Le religieux dans la presse

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Le pape Léon XIV

 Il est trop tôt pour juger d’un pontificat qui commence seulement. On peut tout de même déjà retenir, à petits traits, quelques particularités de ce nouveau pape, Léon XIV qui se présente comme ouvert au monde, qui parle de nécessité du dialogue, de rencontre, de « beauté et de joie de connaître Jésus »ou encore de « synodalité », un mot barbare pour dire son souhait d’ouverture de son Église catholique. On verra dans les mois qui viennent si son projet d’une « Église plus ouverte dans sa gouvernance et moins cléricale », plus « apaisée » comme le souligne l’envoyée du quotidien Le Monde et sans fâcher les conservateurs… ou ceux du style du vice-président américain J.D. Vance,catholique converti, figure de proue d’un courant, traditionaliste et nationaliste au sein de l’Église catholique, un courant radicalement opposé à l’Église que veut incarner Léon XIV. Des chantiers, le nouveau pape n’en manque pas ! La place des femmes, la démocratie par moins d’autoritarisme et plus de collégialité dans l’Église, les questions de société (accueil des migrants, LGBT) et de justice sociale ou encore une réflexion théologique sérieuse et la rencontre fraternelle avec d’autres Églises à cultiver impérativement…

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J’ai aimé cette réflexion de Rudy, un homme politique belge, « agnostique, laïque, attaché à la séparation des sphères » comme il se présente, qui tente d’expliquer pourquoi l’élection de ce pape venu de Chicago mais aussi du Pérou où il a exercé son ministère durant 20 ans auprès de communautés rurales, Léon XIV de son nom de pape, a de l’importance. Premier pape né sous la bannière étoilée, ce pape entre en fonction « alors que les croisés de la droite identitaire [chef de file JD Vance le vice-président] brandissent à nouveau la foi comme une arme de guerre culturelle. Et devinez où cette croisade a pris racine ? À Washington, dans les salons des ultra-conservateurs catholiques qui rêvent d’un retour à l’ordre moral… à l’américaine. Je découvre que Robert Francis Prevost, futur pape, a vécu au Pérou pendant près de vingt ans. Il a accompagné des communautés rurales, dirigé un séminaire, parlé la langue des plus démunis. Son parcours est celui d’un homme de terrain, d’un homme d’Église attentif aux marges. Ce n’est pas une biographie de bureaucrate vaticanesque. C’est une trajectoire qui fait écho, chez moi, à ce que j’attends – même de loin – d’un pasteur : proximité, compassion, service […] En tant que progressiste, je ne peux qu’être touché par ce profil. Il mérite le bénéfice du doute. Et même davantage : une espérance vigilante. Il maintient une forme de neutralité, voire de retenue et une volonté de maintenir le dialogue ouvert. En ces temps de radicalité galopante, c’est déjà un acte politique en soi. 
[…]

Car en parallèle, une autre dynamique est à l’œuvre. Discrète, méthodique, résolue. La dernière visite de J.D. Vance à Rome, la veille de la mort du pape François, n’était pas un simple hommage de circonstance. Elle s’inscrit dans une entreprise idéologique de plus grande ampleur, menée depuis plusieurs années par les franges les plus conservatrices du catholicisme nord-américain […] Ce courant ne s’embarrasse pas de nuances : il fustige « l’Église woke », dénonce la fraternité universelle comme naïveté, et rêve d’une Église redevenue bastion de l’Occident, verrouillée sur ses dogmes, alignée sur un ordre moral viriliste. Il ne s’agit plus d’évangélisation, mais de reconquête culturelle. Et dans cette optique, un pape né aux États-Unis – même modéré, même social – peut devenir, malgré lui, un instrument symbolique. Un drapeau planté sur la colline du monde. À Léon XIV de rappeler, avec fermeté et clarté, que l’Église universelle n’est pas un satellite de Washington. On s’en doutait : le Vatican a beau être un État souverain, lorsqu’un Américain y est élu pape, Donald Trump considère que c’est un peu comme acheter une filiale religieuse à l’étranger. Une sorte de prise de participation spirituelle […] Léon XIV n’est pas un cheval de Troie de l’alt-right (*) en soutane. Il n’est pas non plus, pour l’instant, une figure révolutionnaire dans la lignée de Jean XXIII ou de François. Il est un homme d’équilibre, et peut-être est-ce justement ce qu’il fallait à l’Église aujourd’hui : ni fracas, ni recul, mais une main tendue, ferme et calme.  […] Un pape venu du Nord, oui – mais qui, au Sud comme ailleurs, pourrait écrire une page nouvelle. Non pas pour imposer, mais pour rassembler. Non pas pour convertir, mais pour faire entendre, à nouveau, la voix de l’humain. Un homme qui investit d’une influence morale importante, fera tomber les murs. Bâtira des ponts. Alors, peut-être même qu’en ces temps troublés, il sera celui qui rappelle que la force d’une institution spirituelle ne se mesure ni à son autorité ni à son prestige, mais à sa capacité à révéler la valeur cardinale de la bienveillance humaniste. Partout. Dans la liberté, l’égalité, la fraternité universelle. »

