les ténèbres voit une grande
lumière »
(Esaïe 9.1), ainsi que toutes
les libérations chantées par les psalmistes :
« Des profondeurs je
t'appelle, Éternel... » (Ps 130.1).
C'est l'acte d'intervention de
Dieu qui approuve et ratifie le
combat de Jésus-Christ en faveur de l'humanité et
contre les intégrismes religieux symbolisés par les
Pharisiens ; Pierre disait bien :
« Vous avez fait
mourir le Prince de la vie, que Dieu a ressuscité des
morts ; nous en sommes témoins. C'est par la foi en son
nom que son nom a raffermi celui que vous voyez et connaissez ;
c'est la foi en lui qui a donné à cet homme cette
entière guérison, en présence de vous
tous ». (Actes 3.15)
.
Nous croyons en
Dieu
Malgré son silence et son
secret,
nous croyons qu'il est vivant.
Malgré le mal et la souffrance,
nous croyons qu'il a fait le monde
pour le bonheur de la vie.
Malgré les limites de notre raison
et les révoltes de notre coeur,
nous croyons en Dieu.
Nous croyons en
Jésus-Christ
Malgré les siècles qui
nous séparent de lui,
nous croyons en sa parole.
Malgré sa faiblesse et sa pauvreté,
nous croyons que sa mort est notre vie.
Malgré nos incompréhensions et nos refus,
nous croyons en sa résurrection.
Nous croyons en
l'Esprit saint
Malgré les apparences
nous croyons qu'il conduit l'Église.
Malgré la mort,
nous croyons à la résurrection.
Malgré l'ignorance et l'incrédulité,
nous croyons que l'espérance
du Royaume de Dieu
est pour tous les hommes.
Le Dieu de la
Résurrection
Le Dieu qui a ressuscité
Jésus-Christ est donc le
fondement de la Vie, le créateur du renouveau ; il n'est
pas le Jupiter à la toute-puissance capricieuse que les
gréco-romains imaginaient.
Les interventions de Dieu témoignent
toujours, du début à la fin de la Bible et dans la
ligne de la Résurrection, de sa présence, source de
vie, restaurant inlassablement la création toujours à
nouveau menacée par les forces destructrices de la mort. Dieu
est à chercher dans le fondement qu'Il donne en permanence
à toute vie et non pas dans des miracles surnaturels
extraordinaires
L'Esprit de vie dont nous parlerons à
propos de Pentecôte est donc caractérisé par la
lutte et l'acceptation de la défaite et de la souffrance du
Vendredi saint d'une part, par la victoire de Pâques et son
enracinement dans le fondement de la Vie elle-même d'autre
part. Il nous recrée de l'intérieur, inspire à
notre esprit le courage de vivre qui a fait vivre Jésus-Christ
lui-même, comme son ministère nous le
révèle. Le théologien Paul Tillich remarque que
notre préoccupation ultime, fondamentale, est de
résister à cette menace de la mort, du néant
dans nos existences.
L'art, la littérature se font
l'écho de ce mal de vivre que nous ressentons. Dieu
répond à cette préoccupation et nous rend
capables en union avec lui de surmonter cette angoisse.
Nous connaissons aussi, dit-il, l'angoisse
du vide, de l'absurde ; l'angoisse de la culpabilité, de
la damnation même ; et toujours notre appartenance au
monde de Dieu nous renouvelle le courage de vivre tel que
Jésus-Christ nous l'a fait connaître à travers le
Vendredi saint et Pâques.
C'est pourquoi mettre sa confiance en la
Providence n'est pas s'imaginer qu'une activité
spéciale de Dieu va venir modifier les conditions de notre
existence ; c'est plutôt croire avec le courage de la foi
qu'aucune situation, quelle qu'elle soit, ne peut nous séparer
de l'amour de Dieu manifesté en Jésus Christ, ni
compromettre l'avenir que nous vivons avec Dieu.
« Qui nous
séparera de l'amour de Christ ? La tribulation, ou
l'angoisse, ou la persécution, ou la faim, ou la
nudité, ou le péril, ou l'épée [...] Mais dans toutes ces choses nous sommes plus que
vainqueurs par celui qui nous a aimés.
