Protestants dans la Ville
|
|
Alexandre Séon
La Fille de la mer, vers 1903
Les donations Foucart
aux musées d'Orsay
et des Beaux-Arts deRennes
Articles
parus dans La
Tribune de l’Art
en voici des
passages
Didier Rykner
La donation Foucart
au musée d'Orsay
16 juin
2021
Disparu le 5 janvier
2018, Bruno Foucart n’était pas
seulement l’un des plus importants historiens de
l’art français s’intéressant aux XIXe et XXe
siècles, il était aussi un grand collectionneur.
Un grand nombre d’œuvres lui ayant appartenu
viennent de faire l’objet de plusieurs dons aux
musées français (pour certains, la procédure est
encore en cours) par son frère Jacques, et
l’épouse de ce dernier Elisabeth Foucart-Walter,
qui étaient tous deux conservateurs au département
des peintures du Musée de Louvre.Le premier don a
été effectué au Musée d’Orsay, en hommage à Bruno
Foucart et par l’intermédiaire de la Société des
Amis des Musées d’Orsay et de l’Orangerie dont il
fut administrateur. Il s’agit de sept œuvres :
quatre dessins, un pastel et deux huiles sur
toile.
Alexandre Séon
(1855-1917)
La Fille de la mer (île de
Bréhat), vers 1903
Ce tableau est placé
ci-dessus en exergue.
Une figure de jeune fille priant, de face, qu’il
utilisa au moins à deux reprises, la première
fois dans une huile sur toile non localisée,
intitulée Île de Bréhat-Bretagne, peinte en
1902, et la seconde dans une peinture en tondo,
La Fille de la mer (île de Bréhat) qui avait été
montrée à Quimper en 2015.
Félix
Barrias (1822-1907)
Les Exilés de Tibère,
1850
Félix Barrias, élève de
Léon Cogniet et grand prix de
Rome en 1844. Revenu de son séjour romain en
1849, il obtint un grand succès au Salon, un an
plus tard, avec son envoi de Rome de cinquième
année, un immense tableau, Les Exilés de Tibère
pour lequel il reçut une médaille de première
classe. Il est aujourd’hui conservé à Orsay
après être revenu en 2009 d’un long dépôt à
Bourges. Le sujet est tiré de Suétone, Vie des
Césars, et le livret du Salon en donne l’extrait
qui l’explique : « Tibère, retiré à Caprée, se
livrait à toutes sortes de turpitudes. Il ne se
passait pas un seul jour, sans en excepter les
jours de fêtés, qui ne fût marqué par des
supplices. Il enveloppait dans la même
condamnation les femmes et les enfants des
accusés. On les transportait dans des îles où le
feu et l’eau leur étaient interdits. »

Gustave Guillaumet (1840-1887)
La Famine en
Algérie, 1869
L’œuvre est aujourd’hui
conservée au Musée Cirta, à
Constantine. Elle représente, d’une manière très
réaliste, qui choqua beaucoup au Salon de 1869,
les conséquences désastreuses de la sècheresse
ayant frappé l’Algérie entre 1866 et 1868.
Henri Lévy
(1840-1904)
La Commune,1871
Henri Lévy représente
la Commune, tenant le drapeau
rouge du socialisme, assise sur un édicule
surplombant un monceau de cadavres parmi
lesquels on voit un crucifix et un drapeau
français. Il s’agit donc clairement d’une œuvre
anti-communarde, insistant sur les victimes de
ce mouvement révolutionnaire. Si la répression
des Versaillais fut féroce et sanglante, donnant
lieu à de nombreux massacres, des exactions
eurent également lieu du côté des insurgés, sans
compter les nombreux incendies et destructions
qu’ils causèrent aux monuments parisiens. On ne
sait exactement où se trouvait l’artiste pendant
la Commune ni à quelle occasion ou dans quel but
exact il réalisa cette peinture qu’il garda avec
lui toute sa vie et qui fut vendue après son
décès avec son fonds d’atelier. L’œuvre relève
clairement d’un romantisme tardif et d’une
influence delacrucienne que l’on rencontre
souvent chez cet artiste. Il s’agit ici d’une
sorte de réécriture de La Liberté guidant le
peuple où la Révolution de 1830, symbolisée par
la femme tenant le drapeau français, est
remplacée par la Commune foulant aux pieds ce
même étendard, dans une espèce de renversement
de l’Histoire. Rappelons que ce nouvel épisode
d’une guerre civile n’opposait pas les partisans
de l’Empire contre les Républicains, mais bien
deux visions opposées de la République.
.
La donation Foucart
au musée des Beaux-Arts de Rennes
Après le musée d’Orsay,
nous signalons ici le deuxième ensemble,
offert à des musées français par Élisabeth et
Jacques Foucart en l’honneur de Bruno Foucart,
de tableaux et dessins qui appartenaient à la
collection de ce dernier. Le Musée des
Beaux-Arts de Rennes reçoit ainsi un nombre
considérable de grands chefs-d’œuvre de l’art
religieux français du XIXe
siècle. Plusieurs d’entre eux (le Cibot, le
Flandrin, le Granger, le Lazerges, le Lavergne
et le Savinien Petit) étaient publiés dans
l’ouvrage pionnier de Bruno Foucart : Le
Renouveau de la peinture religieuse en France au
XIXe siècle.
