Prendre congé de Dieu
Taking leave of God
Don Cupitt
Recension
23 juillet 2009
La publication de « Taking leave of God » (1980) (« Prendre congé de Dieu »), marqua un tournant dans la carrière théologique de don Cupitt. C’est à ce livre qu’il doit sa réputation (tout à fait fausse) de théologien athée comme aussi son titre de « théologien le plus radical du monde ».
C’est également à cette époque qu’il écrivit « The Sea of Faith » et présenta à la télévision d’une série d’émissions du même nom à propos du déclin de la foi en Occident qui lui procurèrent une énorme notoriété.
Cupitt faisait à ce moment-là, trois critiques précises à l’orthodoxie de l’époque.
1. Critique de certaines doctrines, notamment l’enseignement orthodoxe de l’Incarnation de Dieu.
2. Critique de l’attitude rétrograde et obsolète de certains aspects de la vie de l’Église.
3. Critique de certains contenus de la foi chrétienne, notamment la conception théiste de Dieu.
A cette époque aussi, Cupitt s’immergea dans la pensée de mystiques chrétiens, comme Maître Eckhart et se concentra sur la spiritualité et la réflexion sur la religion intérieure.
A la lecture les mystiques, Cupitt se forma l’opinion que le langage humain ne pouvait pas exprimer complètement la réalité de Dieu et développa sa théorie selon laquelle la religion est une projection de la pensée humaine :
Dieu n’est pas un Être existant indépendamment de nous mais il est un produit de notre langage (et de nos idées). Ce n’est pas Dieu qui nous a créés à son image c’est nous qui l’avons créé à notre image (par notre langage).
« Dire que Dieu est amour revient à dire simplement que l’amour est Dieu ».
Un Dieu moralement dominateur
En plus du fait qu’il est impossible de dire quoique ce soit de valable concernant Dieu, Cupitt met également en cause la conception traditionnelle d’un Dieu qui donne des commandements sur la façon de se conduire et nous empêche de faire nos propres choix. En effet, comment prendre librement nos décision, si Dieu est constamment là derrière nous à nous dire ce que nous avons à faire !
Et plus on nous dit que Dieu est parfait, complet et immuable, plus nous sommes écrasés sous la domination d’un tyran cosmique qui n’admet (du moins en ce qui concerne la religion) aucun changement, aucun progrès, aucune amélioration.
Certains tirent leur assurance du fait que Dieu a décrété un certain style de vie pour l’humanité (par exemple en donnant les Dix Commandements) mais Cupitt pense que cela restreint notre liberté morale et religieuse : la présence d’un tel Dieu laisse bien peu de choix aux hommes en matière de foi et de liberté de vie.
Les années du post-modernisme (1981-1996)
La principale raison pour laquelle Cupitt a fini par abandonner l’idée d’un Dieu « là-bas » est qu’il disait ce que Dieu n’est pas (via negativa) plutôt que ce que Dieu est (via positiva).
Évidemment la via negativa ne se distingue pas facilement de l’athéisme : si on ne peut rien dire de Dieu, qu’est-ce qui nous empêche d’aller jusqu’à dire qu’il n’y a pas de Dieu du tout). Mais Cupitt a toujours refusé de se dire athée. Tout au plus, pense-t-il, que la réalité divine est construction de notre langage. Autrement dit que les limites de notre langage délimitent la réalité de Dieu.
Influencé par les penseurs postmodernes, comme Derrida, Cupitt est allé jusqu’à dire que les limites de notre langage délimitent également la réalité de notre monde. Si Dieu est une création humaine suscitée par notre langage, le monde lui-même est forcément aussi produit par notre langage. Rien n’existe donc si nous ne le nommons pas !
Si aucun Être fondamental ni aucune Valeur fondamentale n’existent en soi, c’est donc que, par notre langage, nous sommes (et nous avons toujours été) les créateurs du monde et de ses valeurs. Au fond la conception du Cupitt est parfaitement résumée par le Prologue de Jean : « Au commencement était la Parole, et la Parole était avec Dieu, et la Parole était Dieu » (Jean 1.1).
Récentes orientations de la pensée de Cupitt. (1996-)
Cupitt a continué à explorer ce thème du langage et notamment l’idée que par ses paroles, la « vraie religion » ajoute du sens au monde. Dans les livres de cette époque il s’efforce de démontrer comment notre usage du langage révèle l’évolution que nous avons fait subir aux concepts religieux.
Cupitt explore aussi ce qu’il appelle la « théologie du Royaume » qui est tout simplement ce que la religion a toujours été (une fois débarrassée de ses scories ontologiques et métaphysiques). Cupitt ne se joint pas au concert de lamentations sur le déclin de la religion en Occident mais croit au contraire pouvoir constater sa vitalité dans le renouveau du langage spirituel.
« La religion se fait plus démocratique, plus proche des préoccupations réelles des gens, plus consciente de la mutation du monde. La croyance en une vie après la mort disparaît ce qui implique que la religion est de moins en moins vécue en relation avec un au-delà de rétribution-punition et de plus en plus comme un grand « oui » à la vie ».
Récusant l’existence d‘une réalité objective nommée « Dieu » et d‘une réalité intérieure nommée l’« âme », c’est tout naturellement que Cupitt s’est mis à utiliser le langage et les conceptions du bouddhisme.
Conclusion
On a souvent reproché à Cupitt de lancer des affirmations qu’il ne prenait pas la peine de justifier et il est vrai qu’il ne se préoccupe guère des règles de la théologie officielle. Mais son écriture claire et détendue le rend agréable à lire et toujours intéressant et stimulant.
Traduction Gilles
Castelnau
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"théologie radicale"
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