Car j'ai l'assurance que ni la mort ni la vie, ni les anges ni les
dominations, ni les choses présentes ni les choses à
venir, ni les puissances, ni la hauteur, ni la profondeur, ni aucune
autre créature ne pourra nous séparer de l'amour de
Dieu manifesté en Jésus-Christ notre
Seigneur ». (Romains 8.35-39)
Le philosophe Cioran
écrit :
« Aimer les grandes
joies et les grands désespoirs ; mais haïr à
mort l'inertie, le doute et la passivité. Que nous soyons
positifs ou négatifs, peu importe ; il suffit que notre
esprit vibre. Car d'une grande négation ne peut pas ne pas
sortir une grande affirmation. Que la folie soit notre seule
sagesse ». (Le livre des leurres, p.49)
La prière dans l'ambiance de la
mort du Christ et de sa résurrection.
Nous assumerons comme Jésus-Christ l'a fait les conditions de
notre existence ; nous puiserons en nous le courage que le Saint
Esprit y renouvelle pour traverser les ténèbres du
Vendredi saint avec au coeur la flamme de la victoire de
Pâques. Nous enracine-rons en Dieu les moments de nos
existences et nous en tirerons toujours à nouveau le sentiment
de la paix qu'il donne aux siens.
L'éthique
repensée dans l'Esprit de Pâques
Le théologien californien Matthew Fox
écrit :
« Tout est en
mouvement, tout est en route, tout bouge, vibre, danse et
émerveille. [...] Nous voyons le créateur sous les
traits d'un artisan qui conçoit l'univers comme une grande
cithare (image rafraîchissante d'un Dieu qui ne juge
pas !). Et toute cette musique cosmique n'est
qu'harmonie ».
(La Grâce originelle p.84)
Il propose de considérer comme une
faute, comme un péché, le fait de nous détourner
du dynamisme créateur que l'Esprit divin s'efforce de faire
vivre en nous : ne pas être amoureux de la vie,
négliger l'énergie, la créativité de
l'Esprit de Pâques, se dessécher, admettre la laideur,
l'ennui, la médiocrité, se réfugier dans une
immobilité sécuritaire, ne pas transmettre à la
jeune génération l'amour de la beauté, la
conscience de la vie agissante dans le cosmos entier, laisser
à la mort et au pessimisme la victoire sur la vie et la
joie !
Anne Wilson Schaef, disciple anglaise de Matthew Fox :
« Quand nous
engageons notre processus de guérison, nous commençons
à nous impliquer davantage dans nos propres vies. En y
participant davantage nous commençons à faire davantage
confiance à notre Créateur... vivre une vie de foi
devient réalité, non plus abstraction... On ne peut
s'enfoncer dans la situation de victime et vivre de
spiritualité ».
Maître Eckhart, dominicain allemand du XIVe
siècle écrivait :
« Aucune
créature n'a d'être ; car leur être à
toutes est suspendu à la présence de Dieu. Si Dieu se
détournait d'elles ne fut-ce qu'un instant, elles
retourneraient au néant ». (Sermon
n°4)
.
N'oublie pas, au temps
de Pâques
qu'au plus profond de
toi-même,
en ton être le plus intime,
Dieu renouvelle sa Vie divine.
Les explications, les analyses
ne doivent pas te réduire, te séduire.
Ta famille, ta profession
ton caractère et ton passé
n'expliquent pas complètement ton présent.
Et ton présent, à
cause de Pâques,
s'ouvre sur des choses nouvelles.
Renforce ta foi, ton
espérance et ton amour.
Chaque instant de ta vie est unique.
Chaque instant de ta vie est neuf.
Retrouve Dieu en toi,
redeviens ton propre guide
grâce à lui.
Reprends possession de toi
sur des chemins qui seront
véritablement dignes de toi,
dignes de lui.
.
La divinité de
Jésus-Christ
Saisis par la conviction de sa
résurrection par Dieu, nous
comprenons que les actes et les paroles de Jésus sont
véritablement ceux que le saint Esprit du Vendredi-saint et de
Pâques a suscités en lui, comme il cherche à le
faire en tout homme pour la construction d'un monde meilleur, du
Royaume de Dieu.
A la différence des autres hommes qui
négligent et s'éloignent leur filiation divine,
Jésus est vraiment le Fils de Dieu, son souffle est vraiment
mêlé au Souffle divin, son esprit imprégné
de l'Esprit saint.
