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Pâques ou rien

La Résurrection au cœur
du Nouveau Testament

 

François Vouga

professeur de Nouveau Testament aux Facultés libres de théologie de Bethel et de Wuppertal (Allemagne)

Jean-François Favre

peintre et historien de l’art, enseignant à Bienne (Suisse)

 

éd. Labor et Fides

377 pages

 

.


Recension Gilles Castelnau

9 mars 2010

Les auteurs nous entraînent à travers les récits de la Résurrection du Christ dans le Nouveau Testament, pour François Vouga et dans l’histoire de l’art pour Jean-François Favre avec un enthousiasme et une intelligence attrayants. Le théologien François Vouga pratique la méthode « narrative » d’étude des textes qui ne nécessite aucune connaissance particulière historique ou théologique de la part du lecteur mais une simple lecture attentive.

En voici un exemple :

Page 33

L'événement fondateur de l'annonce de Pâques
Les évangiles canoniques et les épîtres ne rendent pas compte de la Résurrection elle-même, mais des apparitions du Ressuscité, de la proclamation de Pâques et d'une multiplicité de rencontres qu'elle ont provoquées. Dans l'inventaire qu'il dresse des témoins aux le Ressuscité s'est fait voir, Paul énumère Pierre, les Douze, cinq cents frères qui l'auraient vu, en même temps, en Galilée sans doute, puis Jacques et tous les apôtres, à Jérusalem probablement (l Co 15,5-7). A ce premier double cortège s'ajoutent la multitude des personnages qui peuplent les récits évangéliques du matin de Pâques et ceux des apparitions du Ressuscité. Ils varient d'un évangile à l'autre et s'entrecroisent dans des constellations diverses. On retrouve Marie de Magdala dans les quatre évangiles, mais on rencontre aussi ses diverses compagnes ; Pierre, le disciple que Jésus aimait, que les manuscrits et les Pères de l'Eglise identifient dès le IIe siècle à Jean, fils de Zébédée ; Cléopas et le disciple anonyme sur une route qui descend de Jérusalem ; les Onze - les Douze sans Judas - ou les Dix - les Onze sans Thomas. S'y ajoutent, autour ou à l'intérieur du tombeau, un jeune homme, un ange, deux hommes ou deux anges - les témoins de Pâques - et les soldats qui montent la garde. Le cadre varie. Les scènes se passent devant le tombeau vide, dans la demeure où continuent de se rassembler les disciples, sur le chemin d'Emmaüs, à l'aube, sur les rives du lac de Tibériade ou sur la montagne de Galilée.

Le foisonnement des récits et la multiplicité des personnages mettent en évidence le paradoxe apparent selon lequel Paul et les évangiles insistent sur la réalité de l'annonce de Pâques sans chercher à harmoniser les récits parallèles ni à établir une chronologie des faits. Ce paradoxe résulte de ce qui constitue la vérité de l'Evangile de Pâques. Elle révèle ce qui fait de la Résurrection un événement de changement et de transformation. Elle ne dirige pas le regard sur la particularité des épisodes, mais sur sa signification universelle visible dans l'histoire des témoins.

En contrepoint, Jean-François Favre nous apprend à regarder des tableaux de maîtres représentant certains épisodes des évangiles. Il est évidemment un connaisseur hors pair des peintres dont il commente les œuvres : Le Greco, Rembrandt, Fra Angelico, Cézanne, Monet... Les tableaux qu’il a choisis ne sont pas les plus connus ni les plus beaux de nos musées. Mais justement c’est ainsi qu’il éveille la curiosité et l’intelligence du lecteur qu’il invite à entrer avec lui, de manière nouvelle et inattendue dans la spiritualité et la pensée théologique du peintre.

