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Le séminaire de Lausanne

1726-1812

instrument de la restauration

du protestantisme français

 

 

Claude Lasserre

docteur en droit

 

Bibliothèque historique vaudoise

Éditions Olivétan

 


30 octobre 2010

Entre la Révocation de l’Édit de Nantes par Louis XIV en 1685, qui porta un coup extrêmement dur au protestantisme français et la liberté retrouvée sous la Révolution de 1789 et son institutionnalisation par Napoléon, l’église protestante « au Désert » retrouva une organisation remarquable sous l’influence d’Antoine Court. Celui-ci parvint notamment à obtenir qu’une école pastorale soit constituée à Lausanne pour les étudiants en théologie français.

Ce livre important de 369 pages en donne une présentation fouillée, vivante et extrêmement intéressante.

En voici des passages caractéristiques de chacune de ses parties, qui donneront, je l’espère à bien des lecteurs l’idée d’acquérir cet ouvrage.

 

.

 

 

Restauration, rechute puis officialisation des Eglises (1715-1812)

 

Page 14

Premières étapes de la restauration (1715-1726)

Pose de la première pierre (1715). Court nourrit pour l’Eglise réformée de grandes ambitions : coordonner l’action des divers prédicateurs, rétablir les Structures d'autrefois et remettre en vigueur la « Discipline ecclésiastique », c'est-à-dire le code qui, au siècle précédent, réglait le rituel de l'Eglise, son organisation, son administration et sa juridiction. En été 1715, peu après son retour de Marseille, il parvient à réunir sept prédicateurs et deux laïcs du Languedoc et leur propose de partager ses vues. Ils s'assemblent aux Montèzes, près de Monoblet et de Saint-Hippolyte-du-Fort, à la limite des Cévennes et de la plaine. Trois réunions seront nécessaires, aux mois de juillet et d'août, pour parvenir à un accord.

Pour cela, il faudra d'abord que les participants renoncent à la règle de l'unanimité et se constituent en autorité collégiale, prenant ses décisions à la majorité, à l'instar des colloques et des synodes du XVIIe siècle. Cela fait, ils conviendront que les prédicateurs s'efforceront dorénavant d'organiser des « Eglises », c'est-à-dire des paroisses clandestines dotées d'un conseil d'Anciens, se conformant dans la mesure du possible à la Discipline et prenant pour guide le catéchisme de Drelincourt. Ce rétablissement de l'organisation ecclésiale et de la théologie calviniste traditionnelles sera accompagné de nouveaux efforts pour combattre deux déviations d'alors: le fanatisme (faute de pasteurs, de nombreux laïques président de petites assemblées où ils prêchent ; plusieurs d'entre eux se prétendent divinement inspirés ou pourvus du don de prophétie) et l'esprit séditieux (certains de ces prédicateurs spontanés évoquent la guerre des Camisards et invitent leurs auditeurs à préparer de nouveaux mouvements insurrectionnels).

[...]

Etablir des « Eglises ». Il faut souligner l’importance de la décision d’établir des Eglises. Elle va doter l’organisation protestante renaissante de l’instrument essentiel de tout mouvement clandestin : les cellules indépendantes, solidement implantées au sein de chacune des communautés, capables de se relever après chaque tornade, même en l’absence de leur guide spirituel.

 

Page 21

La restauration prend corps (1726-1744)

Premier synode national (1726). Le premier synode national s'assemble, au Désert, le 16 mai 1726. Il donne un nouvel élan à la restauration du protestantisme. Désormais, les Eglises renaissantes se trouvent dotées d'un organe faîtier suffisamment représentatif ; leur code ecclésiastique (la Discipline) est remis en vigueur ; leur confession de foi est officialisée : c'est celle dite de La Rochelle, largement inspirée par Calvin et qui avait fait règle de 1599 à la Révocation. Elles vont même recevoir un sceau, offert par le pasteur Vial de Beaumont, réfugié du Dauphiné à Genève. Cette marque d'authenticité sera désormais apposée sur les actes du synode national. Les Eglises sont en outre représentées à l'étranger par un député général, Benjamin du Plan, grâce auquel le renforcement du corps pastoral est assuré. Il a en effet trouvé, à l'Académie de Lausanne, des théologiens disposés à accueillir les futurs ministres et à compléter leur formation. De plus, il a obtenu des dons pour y assurer leur entretien.