Il nous arrive souvent d'avoir conscience de
notre propre transcendance, mais lorsqu'il s'agit de vivre cette
union dans le concret de l'existence notre incapacité
apparaît, notre aliénation se manifeste. Jésus
Christ, « issu selon la
chair de la lignée de David, a été établi
selon l'Esprit saint Fils de Dieu avec puissance par sa
résurrection d'entre les morts » (Romains 1.6).
Nous prendrons garde de méditer
correctement ce passage de Paul qui
nous interdit de prendre ce terme de Fils de Dieu au sens
littéral, et de projeter dans la vie de Dieu la situation
d'une famille humaine. Cela donnerait à ce titre un sens
superstitieux et en déformerait le sens.
Les controverses philosophiques du
IVe siècle concernant la nature divine de
Jésus, aboutissant à l'expression du credo :
« vrai Dieu né du
vrai Dieu, engendré non pas
créé... » ne
sont plus dans notre langage actuel. Paul Tillich propose de ne plus
les employer et de remplacer l'expression inadéquate de nature
par celle d'unité de Dieu et de l'homme par exemple, qui
exprime une relation dynamique plutôt qu'une pensée
abstraite.
Il convient d'ailleurs de toujours penser au
rapport de l'expression Fils de Dieu avec la Résurrection de
Pâques, car une divinité naturelle de Jésus lui
donnerait une ressemblance dangereuse avec les divinités
païennes qui, comme Zeus, qui se métamorphosaient
couramment en simples mortels pour une visite sur la terre avant de
remonter sur leur Olympe.
La piété populaire
préférerait, certes, un Dieu qui se promène sur
la terre ; un Dieu qui ne serait pas engagé dans les
conflits de l'existence et les ambiguïtés de la
vie ; on pourrait alors solliciter de lui des miracles sans nous
sentir engagés nous-mêmes dans son Ministère
puisqu'il ne serait pas, lui, véritablement engagé dans
notre humanité.
Sous-estimer ainsi l'humanité de
Jésus dans sa vie, sa croix et sa résurrection par Dieu
l'éloigne de nous, néglige sa participation
réelle aux conditions de notre existence et nous prive en fait
d'un... sauveur !
La croix.
D'ailleurs celui que nous nommons, de par sa Résurrection,
Fils de Dieu, a été auparavant le
crucifié ; il a résisté à la
tentation diabolique du pouvoir et de la puissance, à tout ce
qui pouvait attirer les gens à lui plutôt que de les
amener à Dieu. Totalement uni à Dieu, fondement de son
être, transparent à la présence divine,
l'importance ultime de sa vie ne résidait pas en sa personne
mais en son Père. C'est au seul crucifié qu'on peut
dire : « Tu es le
Christ, le Fils de Dieu ».
.
Le jeune homme
vêtu de blanc
Laissons enfin les images finales de
l'évangéliste Marc
(16.1-7) pénétrer nos coeurs et les
revitaliser :
- « Le
premier jour de la semaine, elles se rendirent au sépulcre, de
grand matin, comme le soleil venait de se
lever ».
Jean a préféré dire
(20.1) qu'il faisait encore obscur mais ici, Marc nous situe devant
ce soleil levant éclatant au sortir d'une nuit : c'est
cela l'atmosphère de la Résurrection ; une
nouvelle journée commence dans sa pureté et ses
promesses alors que rien n'est encore vécu, corrompu,
compromis.
- « Elles
virent un jeune homme assis à droite vêtu de
blanc ».
Assis, donc paisible, calme. On est loin du
tremblement de terre impressionnant qu'évoque Matthieu (28.2).
Ce jeune homme assis dans le matin calme, invite à un autre
regard sur la vie que le cadavre que les femmes voulaient
fleurir !
- « Elles
aperçurent que la pierre, qui était très grande,
avait été roulée ».
Pierre tombale, pierre impossible à
rouler de toutes les lourdeurs, de toutes les anxiétés
; pierre de toutes les murailles, impossibilités, regrets
éternels, pierre des blocages, des résignations, des
timidités, des dépressions...
- « Il leur dit : il est ressuscité, il n'est
point ici ; voici le lieu où on l'avait
mis ».
Il faut refaire lentement et difficilement
le chemin qui nous sort de notre frigidité sentimentale, de
notre enfance perdue vers un vrai renouveau, une force
créatrice, un esprit de vie.
.
Pour le monde et pour
moi,
j'ai confiance en Jésus de
Nazareth.
Il est le seul Sauveur et Maître.
