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Visite du
Paris
protestant
au temps de
la
Réforme
1ère partie
Cette
visite doit beaucoup
à l'érudition
des pasteurs Paul Lienhardt et Philippe Vassaux
Place
du
Panthéon
Le Panthéon n'était pas
encore construit. A son emplacement, se trouvait
une maison qui
était un lieu de culte protestant très
important.
A l'emplacement de la bibliothèque
Sainte-Geneviève s'élevait le collège Montaigu
où Jean Calvin étudia dès 1523, à
l'âge de 14 ans, lors de son arrivée de
Noyon. Il
est à noter qu'après lui, il y eut Ignace de
Loyola, le
fondateur de la Compagnie de Jésus, qui y reçut la
même formation scolastique. L'éducation y était
dure et l'on recevait plus de coups de fouet que
de bonne
nourriture.
Près de
l'église Saint Médard, le premier temple de
Paris fut construit, en 1561. Voici
sa brève et malheureuse histoire.
A proximité immédiate de l’église Saint-Médard,
entre les rues Daubenton, Mouffetard et de
l’Épée-de-Bois, se trouvait la grande Maison du Patriarche.
En 1561, les protestants y installèrent l’un des
deux temples qu’ils venaient d’être autorisés à
ouvrir dans les faubourgs de Paris, le second
étant à Popincourt.
L'après-midi du samedi 27 décembre de cette
année 1561, jour de la fête de Saint-Jean
l'Évangéliste, 2000 protestants. qui s'y
étaient réunis pour écouter le prêche de leur
pasteur Jean Malo, ancien prêtre de l'église
Saint-André-des-Arts, ne purent parvenir à
l'entendre, le curé et le sacristain de
Saint-Médard ne cessant de faire carillonner les
cloches de l'église pour inviter les fidèles aux
vêpres. Malo envoya des huguenots prier le curé
de vouloir bien cesser ce bruit, mais ses
messagers furent très mal accueillis, injuriés
et frappés par de fidèles paroissiens ;
l'un d'eux, même, aurait été tué. Furieux, les
calvinistes pénétrèrent, armes en mains, dans
l'église ; ils tuèrent et blessèrent
quelques catholiques, brisèrent les saintes
images, les verrières, profanèrent les autels,
foulèrent les hosties et pillèrent la sacristie.
Cette mise à sac resta connue sous le nom du « vacarme de
Saint-Médard ».
La réaction des catholiques fut sévère ; le
lendemain, ils envahirent la Maison du Patriarche et
mirent le feu au temple ; le connétable Anne de Montmorency
fit raser une partie des logis, pendre devant le
portail de l’église quelques huguenots dont les
biens, de plus, furent confisqués pour réparer
les dommages causés à l’église ; enfin, une
grande procession où participèrent quatre
cardinaux et huit évêques eut lieu en réparation
le 14 juin 1562. (Dictionnaire
historique des rues de Paris par Jacques
Hillairet).
La
rue Valette descend
vers
la Seine. Elle se nommait alors rue
des Sept-Voies et était plus
étroite qu'aujourd'hui. Les maisons du côté
impair sont pour la plupart anciennes.
Au numéro 21, se trouvait le collège Fortet. Des
cultes clandestins se tenaient au sous-sol.
Calvin y enseigna. C'est de ce collège qu'il
s'enfuit, compromis dans le scandale qui suivit le
discours de rentrée de l'Université à la Toussaint
de 1533, prononcé par son ami le jeune recteur
Nicolas Cop, faisant l'apologie des idées
nouvelles.

Calvin demeurait tout en
haut
Il demeurait 17 rue Valette, en haut de la tour
que l'on voit encore dans la cour et d'où il put
s'échapper en passant par les toits pour fuir la
police.
La rue des Carmes
prolonge la rue Valette. Elle était au centre du
quartier des libraires-imprimeurs humanistes.
Ceux-ci publiaient de nombreux pamphlets qui
répandaient les idées de la Réforme. A tel point
que François Ier prit même
en 1538 une ordonnance (abrogée trois
semaines plus tard) interdisant solennellement et
définitivement toute publication imprimée sur le
territoire du royaume !
17 rue Jean de Beauvais,
dans une maison qui n'existe plus aujourd'hui, se
trouvait l'imprimerie de Robert
Estienne qui imprima le Nouveau
Testament en français de Lefèvre d'Étaples. Il se
réfugia à Genève pour sauver sa vie.
Place
Maubert. Elle était alors
plus petite qu'aujourd'hui. C'était un lieu
d'exécution. Les noms de plus de
40 protestants qui y furent suppliciés sont
répertoriés. Il y en eut bien d'autres qui sont
demeurés anonymes. Mentionnons Philippe de Luns, dame de
Graveron, jeune veuve de 23 ans,
arrêtée lors du fameux culte de la rue
Saint-Jacques, qui revêtit sa robe de mariée pour
monter à l'échafaud et fut pendue après avoir été
brûlée aux pieds et au visage. Et Étienne Dolet, imprimeur
des œuvres de l'humaniste Melanchthon, qui y fut
brûlé vif avec ses livres le 3 août 1546
à l'âge de 37 ans.
Ces atrocités finirent même par émouvoir le pape Paul III :