Le mouvement s’amplifie. Ce rétablissement prend rapidement plus d'ampleur : cinq ans plus tard, en 1731, les Eglises renaissantes dépassent largement la centaine (cent vingt au recensement incomplet effectués par les Réformés de 1728 à 1730 à la demande du pasteur Demont, chapelain de l'ambassade de Hollande à Paris ; celui-ci espère obtenir un adoucissement des persécutions lors des négociations de paix qui vont s'ouvrir à Soisson, en montrant que le protestantisme n'est aucunement en voie d'extinction). Les Eglises comptent alors douze ministres.

Recrudescence des persécutions - Antoine Court se met à l'écart. Tandis que les Eglises se renforcent, les persécutions se font particulièrement sévères. L'évêque André de Fleury, qui sera bientôt cardinal, est nommé ministre d'Etat en 1726 et assume en fait le pouvoir à la Cour. Il n'a pas l'intention de se contenter d'une politique d'endiguement et entend revenir à celle d'extirpation. Il entreprend aussitôt de faire appliquer avec rigueur la terrible ordonnance de 1724. Les persécutions s'abattent sous diverses formes : amendes aux parents qui n'envoient pas leurs enfants « aux écoles et catéchismes » ; amendes aussi aux adultes qui ne vont pas à la messe ; amendes encore, emprisonnement et parfois les galères pour ceux qui participent aux assemblées ; amendes collectives à tous les religionnaires d'une circonscription où une assemblée s'est tenue ; enlèvements d'enfants, de filles surtout, pour les faire élever dans un couvent, etc. De façon générale, les Eglises sont « sous la Croix ».

 

 

Page 27

Nouvelle expansion et dernières grandes persécutions (1744-1763)

Grandes persécutions dans le Midi. De 1745 à 1763, cinq ministres et deux proposants monteront sur l'échafaud ; quatre d'entre eux avaient étudié à Lausanne. En outre, deux ministres n'échapperont à la pendaison qu'en abjurant dans leur prison. L'un d'entre eux, Jean Arnaud, avait lui aussi été formé au séminaire de Lausanne. Par ailleurs, on arrête les proches de plusieurs ministres, pour contraindre ceux-ci à « vuider le royaume ». A Nîmes, des protestants sont arrêtés le premier janvier 1756. Ils ne seront relâchés que si le ministre Rabaut quitte la France. Mais celui-ci refuse de céder à ce chantage car cela encouragerait trop les autorités à généraliser le recours à ce redoutable moyen de pression. Il poursuivra donc son ministère et les malheureux prisonniers seront condamnés aux galères.

Vie des Eglises vers la fin du Désert héroïque. Malgré les mesures de répression et les douloureux revers qu'elles entraînent, les Eglises continuent à se développer. En 1763, lors du dernier synode national tenu au Désert, on comptera treize provinces ecclésiastiques, soixante-deux ministres et vingt-quatre proposants qui prêchent dans le royaume. Là où les protestants sont peu inquiétés, les bourgeois et les notables s'enhardissent à participer aux assemblées. Il n'est pas rare qu'elles réunissent en un même lieu plus de 10 000 fidèles. Dans des cas exceptionnels c'est même 20 à 30 000. Dans le Sud-Ouest, les assemblées se tiennent en général dans des « maisons d'oraison », souvent de simples granges aménagées à cet effet ; les autorités laissent faire.

 

 

Page 28

Second Désert et tolérance (1763-1789)

Passage progressif du Désert héroïque au second Désert. Peu à peu, à partir du milieu du siècle, l'opinion publique se modifie à l'égard des protestants. Ils ne paraissent plus ni bien dangereux ni bien coupables. Les encyclopédistes et les philosophes osent de plus en plus s'en prendre à la religion officielle, à l'intolérance et au fanatisme, voire à l'arbitraire du pouvoir autocratique. A les entendre, la persécution pour cause de religion procède de l'obscurantisme.
[...]
Cette politique enlève au Désert son caractère héroïque. Il sera donc appelé plus tard le second Désert.

La même année, Voltaire publie son Traité sur la tolérance. Depuis plusieurs mois, il mène une campagne acharnée pour obtenir la révision du procès de Jean Calas, un négociant roué vif à Toulouse pour avoir prétendument assassiné son fils afin de l'empêcher d'abjurer. Convaincu qu'il s'agit d'une erreur judiciaire voulue par des fanatiques en vue de discréditer les protestants, Voltaire obtient en mai 1763 que le Parlement de Toulouse remette enfin le dossier de l'affaire au Conseil du Roi, chargé de la rejuger. Cette affaire ayant un grand retentissement, les persécuteurs tombent encore plus dans le discrédit. Pour toutes ces raisons, s'il faut dater le début du second Désert, c'est l'année 1763 qui s'impose.