Il a été l'homme véritable,
comme nul homme ne peut l'être par lui-même.
Il est mort sur une croix
pour les autres et pour le monde
comme pour moi.
Il est ressuscité.
Il est présent dans tous les hommes,
et pour les servir, il recrute son Église
sans tenir compte de nos distinctions.
Il agit par les hommes dans
l'histoire,
pour la mener à son but,
un univers réconcilié dans l'amour.
Ainsi je ne crois à la fatalité
ni de la haine, ni de la guerre,
ni de la catastrophe, ni de la mort,
parce que je crois que Jésus libère l'homme
pour des décisions libres.
Grâce à lui, ma vie a
un sens,
l'univers aussi.
Pour le monde et pour moi,
j'espère en Jésus de Nazareth,
il vient.
Église
réformée de Montpellier
.
Le Seigneur
Jésus-Christ
avant de ressusciter
a reposé trois jours en terre.
Et depuis ces jours-là
la tombe des hommes est devenue
signe d'espérance en la résurrection.
.
Au cimetière
Au moment où nous nous
séparons
de ce qui est périssable,
nous affirmons notre foi
en la Vie éternelle,
notre confiance en Dieu
plus fort que la mort,
notre communion avec les croyants
de tous les temps :
« Ne crains pas, dit
Jésus-Christ, crois seulement. »
.
Ainsi parle le
Seigneur :
Il est terminé le temps du sépulcre et de la mort.
Je fracasserai vos tombeaux et leur poussière flottera.
Dans le soleil du matin j'ouvrirai vos tombeaux.
J'en arracherai les terreurs
et je les éparpillerai aux vents de l'aurore !
Avec mes mains nues je vous forcerai un passage
je vous tiendrai la lourde porte et je vous le dis en
vérité :
Vous passerez
Vous passerez courageux et
lâches, lumineux et sombres
vous passerez avec ceux que vous aimez
Ceux qui ont cru et ceux qui ont désespéré
Personne ne restera en arrière, personne ne sera
oublié.
Le tombeau est ouvert, je vous le dis : vous pouvez vivre.
Levez-vous de tous les déserts où vos ossements
reposent
Arrachez-vous au pesant passé
et je vous le dis, en vérité :
Votre regard sera assez pur pour
discerner le visage brillant comme le creuset de la
lumière.
Je vous le dis, en vérité :
Vous entendrez la voix et elle vous transpercera
comme une musique longtemps cherchée elle vous dira :
« Venez, fils et filles
bien-aimés.
Entrez dans la joie de votre Seigneur »
Pasteur Leila
Hamrat
.
On se laisse baigner
dans l'atmosphère de la Résurrection.
On ne discourt pas sur elle.
on respire l'Esprit saint,
on s'enracine dans le Fondement de la Vie.
Et après avoir
bénéficié de l'apaisement
qui en émane
et du dynamisme que l'on y puise,
c'est sans crainte
que l'on rencontre la mort.
Pasteur Gilles
Castelnau
Pâques
11 avril 2004
Précisons nos idées
et celles de nos contemporains
qui sont souvent floues et occasions
de rebuffade : « Que
s'est-il passé à Pâques ? Que dit la foi
chrétienne ? »
Le Christ est
ressuscité
En vérité il est ressuscité
Très bien. Mais que signifie
« ressuscité » ?
A cause d'une ignorance de ce que nous
disons de Pâques, bien des
gens se détournent du christianisme, plus ou moins
consciemment.
J'en prends en exemple les journalistes de la
télévision qui craignent par dessus tout de se lancer
dans des idées dont manifestement ils ignorent tout et qui
bottent en touche en ne parlant que de petits sujets anecdotiques
ridicules : je pense à ce brave pâtissier du
quartier Montorgueil qui déclarait à la
télévision qu'il demeurait très traditionnel
pour Pâques et que la tradition de Pâques c'était
les lapins, les poules et les oeufs en chocolat.
Il y a quelques années
encore on mentionnait pour expliquer
Pâques le renouveau du printemps, les arbres en fleurs.
Maintenant on en est aux lapins en chocolat !
Tout au plus avons droit à une image du Vatican, du pape et de
pèlerins !
Le Christ est
ressuscité
En vérité il est ressuscité
Très bien. Mais je repose la question
: que signifie « ressuscité » ?
