Le religieux dans la presse

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Paula White, télévangéliste et directrice du « bureau de la foi » de l’administration Trump, dans la roseraie de la Maison Blanche à Washington, le 1er mai 2025. ANDREW HARNIK / IMAGES VIA AFP

La télévangéliste et pasteur Paula White, conseillère spirituelle attitrée du président Donald Trump et directrice du « Bureau de la foi » à la Maison Blanche a été envoyée en tournée en Afrique pour « obtenir un traité de paix entre le Rwanda et la RDC [ou République démocratique du Congo] » C’est Le Monde Afrique qui l’annonce dans un article du 7 novembre. Paula White, on la voit depuis des années se tenant aux côtés de Donald Trump, parfois sa main sur son épaule, cheveux blonds oxygénés, en extase. C’est elle qui avait prêché, avant les élections présidentielles, que ceux qui ne voteraient pas pour Donald Trump seraient promis à l’enfer !

Paula White, l’une des télévangélistes américains les plus influentes des États-Unis prône « l’Évangile de la prospérité », une idée selon laquelle la richesse relèverait de la générosité divine, elle-même favorisée par les dons versés au ministère pastoral, le sien en premier ! « Alors que les chrétiens traditionnels ont l’habitude de donner de l’argent pour aider les défavorisés et entretenir leur église, ceux qui suivent l’Évangile de la prospérité donnent pour la maison du pasteur et, dans les cas extrêmes, pour son jet privé », relevait le New York Times.

Mais au-delà de ces affaires d’argent et parfois de mœurs, qui accompagnent inlassablement ces télévangélistes, Paula White est surtout l’incarnation de la frange la plus radicale de cette droite chrétienne déterminée à exercer son contrôle sur l’ensemble de la société, de la politique à la culture, en passant par les affaires et l’éducation. André Gagné, un sociologue, canadien spécialiste des mouvements charismatiques aux États-Unis observait : « Ceux qui s’opposent à cette vision sont caractérisés comme étant sous l’influence de forces démoniaques, ce qui en fait non seulement des adversaires politiques, mais aussi des ennemis de Dieu » qualifiés par Paula White d’ « antéchrist ». Et Donald Trump est devenu par la grâce des télévangélistes américains qui l’entourent, un président choisi par Dieu pour sauver l’Amérique.  Mais pas seulement ! 

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Donald Trump déploie pour la première fois sa diplomatie chrétienne en Afrique en y envoyant sa conseillère spirituelle Paula White. Ainsi, on a vu une photo d’elle le 4 novembre dans une église de la banlieue de Libreville (au Gabon), première étape de sa tournée africaine, où elle déclarait devant quelques centaines de fidèles venus écouter cette invitée de marque que « l’Afrique sera repositionnée comme le centre du christianisme dans le monde »Et Le Monde de remarquer que « si la télévangéliste a précisé, lors de son prêche à Libreville, qu’elle se déplace en Afrique ‘dans un cadre personnel’,  il est permis d’en douter, car son premier déplacement sur le continent depuis sa promotion à Washington, en février, ne doit rien au hasard. Il a été minutieusement préparé en marge de la signature de l’accord de paix entre le Rwanda et la RDC, le 27 juin, dans le bureau Ovale. Paula White se tenait alors aux côtés de Donald Trump, du vice-président J. D. Vance et des chefs de la diplomatie américaine, rwandaise et congolaise. Elle mena même brièvement la prière pour bénir la cérémonie. »

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 Sa tournée africaine a été minutieusement préparée par les équipes de la Maison Blanche depuis des mois et précède la venue à Washington des président rwandais et congolais deux rivaux, qui devraient signer le traité de paix final entre leurs deux pays en guerre dans l’est du pays. Cet agrément constitue en outre une façon pour Washington de supplanter la Chine dans la course aux matériaux critiques dans les Grands Lacs. Le côté religieux de la visite n’a pas été oublié : le pasteur qui a organisait la venue de Paula White à Kinshasa soulignait que « Non seulement elle vient prier pour la paix dans l’est de la RDC, mais elle vient aussi observer la situation et rapporter au président américain. »

En fait on assiste à une opération qui tente d’orienter la politique africaine de l’administration américaine. Le Monde relève aussi que cette tournée diplomatique de la télévangéliste américaine avait pour point d’orgue sa visite en République du Congo : « D’abord parce que dans ce pays de 110 millions d’habitants, les ‘Églises du réveil’ connaissent un essor vertigineux – le nombre de ces Églises pentecôtistes a été multiplié par trois en dix ans. Ces cultes s’inscrivent dans la droite ligne du courant néocharismatique de Paula White. » Mais pas seulement : son séjour à Kinshasa comprend aussi un volet politique : elle aura rencontré le chef de l’État, Félix Tshisekedi, lui aussi un fervent pentecôtiste, qui a le même « père spirituel que Paula White, Nicholas Duncan-Williams, un télévangéliste ghanéen parmi les plus populaires de l’Afrique de l’Ouest qui a participé à l’organisation de la visite de Paula White. » 

Ce pasteur ghanéen – 1,7 million d’abonnés sur le réseau social Facebook – navigue habilement entre réseaux politiques et religieux, en Afrique et aux États-Unis. Deux mois avant sa victoire électorale en janvier 2019, Félix Tshisekedi s’était rendu à Accra pour assister à un service religieux au sein de l’Action Chapel International, l’église de Nicholas Duncan-Williams. Celui-ci avait alors prédit sa victoire et béni sa campagne. Il est depuis devenu son pasteur personnel. 

Est-ce que cette proximité spirituelle peut aider le président de RDC a se faire mieux entendre de la Maison Blanche ? « Un mélange des genres politico-religieux propre à la diplomatie de Donald Trump, souligne Le MondeLa Maison Blanche cherche ainsi à entériner un traité qui n’a pas, à ce jour, mis fin aux violences dans l’est de la RDC. Début octobre, Kinshasa répétait qu’aucun accord économique ne serait signé avec Kigali (le Rwanda) tant que les conditions pour restaurer la paix ne seraient pas d’abord réunies. » On va pouvoir juger sur pièce de cette « diplomatie chrétienne » que Donald Trump tente de mettre en place…

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The Guardian, un quotidien libéral britannique a récemment publié une histoire étonnante : des groupes de missionnaires équipés de drones utiliseraient ces appareils dans des zones protégées de la forêt amazonienne pour attirer et évangéliser des populations autochtones isolées ou récemment contactées. Une enquête conjointe du Guardian et du quotidien brésilien O Globo révèle que des appareils solaires diffusant des messages bibliques en portugais et en espagnol sont apparus parmi les membres du peuple Korubo près de la frontière entre le Brésil et le Pérou. Des agents de l’État brésilien chargés de la protection de ces autochtones isolés et d’empêcher qu’ils soient contactés ont repéré ce qui semble bien être des activités missionnaires illégales. Or, l’article publié par le Guardian est illustré d’une photo représentant un petit garçon portant un enfant et un singe de compagnie. Ce qui fait remarquer à l’hebdomadaire anglican Church Times qui raconte l’histoire, que prendre des photos pour le journal, ce qui nécessite d’avoir gagné la confiance de ces gens, paraît moins pernicieux que d’exposer ces autochtones à des passages bibliques aléatoires, récités par un robot dans des langues qu’ils ont peu de chances de comprendre.

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