Tolérance tacite. Les édits, ordonnances et déclarations qui mettent le protestantisme hors-la-loi demeurent en vigueur. Ce n'est donc qu'une tolérance tacite, selon l'expression de Malesherbes.
[...]
Il n’y aura plus qu’un seul ministre martyr, François Charmusy, arrêté en chaire près de Meaux deux ans après avoir quitté le séminaire de Lausanne, durement frappé et mort en prison 15 jours plus tard, le 30 avril 1770, sans avoir été jugé.

 

 

 

Le parcours du séminariste

 

Page 51

Etudiants

La vie à laquelle le disciple va se consacrer n'est pas seulement placée sous la menace permanente de l'arrestation, automatiquement suivie de la peine capitale. C'est en outre une vie pénible d'errance, de pauvreté et d'une extrême austérité. Il y faut ce que Court appelait l'esprit du Désert : « J'entends par là un esprit de mortification, de sanctification, de prudence, de circonspection, un esprit de réflexion, d'une grande sagesse, et surtout de martyre qui nous apprenne à mourir tous les jours à nous-mêmes, à vaincre et à surmonter nos passions avec leurs conséquences, nous préparer et nous disposer à perdre courageusement la vie dans les tourments et sur un gibet si la Providence nous y appelle ». Avoir du caractère et une solide vocation était indispensable mais ne suffisait pas. Il fallait encore avoir « du talent et des dispositions pour l'étude ».

 

 

Page 74

Entrée au séminaire

Montant de la pension. A son niveau de dix-huit livres, la pension des séminaristes « peut à peine leur fournir les choses nécessaires à la vie, à cause de la cherté des vivres, mais elle ne saurait le mettre en état de se procurer ni habit, ni linge, ni souliers, ni bas ». Néanmoins, il faudra attendre jusqu'en 1749 pour que le comité de Genève, sur les instances de celui de Lausanne, accepte de faire un geste. [...]
La parcimonie des dirigeants n'est pas due seulement à la tradition d'austérité et d'économie héritée de Calvin. Elle provient aussi de la crainte que les proposants venus, à Lausanne y trouvent la vie si agréable qu'ils soient tentés d'y rester. Inquiétude que partage, au Désert, le ministre Barthélemy Claris : « Je crains beaucoup qu'un long séjour dans le pays étranger n'affaiblisse le courage de ceux qui se proposent d'exercer leur ministère sous la Croix ».
De son côté, le ministre Jean Roux remarque à propos de plusieurs élèves de Lausanne « qu'à force de rester dans un pays de liberté, leur dévotion, leur zèle, leur affection pour nos chères Eglises se sont beaucoup diminués chez eux. La prospérité, le repos et la tranquillité perdent bien des gens ». Il vaut donc mieux « les accoutumer... à une vie dure, laborieuse et frugale » qui les prépare à l'état fort modeste qui les attend au Désert. C'est pourquoi on ne saurait trop « recommander aux étudiants la vie simple et retirée, le travail et la modestie, afin que nos frères ne prétextent plus la contagion de la mondanité, pour les sujets qu'ils envoient ».
C'était peut-être aussi un moyen d'inciter les provinces à prendre à leur charge une partie des frais qu'entraîne la formation à l'étranger de leurs futurs pasteurs. Il faut « qu'elles pensent à fournir ce qu'il faut à ceux qu'elles envoient pour ce qui regarde l'entretien en habits, linge, bas, souliers, chapeaux, à laquelle on ne saurait fournir ici [à Lausanne]. Il y a de ces jeunes Messieurs qui sont en grand besoin à ce sujet »

 

 

Les études

 