Les gens qui n'ont pas eu de
catéchisme (et c'est la
majorité des jeunes d'aujourd'hui) se font une image
insensée d'un cadavre dans l'obscurité de sa tombe qui,
un dimanche à l'aube, se dresse tout seul, traverse en
marchant dans le noir son tombeau souterrain, traverse la pierre qui
le fermait (il traverse la pierre puisqu'on nous dit que lorsqu'un
ange est descendu du ciel pour la rouler, le tombeau était
déjà vide. Matthieu 28 ).
Et ensuite il apparaît à des gens qui, tantôt,
comme Marie-Madeleine le prennent pour le jardinier Jean 20.11 ou comme les disciples d'Emmaüs qui marchent
plusieurs kilomètres avec lui sans le reconnaître
Luc 24.13. Tantôt à travers la porte de la
pièce où sont rassemblés les disciples et laisse
Thomas mettre son doigt dans les plaies de ses mains Jean 20.26.
Je comprends que l'on
préfère partir à la campagne en week-end en mangeant des lapins en chocolat
plutôt que d'amarrer sa spiritualité, son
espérance et son courage de vivre à des récits
qui paraissent enfantins ou légendaires. Et que l'on se
désole de penser que pasteurs et prêtres semblent croire
à des récits aussi extravagants.
Le Christ est
ressuscité
En vérité il est ressuscité
Très bien. Mais je repose la question
: que signifie « ressuscité » ?
La plus ancienne mention de la
résurrection du Christ est
faite par saint Paul. Il écrit aux Corinthiens (nous sommes
dans les années 55, c'est-à-dire 25 ans
après la mort et la résurrection de
Jésus-Christ : nous n'avons aujourd'hui aucun texte sur
la résurrection plus proche des événements)
Il est ressuscité le
troisième jour, selon les Écritures.
Il est apparu à Céphas, puis aux douze disciples.
Ensuite, il est apparu à plus de cinq cents frères
à la fois, dont la plupart sont encore vivants, et dont
quelques-uns sont morts.
Ensuite, il est apparu à Jacques, puis à tous les
apôtres.
Après eux tous, il m'est aussi apparu à moi. 1 Corinthiens 15.
Luc,
dans les Actes de
Apôtres, rapporte le
témoignage personnel de Paul :
Une lumière venant du
ciel resplendit autour de lui.
Il tomba par terre, et il entendit une voix qui lui disait :
- Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu ?
Il répondit :
- Qui es-tu, Seigneur ?
Et le Seigneur dit :
- Je suis Jésus que tu persécutes. Actes 9.
Ce récit de la rencontre de Paul
avec le Christ ressuscité est
donc beaucoup plus simple et plus sobre que celles rapportées
par les évangélistes qui les ont mises par
écrit dans les
années 70 à 90.
Les biblistes remarquent notamment que Paul ne mentionne pas
l'existence d'un tombeau où le corps de Jésus aurait
été mis, qui serait donc désormais vide et que
l'on pourrait aller visiter, comme une preuve de la
résurrection.
Il ne donne comme témoignages de la
Résurrection
« que » les
apparitions à Céphas (c'est l'autre nom de Pierre, aux
douze disciples, à 500 disciples, à Jacques puis
à tous les autres apôtres).
Et il s'en contente ! il fonde même tout son enseignement,
toutes ses épîtres, uniquement sur cette vision qu'il a
eue de la glorification du crucifié.
Paul est un mystique (Chacun de nous, à sa manière, ne
l'est-il pas ?). Par exemple, dans sa grande épître
aux Romains, il dit que, dans notre spiritualité, nous sommes
unis au Christ, pour ainsi dire, nous sommes devenus une même
plante avec lui.
Et puisqu'à Pâques, le Christ est passé de la
mort à la vie, nous aussi, mystiquement unis à lui,
nous pouvons passer dans notre existence concrète de la mort
à la vie.
Il prend le symbole du baptême où, on le sait, à
l'époque on plongeait le fidèle tout entier dans l'eau,
comme s'il se noyait et on le sortait dans une nouvelle grande
respiration, comme s'il naissait à une existence
renouvelée :
Nous avons été
ensevelis avec lui par le baptême, en sa mort,
afin que, comme Christ est ressuscité des morts, par la gloire
du Père,
de même nous aussi nous marchions en nouveauté de
vie.
Si nous sommes devenus une même plante avec lui,
par la conformité à sa mort,
nous le serons aussi par la conformité à sa
résurrection. Romains 6
.
