Dialogue interreligieux
Conférence
interreligieuse
de Birmingham
John
Hick
professeur
à l'université de Birmingham (Angleterre)
19 janvier 2004
Une conférence interreligieuse
s'est tenue à
l'université de Birmingham en septembre 2003. Les
participants étaient chrétiens, juifs, musulmans,
hindous, bouddhistes et sikhs. Ils ont tous approuvé la
conception « pluraliste » selon laquelle aucune religion n'a le monopole du
salut et de la vérité. Comme l'a dit Rumi, le penseur
soufi du 13e siècle :
Les lampes sont
différentes mais la Lumière est la même, et elle
vient de l'au-delà.
Je participais à la
conférence en compagnie des
professeurs Perry Schmidt-Leukel de l'université de Glasgow,
Paul Knitter de l'université Xavier de Cincinnatti, Leonard
Swidler de l'université Temple de Philadelphia
.
La conférence nous a donné
une conscience aiguë de ce que
presque tous les conflits que nous connaissons ont été
justifiés par des arguments religieux qui les ont
aggravés.
Dans toutes les guerres, les deux camps se sont recommandés de Dieu
et cela ne fut rendu possible que par la revendication des grandes
religions d'être chacune la meilleure et la seule vraie. Cette
prétention à la vérité absolue a toujours
exacerbé la rivalité des nations en guerre et a
systématiquement justifié les oppressions, les
esclavages, les conquêtes et les exploitations.
La seconde moitié du
20e siècle a
connu une considérable immigration de populations de l'orient
vers l'occident. Ce mouvement de population a provoqué un
fondamentalisme agressif de part et d'autre, mais il a aussi permis
la naissance d'un important dialogue interreligieux, la
découverte mutuelle, ainsi que le respect et l'amitié
des responsables des grandes religions. Néanmoins en
général ceux-ci en sont restés, comme leurs
fidèles, à l'idée de la vérité
unique de leur propre tradition religieuse.
Notre conférence souhaite proposer
à tous quelques
éléments permettant peut-être d'approfondir ce
dialogue.
.
Nous remarquons que les grandes religions
partagent la même foi
fondamentale en une Réalité
supérieure, d'une importance
absolue, qui transcende l'univers et que l'on rencontre aussi dans
les profondeurs de l'être.
Elles enseignent toutes que la vie humaine est plus qu'elle ne
paraît et appartient au grand fleuve d'une vie infinie.
Elles partagent les mêmes valeurs humaines d'amour, de
compassion et de justice.
Nous constatons que les grands
penseurs de chaque religion
manifestent un sens aigu du mystère de la vie et reconnaissent
que la Réalité
fondamentale, objet de la foi, se
situe toujours au-delà de la compréhension absolue de
nos esprits humains. Nous ne sommes pas capables de décrire
cette Réalité telle qu'elle est en elle-même mais seulement
telle qu'elle est apparue dans certaines expériences
privilégiés et dont on ne peut rendre compte que dans
le langage et les expressions de la culture humaine du moment.
Nous croyons que les religions
représentent donc
différentes manières de répondre à la
présence de cette unique et universelle Réalité ineffable. Chacune en rend compte par ses
événements fondateurs, ses personnages et ses
écrits saints, ses récits, ses pratiques rituelles, ses
formulations doctrinales et ses institutions
particulières.
.
Bien que certaines personnes
se soient toujours converties d'une
religion à l'autre, néanmoins la plupart des croyants
sont nés dans une religion et ont été
formés par elle de sorte qu'elle leur suffit et leur
paraît juste et bonne. Il nous convient certainement de
demeurer fidèlement et heureusement dans la religion
dont nous avons hérité et nous devons admettre qu'il en
soit de même pour les centaines de millions de croyants qui
sont nés dans une autre religion et ont été
formés par elle.
Il faut bien
reconnaître que les autres
religions sont aussi authentiques et valides que la nôtre et
nous réjouir de l'enrichissement mutuel que l'on peut trouver
dans des contacts et des débats fraternels avec leurs
fidèles en nous efforçant de renoncer à tout
sentiment de supériorité.
D'ailleurs la prétention de certains à posséder
le monopole de la vérité a plutôt tendance
à rebuter nos contemporains qu'à les attirer.
Il n'y aura jamais de paix entre les
nations s'il n'y a pas d'abord de
paix entre les religions. Et il n'y aura jamais de paix entre les
religions si elles ne font pas l'effort de se reconnaître
mutuellement comme des voies spirituelles différentes mais
également valides.
C'est sur ce chemin que nous sommes appelés à marcher dans
le temps qui s'ouvre devant nous.
.
Charte du
pluralisme
adoptée par la
Conférence de Birmingham
1. Le dialogue interreligieux doit s'engager sur les graves problèmes du
monde que sont la guerre, la violence, la pauvreté, la
protection de la nature, les injustices et les violations des droits
de l'homme.
2. La prétention à posséder la
vérité devient
rapidement incitation à la haine et à la violence.
3. Les différentes religions enseignent chacune à sa manière la
Réalité ultime et la vérité.
4. La Réalité ultime et la
vérité ne peuvent
être saisies par l'esprit humain ; elles sont exprimées
de diverses manières par les différentes
religions.
5. Les enseignements des grandes
religions et leurs pratiques
constituent d'authentiques voies conduisant chacune au souverain
bien.
6. Les différentes religions partagent de nombreuses valeurs essentielles,
l'amour, la compassion, l'égalité,
l'honnêteté ainsi que l'idéal de traiter les
autres comme l'on désire être soi-même
traité.
7. Chacun a la liberté de conscience et garde le droit de choisir sa
religion.
8. Le témoignage sincère produit le respect mutuel mais le
prosélytisme dévalue la foi de l'autre.
Traduction Gilles
Castelnau
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