Page 119

Former au moins des évangélistes

Des incidents font apparaître l'importance que les séminaristes attachent à la qualité de leurs études et leur désir de profiter au maximum de leur séjour à Lausanne. Ils ont permis en outre au fils d'Antoine Court - pour sa défense - d'éclairer les deux comités la difficulté qu'il y a à donner un enseignement de niveau académique à des élèves qui n'ont suivi que peu ou même point d'école primaire ni secondaire : « On ne saurait croire à quel point ils se révoltent, du moins le plus grand nombre, contre tout ce qui leur paraît nouveau, avec quelle suffisance ils proposent leurs opinions et combien peu ils supportent tout ce qui ne pense pas comme eux... A chaque pas on est arrêté par de nouvelles difficultés : tantôt il faut leur prouver qu'il existe des idées abstraites, universelles, composées, confuses, et il y en a qui ne peuvent pas s'en convaincre. Tantôt ce qu'est une sensation, une idée, que nos sens nous trompent, que nos idées ne sont pas innées ; et on ne peut pas le leur faire concevoir : il semble qu'ils l'ont saisi, à la première occasion les mêmes difficultés reviennent avec la même force. »

 

Page 127

Enseignement de la théologie

L’orthodoxie calviniste remplacée par l’ « orthodoxie raisonnée ». Cette théologie établit un pont entre la foi chrétienne et l'idéal rationaliste qui se répand au siècle des Lumières. A ce titre, elle conforte les intellectuels protestants : on peut être à la fois « éclairé » et chrétien. Elle fait cependant courir un grand risque : elle confère beaucoup de place à la morale, au comportement chrétien et réduit par là même l’importance du péché originel, de la rédemption et de la justification par la foi. Elle a peut-être été influencée par Fauste Socin (1539-1604) et s'inscrit dans la ligne tracée par Jacques Hermensen (Arminius) (1560-1609) puis par Moyse Amyraut (1596-1664) et la célèbre école de Saumur, école dans laquelle Polier avait étudié. Cette doctrine, dite du rationalisme supranaturaliste, risque de dévier progressivement vers les conceptions purement rationalistes du siècle. C'est pourquoi certains théologiens y voient l'amorce d’une décadence anthropocentriste, déviation qui met trop l'accent sur l'homme et sa raison, trop peu sur Dieu, les miracles et les mystères de la grâce. Pour eux, l'orientation ainsi prise devait fatalement déboucher sur l'affaiblissement du protestantisme qui se manifestera à l'époque de la Révolution. Pour d'autres théologiens, c'était au contraire « une œuvre de piété et de libéralisme chrétien dont le protestantisme tout entier devait recueillir l'inappréciable bienfait ». L'enseignement donné à Lausanne a donc été taxé de socinianisme et d'arianisme, qui tous deux nient la nature divine du Christ.

 

 

Page 150

Epreuves finales

Lorsque le proposant paraît apte à retourner en France exercer le saint ministère, le comité de Lausanne l'autorise à se présenter aux épreuves qui conduisent à la consécration. Ces épreuves comportent plusieurs étapes, selon le modèle de l'Académie, mais le nombre des branches et les exigences sont moins élevés puisque les études ont porté sur un programme beaucoup plus restreint. Bien entendu, tout se passe en français, alors qu'à l'Académie les épreuves se font en latin. Au séminaire, les épreuves se déroulent comme suit :

1. « Proposition de huit jours » : un dimanche, le candidat « prend texte ». On lui remet alors un texte sur lequel il préparera chez lui un sermon qu'il remettra par écrit au comité le dimanche suivant et qu'il prononcera alors devant lui

2. Examen oral de théologie (de l'ordre d'une heure) et de morale (environ une demi-heure).

3. « Tâche enfermée » ou « analyse enfermée » : rédaction en salle fermée d'une analyse de théologie et d'une autre de controverse, que le candidat lira ensuite devant le comité.

4. « Seconde analyse enfermée » sur un sujet de morale.

Parmi les nombreux sujets de controverse, il faut citer à titre d'exemple l'infaillibilité de l'Eglise, le célibat des prêtres, la confession auriculaire [au confessionnal], la sainte cène, le culte des images, les sacrements, les dogmes ajoutés à la doctrine évangélique.

Ce sont les membres ecclésiastiques du comité de Lausanne qui font passer ces épreuves, conférant à ce cycle d'examens toute sa solennité. Normalement, le candidat qui se présente ne risque pas d'échouer. Les dirigeants du séminaire l'ont jugé digne de devenir ministre, estimant qu'il a à la fois le caractère, le talent et les connaissances requis. Ils l'ont par conséquent autorisé à passer les épreuves. Ils ne changeront pas d'avis lorsqu'ils fonctionneront ensuite comme examinateurs. Tout au plus exigeront-ils, dans quelques cas particulièrement décevants, que le nouveau ministre reste encore quelques mois à Lausanne pour compléter son instruction.