Nous ne devons pas nous buter sur des
récits de cadavre réveillé dans la
tombe, de traversées de
portes fermées, toutes choses qui semblent invraisemblables
à nos esprits scientifiques et curieux.
Ceux qui ne peuvent pas croire que ces événements se
sont réellement passés comme ils sont racontés
(de façon d'ailleurs contradictoire les unes des autres dans
les évangiles), ne sont pour autant pas privés du
message de Renouveau.
C'est ce message qu'il est important de dire à nos enfants et
dont il faut témoigner dans nos conversations quotidiennes. Un
message qui ne fait pas sourire mais qui séduits et
fascine :
En puisant en nous
cet élan vital, ce dynamisme créateur, cet Esprit de
renouveau,
nous passons dans notre existence, d'une mort intérieure
à la vie.
Nous pouvons être unis à Jésus-Christ comme
« une même plante »
Ce n'est pas simplement une leçon
d'optimisme comme chacun peut en
donner et en recevoir ; ce n'est pas seulement dire qu'en effet,
« après la pluie le
beau temps », « tout finit toujours par
s'arranger »,« la bouteille n'est pas seulement
à moitié vide, elle est plutôt à
moitié pleine ».
Il n'y a pas besoin de Dieu pour dire cela. Il suffit de se tenir un
peu en mains et ne pas se laisser aller au pessimisme, à
l'agressivité et à la dépression.
Le message de Pâques est celui de
la Présence de Dieu en nous.
La force créatrice de cet Esprit, ce souffle, cet élan,
qui monte depuis le plus profond de notre être. La victoire de
la vie sur la mort est le symbole central de l'action infiniment
répétée au cours de l'histoire de
l'humanité du Dieu sauveur, créateur de vie. La
Résurrection du matin de Pâques est le prototype de tous
les actes créateurs de renouveau accomplis dans tous les
siècles par Dieu, de toutes les interventions divines
rapportées par l'Ancien Testament : Pâques les
résume toutes ; c'est l'événement central de
l'histoire du monde.
L'Ancien Testament se
réfère à « la
Pâque »,
événement fondateur de la Sortie d'Égypte avec
Moïse Exode 15
qui décrit le passage de la vie
impossible dans « le Pays
de servitude » à
« la Terre où
coulent le lait et le miel ». Renouveau toujours espéré et
vécu à nouveau en communion avec le Dieu
libérateur : le petit David triomphera du mauvais
géant Goliath 1 Samuel 17.12, les Israélites déportés
à Babylone vivront le retour libérateur et le
comprendront comme une sorte de résurrection Ezéchiel 37, etc. etc.
Depuis la création du
monde par « l'Esprit de Dieu qui planait sur les
eaux » Genèse 1, le même Esprit
« réveille » les hommes et les « relève ». Et ces deux mots sont
précisément ceux qui, en grec, désignent dans le
Nouveau Testament la « résurrection » : réveillé, relevé.
Nous trouverons toujours en nous ce Souffle
qui nous relève lorsque le poids de l'existence nous courbe
vers la terre ; cet appel qui nous réveille de notre
léthargie, de notre dépression, de nos aigreurs, de nos
angoisses :
Comme Christ est
ressuscité des morts, par la gloire du Père,
de même nous aussi nous marchions en nouveauté de
vie.
Si nous sommes devenus une même plante avec lui,
par la conformité à sa mort,
nous le serons aussi par la conformité à sa
résurrection.
.
Notre
résurrection
Au temps de Paul, comme
aujourd'hui, la conviction que la
vie ne s'arrêtait pas à la mort mais se poursuivait,
d'une manière ou d'une autre dans l'au-delà,
était, sinon généralisée, du moins
très fréquente. On sait que dans le judaïsme
l'idée d'une vie dans l'au-delà (que l'Ancien Testament
n'imaginait pas encore) s'était développée dans
l'intervalle de temps séparant l'Ancien et le Nouveau
Testament. Les Sadducéens ne l'admettaient pas Actes 23.8 mais les Pharisiens y croyaient.
Les païens gréco-romains y croyaient tout à
fait : ils disaient que l'âme humaine est immortelle car
elle est une goutte de l'océan céleste de
lumière divine et que lorsque le corps matériel se
décompose à la mort, l'âme divine et donc
immortelle s'en libère et monte de ciel en ciel. Il
n'était, dans cette conception païenne
gréco-romaine, pas besoin d'un Dieu pour cela, l'âme
étant par nature immortelle. C'est la conception de Platon et
de bien d'autres après lui.