(*) Rudy Demotte est un homme politique belge, membre du Parti socialiste. .Il a été président du Parlement de la Communauté française de Belgique de  2019 à 2024 

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                                   Le christianisme russe

 Les Russes sont « les héritiers du véritable christianisme » a rappelé le président russe Vladimir Poutine lors d‘un documentaire à sa gloire diffusé sur la télévision d’État (Rossiya-1) à l’occasion des festivités marquant ses 25 ans de présidence – certains parlent plutôt de dictature. « À Rome, le christianisme a été réformé, mais pas à Byzance… Et nous en sommes venus à croire que nous sommes les héritiers du véritable christianisme. Moscou est la Troisième Rome, et il n’y en aura pas de Quatrième. Nous sommes donc les vrais chrétiens », a déclaré le Président russe. Dans le documentaire, il pointe aussi du doigt « les différences de civilisation entre l’Occident et la Russie », affirmant que la prospérité matérielle est prioritaire dans les cultures catholique et protestante. Même s’il concède que « [catholiques et protestants] ont aussi des valeurs spirituelles, bien sûr, mais pour eux, le succès se mesure toujours en termes matériels. En Russie, ce n’est pas le cas. En Russie, de manière générale, on parle de fondements moraux ». Et Poutine comme son âme damnée le patriarche orthodoxe Kirill de Moscou parlent de manière répétitive d’un « Occident corrompu ». En 2024, remarque l’hebdomadaire anglican Church Times, le patriarche œcuménique Bartholomée de Constantinople [primus inter pares du monde orthodoxe] avait évoqué cette « Troisième Rome » que Poutine revendique, comme, selon lui, la « réponse russe à l’Occident soi-disant corrompu » et comme « le principal instrument de légitimation ‘spirituelle’ de l’invasion de l’Ukraine… » Le patriarche œcuménique orthodoxe Bartholomée ajoutait : « Selon les partisans de Poutine [et de Kirill de Moscou en concurrence frontale avec Constantinople], Moscou serait la ‘Troisième Rome’ après Constantinople. Cependant, il n’y a jamais eu de ‘Première’ et de ‘Seconde Rome’, et par conséquent, il ne peut jamais exister de ‘Troisième Rome’, il n’y a que l’Ancienne Rome et la Nouvelle Rome-Constantinople. » 

 Alors que la Russie célèbre le 80e anniversaire de la Grande Guerre patriotique contre l’Allemagne nazie pendant la Seconde Guerre mondiale, le patriarche Kirill a évoqué le rôle important joué par le président Poutine dans la construction de la Russie moderne, le remerciant d’avoir bâti une relation entre l’Église et l’État « sans précédent dans l’histoire de notre nation ». A la louange du Président russe, le patriarche Kirill n’a pas hésité à déclarer à Poutine : « Grâce à votre volonté inébranlable, votre courage, votre détermination, votre sens des responsabilités et, surtout, votre amour infini pour la Patrie et votre dévouement au devoir, la Russie est restée un État unifié, indépendant et souverain », c’est le site d’information orthodoxe Orthodox Times qui le rapporte.  Et raconte que durant un récent sermon, le prêtre orthodoxe de Moscou, le père Andrei Tkacheva a accusé les partisans de la paix en Ukraine d’être « lâches » et « sous l’emprise de l’esprit de l’Antéchrist ».

Church Times ajoute que ce prêtre orthodoxe est considéré comme l’une des voix orthodoxes « pro-guerre » de Russie, ce prêtre jouissant d’une présence considérable en ligne, avec près de deux millions d’abonnés sur YouTube. Il a été nommé recteur de l’église moscovite de la Trinité-vivante à Khokhly, après que le patriarche Kirill ait destitué de ce poste l’ancien archiprêtre Alexeï Ouminski, qui avait refusé de lire la prière pour la « victoire de la Sainte Russie en Ukraine » lors de la liturgie. De même on peut ajouter ces prêtres orthodoxes russes qui ont dû fuir leur pays après avoir ouvertement pris position contre la guerre en Ukraine ou avoir refusé de prier pour la victoire de la sainte Russie durant la « liturgie divine ».

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