 

 

Fin du séminaire

 

Page 230

Loi du 18 germinal an X (1802)

Tant que ceux qui désirent devenir pasteurs ne peuvent pas faire leurs études dans le royaume, le séminaire de Lausanne garde toute sa raison d'être. Or, lorsque la Révolution établit la liberté des cultes, elle permet implicitement aux Eglises réformées de procéder en France à la formation de leurs guides spirituels, donc de mettre sur pied une Faculté de théologie. Dès qu'elle sera organisée, l'envoi de proposants à Lausanne pourra cesser. Aussi, au début de 1789 déjà, quatre mois avant que les Etats généraux ne décrètent la liberté des cultes, le pasteur Silva Blachon fait-il accepter par le synode de Saintonge, Angoumois et Bordelais « que soit étudiée la création d'une Faculté de théologie protestante dans le royaume ». Cette initiative demeurera cependant sans lendemain. D'ailleurs, quatre ans plus tard, la Terreur met fin à la liberté des cultes et rend par conséquent au séminaire toute sa raison d'être.

Quelques années s'écoulent encore, puis la liberté retrouvée permet de reprendre le projet de formation des pasteurs en France même. Mais c'est l'Etat qui désormais en fixe les modalités et qui règle l'organisation ecclésiastique. Cependant, Bonaparte, alors premier consul, redoute l'entente qui pourrait s'établir entre les Eglises issues de la Réforme et les puissances étrangères, allemandes ou anglaise. Il fait donc adopter des « articles organiques » qui font l'objet de la loi du 18 germinal an X (15 mai 1802).
Cette législation précise d'emblée (articles I et II) que « nul ne pourra exercer les fonctions du culte s'il n'est Français » et que « les Eglises protestantes ni leurs ministres ne pourront avoir de relations avec aucune puissance ni autorité étrangères ». En outre, elle impose un cadre rigide à l'organisation ecclésiastique. En ce qui concerne les Eglises réformées elle prévoit notamment :

Art. X « Il y a un séminaire à Genève, pour l'instruction des ministres » ;

Art. XI « Les professeurs de toutes les académies ou séminaires seront nommés le premier consul » ;

Art. XIII « On ne pourra être élu ministre ou pasteur... sans avoir étudié dans le séminaire de Genève » ;

Art. XIV « Les règlements... des séminaires seront approuvés par le gouvernement. »

Le privilège ainsi accordé à Genève n'aurait pas été possible si la petite république était restée indépendante. En 1798, l'irruption des troupes françaises dans la ville a permis d'imposer son rattachement à la nation voisine. Depuis lors, c'est la seule ville de France qui abrite une académie dans laquelle les futurs ministres qui serviront ensuite les Eglises réformées peuvent faire leurs études et recevoir la consécration. Il est donc parfaitement normal de lui attribuer le siège du séminaire appelé à instruire les pasteurs ê français de cette Eglise.

 

 

Page 236

Faculté de théologie de Montauban

A Paris, en 1808, les tergiversations des pasteurs de Genève et leur désir évident de ne pas avoir à former les pasteurs de toutes les Eglises réformées de l'Empire ont fini par convaincre qu'une autre solution doit être trouvée. Le grand projet d'une Université impériale englobant tous les établissements académiques de la France permet d'entrevoir un cadre institutionnel dans lequel une nouvelle Faculté de théologie pourrait s'intégrer. Celle-ci serait créée dans l'une des régions où la population réformée est la plus nombreuse : le Languedoc. Elle devrait normalement s'installer à Nîmes. En juillet 1808, l'Empereur est de passage à Montauban. Il s'y entretient longuement avec le consistoire. Celui-ci plaide vigoureusement pour que la Faculté de théologie à créer soit établie dans la ville plutôt qu'à Nîmes. De retour à Paris, Napoléon répond à ce vœu : par décret du 17 septembre, il y aura en France deux Facultés de théologie pour les Eglises réformées, l'une à Genève et l'autre à Montauban.

 

 

Page 247

Plaque commémorative

A Lausanne, 1 place de la Cathédrale, une plaque commémorative porte l'inscription suivante :

En souvenir du
séminaire français de Lausanne
1729-1812

___

fondé par le zèle de
Antoine Court
et
de Benjamin Duplan

Cette école a donné aux
Eglises réformées de France persécutées
environ 400 pasteurs
dont beaucoup sont morts pour leur foi

Sous cette inscription une croix huguenote est gravée dans le marbre

 

Voir : André Gounelle, la Faculté de théologie protestante de Montauban

 

 

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