Certains de nos jours continuent à
concevoir un au-delà où les âmes se retrouvent
dans un séjour éternel, en compagnie d'autres
âmes, celles des parents, des conjoints, des proches et des
amis, avec aussi, pourquoi pas leurs animaux familiers.
Au temps du Nouveau Testament, beaucoup de ces gréco-romains
pensaient d'ailleurs que ces âmes reprenaient vie dans le
monde, en une sorte de réincarnation qui ressemble beaucoup
à celle des hindous et des bouddhistes et que les gens du New
Age affirment à nouveau aujourd'hui.
Paul reprend lui-même cette
conception de l'au-delà céleste où montent les âmes (il dit ainsi par
exemple, que dans une vision il a lui-même été
enlevé au 3e ciel
2 Corinthiens 12.4). Mais au lieu de mettre en rapport l'au-delà
avec une immortalité naturelle des âmes, il dit que
notre résurrection se fait à cause de notre union avec
le Christ.
Comme Christ est
ressuscité des morts, par la gloire du Père,
de même nous aussi nous marchions en nouveauté de
vie.
Si nous sommes devenus une même plante avec lui,
par la conformité à sa mort,
nous le serons aussi par la conformité à sa
résurrection.
Il parle alors de nous en disant que
Jésus-Christ était
comme les prémisses de l'humanité. Les « prémisses » sont la première gerbe d'une moisson ou le
premier mouton d'un troupeau qui, dans la tradition biblique juive
appartenait à Dieu. Selon la conception courante de son
époque, Paul voit Adam, le premier homme, premier mort aussi,
comme une sorte de chef de file de toute l'humanité. Il prend
alors l'image de Jésus comme étant à son tour le
chef de fils nouveau d'une nouvelle humanité :
Christ est ressuscité des
morts, il est les prémices de ceux qui sont morts.
Puisque la mort est venue avec un homme, Adam,
c'est aussi avec un homme Jésus, qu'est venue la
résurrection des morts.
Et comme tous meurent avec Adam,
de même aussi tous revivront avec Christ, 1 Corinthiens 15.20
.
Certains d'entre nous, je le sais
bien, ne peuvent pas parvenir
à croire en la vie éternelle. Le dynamisme
créateur de Dieu, disent même certains, est
arrêté par un péché trop grave (il existe,
disent-ils, des péchés « mortels ») ; mais on peut répondre qu'aucun
péché ne peut limiter la puissance de création
et de renouveau de Dieu.
D'autres pensent que la mort physique est la limite que le dynamisme
créateur de Dieu ne peut franchir. C'est ce que disaient les
juifs sadducéens. Mais on peut répondre, comme saint
Paul que même la mort physique ne peut limiter la puissance de
création et de renouveau de Dieu.
Laissons cela. Peu importe au fond les limites de notre foi.
L'évangéliste Matthieu rapporte une parole de
Jésus selon laquelle même une petite foi, aussi petite
qu'une graine de moutarde, la plus petite de toutes les graines, peut
déplacer les montagnes ! Matthieu 17.20
L'important n'est pas de croire ou de ne pas croire en l'au-delà.
C'est d'ailleurs moins notre problème que plutôt le
problème de Dieu. L'important est de savoir prendre parfois un
petit instant de silence et de calme, de spiritualité, pour
prendre conscience de la puissance de vie que Dieu fait monter en
nous, qui que nous soyons, quelle que soit notre foi, notre religion
ou notre absence de religion. Un Esprit de renouveau, dans l'Esprit
de Jésus-Christ :
Comme Christ est
ressuscité des morts, par la gloire du Père,
de même nous aussi nous marchions en nouveauté de
vie.
Si nous sommes devenus une même plante avec lui,
par la conformité à sa mort,
nous le serons aussi par la conformité à sa
résurrection.
.
A Pâques nous
disons :
Le Christ est
ressuscité
En vérité il est ressuscité
Très bien. C'est cela que signifie
« ressuscité » !
Retour
Retour vers
"Comprendre Jésus-Christ"
Retour vers "mort et
résurrection de Jésus-Christ"
Vos
commentaires et réactions
haut de la page