Le Titien,
« Paul III »
représenté en 1543, Paul III a 75 ans
« Adverty de l'exécrable
et horrible justice que le roy François Ier
faisait en son royaume sur les luthériens,
Paul III luy manda qu'il pensoit bien qu'il
le fist en bonne part, néanmoins que Dieu, le
créateur, a usé de plus de miséricorde que de
rigoureuse justice et que c'était une cruelle
mort de faire brusler vif un homme ; donc,
le requéroit de vouloir apaiser sa fureur et
rigueur de justice en leur faisant grâce et
pardon ».
Le 21 janvier 1535, pour expier le
scandale des placards François 1er, à
l'occasion d'une entrée solennelle à Paris, fit
brûler vifs trois suspects, aux Halles et trois autres à
la Croix du Trahoir
qui est à l'angle des rues Saint-Honoré et de
l'Arbre Sec. Puis l'habitude se prit de mettre à
mort les protestants en place
de Grève, aujourd'hui place de l'Hôtel de
Ville.
Des protestants furent suppliciés en de
nombreux autres endroits de Paris, notamment sur
le parvis de Notre-Dame, rue
de l'Arbre-Sec. C'est
au marché aux Pourceaux qui
se trouvait à l'angle des rue Molière et
Sainte-Anne, que fut exécuté le 8 août 1523 le
premier martyr français, Jean
Vallière.
Boulevard
Saint-Germain (vers la rue
Saint-Jacques et l'abbaye Saint-Germain des Prés)
Carrefour avec la rue Saint-Jacques. On
regarde vers le haut : On voit la coupole de
la Sorbonne, lieu de l'anti-Réforme par
excellence. C'était la faculté de théologie
catholique et le tribunal des idées théologiques.
En 1557, à l'emplacement des actuels
N° 52 et 54 de la rue Saint-Jacques, un
culte réunissant 300 à 400 protestants
fut surpris par la police royale. Les
gentilshommes tirèrent l'épée et se frayèrent un
chemin en protégeant de leur mieux les femmes et
les enfants. Il y eut néanmoins
120 arrestations et 7 condamnations à
mort. Parmi elles, Philippe
de Luns.
Pourtant le roi Henri II qui méprisait la « canaille
luthérienne » avait choisi comme son
médecin personnel le protestant Ambroise Paré
- qui le soigna en vain lorsqu'il fut
mortellement blessé au tournoi des Tournelles,
près de la place des Vosges. Montgomery, son
partenaire meurtrier involontaire, était également
protestant.
Abbaye
Saint-Germain des Prés.
Son territoire comportait le quadrilatère marqué
par les rues Saint-Benoît, Jacob, de l'Échaudé et
occupait au sud toute la largeur du boulevard
Saint-Germain.
Le théologien humaniste Jacques
Lefèvre d'Étaples y propageait les idées
nouvelles. Le réformateur de Genève, Guillaume Farel fut
notamment son élève.