En voici un exemple :

Page 68



El Greco, La Résurrection

« Tous furent troublés »
La Résurrection du Christ présente l'annonce de Pâques sous la forme d'une apparition du Ressuscité surgissant au milieu des soldats gardant son tombeau. La force de l'interprétation que le Greco propose de l'évangile de Matthieu réside dans le choix d'éviter tout triomphalisme - on serait nécessairement passé à côté de la force transformatrice et créatrice de l'Evangile - et de faire apparaître la puissance de vie révélée par la Résurrection dans la rencontre des personnages qui, tout en étant évoqués par le récit évangélique des femmes devant la tombe, en sont absents ou n'y jouent qu'un rôle secondaire: le Ressuscité« qui n'est pas ici» et les gardes ébranlés par la théophanie. Il prolonge ainsi le chemin ouvert par Matthieu lui-même, qui fait ensuite apparaître Jésus dans la seigneurie de celui auquel tout pouvoir a été donné au ciel et sur la terre (Mt 28,18), et qui transforme les gardes en témoins de la pierre roulée, de la victoire de l'ange et de la Résurrection. […]

« Levez les yeux et regardez »
Il en va tout autrement dans cette œuvre du Greco. Les gardes sont renversés - au propre et au figuré -, mais simultanément aspirés par une force irrésistible qui les tire de leur somnolence. Tous portent leur regard vers le Ressuscité. Sauf l'un d'eux: un misérable, désœuvré, casqué et emplumé, abandonné à lui-même. Hélas! encore plongé dans l'inanité. Ici déjà, par quelques indices, nous commençons à discerner que le Greco interprète les Ecritures librement; qu'il n'y a pas, pour lui, unité de temps, mais rapprochements d'instants divers -le présent et le passé s'entrelacent. Ainsi le soldat au bouclier ne nous rappelle-il pas celui qui, à Golgotha, frappa Jésus au côté d'un coup de lance (Jn 19,34)? De même, celui qui le salue, ne nous rappelle-t-il pas qu'à la vue du tremblement de terre et de ce qui arrivait, le centurion et ceux qui, avec lui, gardaient Jésus, furent fortement troublés et dirent: «Vraiment, celui-ci était Fils de Dieu» (Mt 27,54)?

Proche et lointain
Dans cette Résurrection du Christ, le Greco confesse, lui aussi, à sa manière, l'insondable mystère qu'est, pour lui, l'événement de Pâques. Magistralement. D'une part, Jésus semble être encore à portée de main: voici le bout de l'épée pointée sur la hanche droite. Quant au vieillard, tout entier mis à nu, il est placé derrière la hampe de l'oriflamme tenue par Jésus. Et l'ellipse du bouclier est interrompue, comme on voit, par le bord de la jambe droite de Jésus. Situer le bas de son corps - les pieds, en particulier, disposés comme ils étaient sur la croix - nous amène à voir que Jésus est véritablement « au milieu d'eux ». Et non pas en arrière-fond de la scène, comme il semble, lorsqu'on compare la dimension du corps du Christ à celle du personnage, vêtu de bleu, si grand - qui s'élève en avant-plan jusqu'aux deux tiers de la toile. Tout proche encore ... mais, d'autre part, déjà lointain, tel nous apparaît Jésus. Tel qu'il a été, dans un corps corruptible semblable au nôtre, ou en passe de revêtir à nouveau son corps céleste, incorruptible? Fils de Dieu incarné ou Fils de l'Homme bientôt glorifié? Les personnages figurant dans cette œuvre sont-ils simplement saisis par l'apparition de ce corps en état de lévitation? Ou bien le Greco anticipe-t-il dans le temps, en suggérant l'instant de 1'« Ascension » du Christ (Ac 1,9)?

(9) « ... il fut élevé
et une nuée le déroba à leurs yeux ».

Nuée que le Greco représente sous forme d'aura large, dense, cosmique, se détachant sur un ciel d'aube rougeoyant. En contrepoint, le Greco pare le visage du Christ d'une auréole en losange, rayonnante, tendue sur les bras de la croix sous-jacente.

C’est évidemment un gros livre. Il faut du temps et de la patience, de l’amour aussi, pour suivre les méandres des chemins suivis par les auteurs, qui nous font passer de l’évangile de Marc à celui de Matthieu, de la première épitre aux Corinthiens de Paul aux disciples d’Emmaüs dans Luc, des récits de Noël à ceux de la Transfiguration, encore des Corinthiens à Jean, à Luc etc.

 

Page 16

On comprend bien, en lisant Paul et les évangiles, que le terme de résurrection évoque autre chose qu'une simple réanimation du corps de Jésus et que son élévation vers le Père décrit plus que le mouvement d'une ascension.