Bernard Palissy
Dans le square qui longe le boulevard
Saint-Germain se trouve une statue du protestant Bernard Palissy.
Les protestants étaient nombreux dans ce quartier
de l'abbaye.
Au 54 rue des Saints-Pères se trouve
actuellement la Société d'Histoire du
Protestantisme Français dont l'importante
bibliothèque est, avec ses
120 000 volumes et ses
20 000 manuscrits, la plus importante
bibliothèque privée de France.
Près de là était au 17e
siècle le cimetière des protestants. (Il y avait à
Paris d'autres cimetières protestants, dont le
plus ancien se trouvait près du métro
Réaumur-Sébastopol).
A l'angle du boulevard Saint-Germain et de
la rue des Saints-Pères se trouvait l'ambassade
des Pays-Bas où le culte protestant était célébré
le dimanche en français et rassemblait des
centaines de Parisiens. (Mon ancêtre Jean Georges
Guiguer de Prangins y fut marié en 1735).
Près de là se trouvaient aussi les ambassades
amies de Brandebourg, d'Angleterre, du Danemark
etc.
Le pilori de l’abbaye était
situé au débouché de la rue de Buci.
Le 11 novembre 1557, sous le règne
d'Henri II, deux protestants, Nicolas Le Cène, médecin
à Lisieux, et Pierre
Gavart, solliciteur de procès dans le
Poitou, arrivèrent à Paris, descendirent dans le
même hôtel et assistèrent, le soir de leur
arrivée, à une « réunion de huguenots ».
Celle-ci ayant été dénoncée, la police
survint ; tout le monde put s'enfuir, sauf
les deux provinciaux peu au courant du dédale des
rues de Paris.
Ils furent condamnés à être brûlés vifs après
avoir eu la langue coupée s'ils ne se rétractaient
pas, ou après avoir été étranglés s'ils se
rétractaient. Ils n'abjurèrent pas et tendirent
eux-mêmes leur langue au bourreau. Après qu'on la
leur eut arrachée, on les suspendit aux extrémités
d'une barre de fer traversant le pilori et on
plaça les fagots de telle sorte que le haut du
corps de ces malheureux n'était pas encore atteint
par les flammes alors que les parties inférieures
étaient déjà consumées.
Le pilori Saint-Germain fut supprimé sous
Louis XIII, en 1636. (Dictionnaire historique des
rues de Paris, Jacques Hillairet)
Rue
Visconti. Elle s'appelait
autrefois rue des Marais, en rapport avec les
maraîchers nombreux à cet endroit. On la nommait
aussi petite Genève tant la présence protestante y
était importante.

rue Visconti
Un des avantages de la
rue qui a pu attirer les
protestants est la double juridiction dont elle
bénéficiait. En effet, la parcelle du petit
Pré-aux-Clercs appartenait à l'Université et
s'étendait sur la moitié ouest du terrain allant
de la rue Jacob à la Seine et de la rue de Seine à
la rue Bonaparte. A l'est, 7 maisons
relevaient de l'Abbaye. Les protestants firent
communiquer leurs demeures par des ouvertures
secrètes, de telle sorte qu'il était possible de
passer d'une juridiction à l'autre sans être
aperçu de la rue.
La double juridiction de
la rue n'était pas le seul attrait
du quartier. A l'époque, les constructions
n'étaient pas nombreuses, et celles qui y étaient
bâties, maisons de campagne ou tuileries
rustiques, n'empêchaient pas « la vue de s'y reposer
sur la verdure des champs et des pâturages qui
s'étendaient au loin le long de la
rivière ». On n'y entendait pas ce
murmure fatigant de la foule affairée, se pressant
dans les rues étroites de l'intérieur de Paris, et
l'attention n'y était pas distraite par les cris
de toute sorte dont retentissaient les quartiers
industrieux.
Les maisons sont toutes des 17e et 18e siècles, sauf
les N° 5, 7 et 9 qui sont encore du
16e siècle.
C'est dans cette rue
qu'eut lieu le premier baptême protestant :
En 1555, la famille de la Ferrière souhaitait
faire baptiser un enfant. La communauté
protestante qui se réunissait dans sa maison nomma
alors pasteur un jeune homme de 22 ans,
étudiant en droit, nommé Le
Maçon, dit La Rivière.
Il fut le premier pasteur de Paris. Les caves
communicantes dans cette rue les unes avec les
autres facilitaient la fuite en cas de descente de
police. D'ailleurs après la révocation de l'Édit
de Nantes des assemblées clandestines se sont
encore tenues dans cette rue.

cave du N° 6 rue
Visconti
Le premier synode national
(25 - 29 mai 1559), dont on a
dit qu'il s'était tenu « à
la lueur des bûchers », eut lieu
dans cette rue, probablement au N° 4, dans
une auberge appartenant à un certain Levicomte. Ce synode
qui réunissait des délégués de72 églises,
provenant de la plupart des provinces de France
représenta la fondation de l'Église réformée de
France. Il adopta officiellement la confession de
foi dite de La Rochelle.
La même année 1559 dans cette
maison, une assemblée fut surprise. La
femme de Le Vicomte
et son père furent arrêtés, mais la plupart des
fidèles purent fuir par une autre issue, pendant
que quatre d'entre eux ferraillaient dans la rue
étroite pour contenir les cinquante gens d'armes.
Bernard Palissy
habita cette rue où il fut arrêté à cause de sa
religion protestante et envoyé à la Bastille
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