 

Page 30

Faut-il croire à la résurrection de Jésus ? Peut-on encore adhérer à l'annonce de Pâques ? Jésus est-il ressuscité, oui ou non ? Quelle est la réalité historique et la vérité de l'événement de Pâques, si la résurrection de Jésus ne se résume pas à la simple réanimation d'un cadavre et si la présence réelle du Ressuscité n'est pas un fantasme ? La question, décisive, ne peut trouver de réponse qu'une fois instruite, en fin de parcours.

 

Pour François Vouga, Pâques est « un événement d’une absolue singularité, effectuant un changement radical de notre réalité quotidienne ». Le lecteur n’est évidemment pas obligé d’entrer avec lui dans une telle orthodoxie. On peut préférer penser que Pâques est le symbole central, le prototype des tous les événements créateurs que Dieu accomplit sans cesse dans le monde des hommes. On peut se souvenir des études récentes de Frédéric Amsler, Andreas Dettwiler et Daniel Marguerat concernant la Source Q dont on peut penser qu’elle nourrissait la foi de bien des Églises du temps de Paul et qui ne mentionne justement pas la Passion de Jésus et sa Résurrection. Les lecteurs dont la pensée est plutôt conservatrice seront plus à l’aise que les libéraux à la lecture de ces pages, mais les remarques si justes de Vouga ne peuvent manquer de séduire tous les amoureux de la Bible.

Page 349

- Si Jésus est ressuscité et si nous avons vu sa gloire, alors il est le Fils descendu du ciel, la Parole faite chair, Dieu seul engendré, c'est-à-dire vrai Dieu et vrai homme, totalement l'un et l'autre. L'éternité est devenue temps et le temps est devenu révélation de l'éternité.
-  S'il est le Fils envoyé dans le monde et retourné vers le Père, il est aussi la lumière qui éclaire l'humanité et la vie, puissance de renaissance qui fait passer du non-sens, du cynisme, du désespoir et de la résignation à la joie des enfants de Dieu.
-  S'il est la Parole créatrice de Dieu qui s'est incarnée, rien de ce qui existe ne s'est fait sans lui et la réalité quotidienne, dans son universalité, reçoit ou trouve en lui son sens.
-  Si rien, dans la réalité de ce qui existe, ne s'est fait sans lui, le temps qui nous est donné et l'espace dans lequel nous sommes appelés à nous mouvoir sont les lieux de notre pensée et de nos décisions. Son Esprit fait de nous les sujets - et non les objets - de la vie qui nous est confiée.

 

Page 362

L'événement pascal est, à proprement parler, le contraire de ce qu'aurait été une réanimation de Jésus de Nazareth mort sur la croix. C'est en tant qu'Absent que le Christ peut être Présent, dans un ordre de vérité autre que les retrouvailles. Les femmes venues prendre congé de Jésus trouvent le jeune homme en blanc et l'annonce de Pâques qui les attendent dans le tombeau, mais pas le Crucifié (Mc 16,1-8), les deux disciples sont aveugles à la présence du Ressuscité qui les accompagne vers Emmaüs, mais remplis de sa présence, dès qu'il a disparu, sur le chemin du retour à Jérusalem (Lc 24,13-35), et le Fils qui va remonter vers le Père enjoint à Marie de Magdala de ne pas le toucher (Jn 20,14-18). ... Or, précisément, Jésus apparaît à Pâques comme celui qui est à la fois corporellement absent et dont on ne peut prendre congé.

 

Page 279

Puisque le message pascal est l'événement fondateur de la foi chrétienne, on devrait pouvoir s'attendre à un foisonnement de témoignages.
- Qui était donc présent lorsqu'il est apparu ?
- Où et quand l'a-t-on rencontré ou vu ?
- Que s'est-il alors passé ?
- De quoi le ressuscité avait-il l'air ?
- Quelle impression a-t-il faite sur l'assistance ?
- Comment a-t-on perçu sa présence ?
- Qu'exprimait et que révélait son visage ?
- Que manifestait son regard ?
Les premières communautés chrétiennes auraient pu nous laisser une pléiade de documents, de comptes rendus de tous genres, de notes personnelles. Or il n'en est pas ainsi. Aussi bien la forme de l'annonce et des récits de Pâques que le langage employé pour penser et transmettre la bonne nouvelle de la Résurrection le montrent : la question à laquelle Paul et les évangiles répondent n'est pas : « que s'est-il passé ? », mais « comment dire l'indicible ? »

 

 

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