Édouard Cibot
(1799-1877)
La Vierge couronnée par son
fils enfant, 1846
S’il reste peu connu,
Édouard Cibot, élève de
Pierre-Narcisse Guérin puis de François-Édouard
Picot (qui avait repris son atelier au départ de
Guérin pour Rome) est sans aucun doute l’un des
peintres les plus attachants de la Monarchie de
Juillet. Il fut un grand peintre religieux
comme en témoignent les peintures murales
derrière le chœur de l’église
Saint-Leu-Saint-Gilles à Paris, qui auraient
bien besoin d’une restauration, ou encore la
ravissante Enfance de la Vierge donnée il y a
trois ans au Musée de la Vie Romantique.
La
Vierge à l’enfant offerte à Rennes témoigne
d’une attention soutenue à l’art de Raphaël, une
influence très fréquente sur les peintres de
cette époque. Bien loin d’un pastiche néanmoins,
Cibot crée une image originale et inoubliable,
du Christ enfant tenu par sa mère et qui la
couronne. La toile fut exposée au Salon à deux
reprises, en 1846 sous le titre Regina cœli,
puis en 1855, lors de l’Exposition universelle,
comme La Sainte-Vierge et l’Enfant-Jésus.

Claudius Lavergne (1815-1887)
Scènes de
l’évangile selon saint Matthieu, vers 1840
Claudius Lavergne fut
essentiellement un peintre religieux,
et devint ensuite presque exclusivement
peintre-verrier, créant un atelier qui eut une
activité très importante dans la seconde moitié
du XIXe siècle et qui a
couvert la France entière de vitraux.
L’œuvre de
la collection Bruno Foucart offerte à Rennes est
une esquisse pour un tableau ou un décor qui n’a
pas encore été identifié. La disposition en deux
registres évoque les peintures murales de
l’époque, mais Claudius Lavergne semble avoir
peu travaillé dans ce domaine à l’exception
notamment d’une chapelle à Châtillon-d’Azergues
aux côtés d’Hippolyte Flandrin.
Séparer les peintures en plusieurs scènes était
une pratique fréquente chez les peintres
lyonnais, même pour des tableaux de chevalet :
rappelons l’exemple fameux du Bien et le Mal de
Victor Orsel du Musée des Beaux-Arts de Lyon.
C’est d’ailleurs une scène moralisatrice
comparable à cette dernière toile que représente
ici Lavergne. Plutôt que la parabole du pauvre
et du riche, titre donné par Oriane Gautrand, la
spécialiste de l’artiste, et sous lequel il est
entré au Musée des Beaux-Arts de Rennes, il faut
y voir plutôt une illustration de l’évangile de
Saint Matthieu dont deux citations légendent
d’ailleurs les deux scènes, une pratique qui
semble fréquente chez cet artiste.
Celle du bas, où l’on voit une famille donner
un verre d’eau à un pauvre, tandis qu’à droite,
un personnage regarde la scène avec dédain, est
légendée avec Matthieu X 42 : « Et quiconque
donnera seulement un verre d’eau froide à l’un
de ces petits parce qu’il est mon disciple, je
vous le dis en vérité, il ne perdra point sa
récompense. » Au registre supérieur, on voit le
Christ au Paradis, accueillant la famille
méritante du registre inférieur, amenée par un
ange. Agenouillé devant le Christ, un autre ange
montre un livre, probablement celui répertoriant
les bonnes actions des âmes sauvées, tandis qu’à
droite, un troisième ange éploré sur l’épaule de
saint Pierre lui montre un pêcheur emmené par
les diables de l’Enfer : on reconnaît ici
l’homme qui se trouvait en haut des marches de
son palais et refusait de faire l’aumône au
pauvre.
La légende est également tirée de Matthieu (XXV
40) : « Et le roi leur répondra : Je vous le dis
en vérité, toutes les fois que vous avez fait
ces choses à l’un de ces plus petits de mes
frères, c’est à moi que vous les avez faites.
».
Rappelons que la parabole du riche et du
pauvre, tirée de saint Luc, et non de saint
Matthieu, conte l’histoire du riche qui mène une
joyeuse vie et néglige le pauvre Lazare, malade
et qui se rassasie à peine des miettes tombées
de la table du riche. Le pauvre meurt et est
emporté par les anges, tandis que le riche est
envoyé en Enfer où à son tour il demande à être
secouru. Si le sujet et la morale sont proches,
il n’est pas question d’une famille, et
l’évangile n’est pas le même.
Jean Pierre
Granger (1779-1840)
L’Adoration des
mages, vers 1833
Cette esquisse très
aboutie, où la composition est
déjà trouvée mais qui évoluera néanmoins encore
dans l’œuvre terminée, prépare une des peintures
murales de la nef de l’église
Notre-Dame-de-Lorette à Paris.
Élève de
Jean-Baptiste Regnault, puis de David, il obtint
le prix de Rome en 1800 devant Ingres qui
n’obtint que le Second prix. Le tableau lauréat,
Antiochus renvoie son fils à Scipion relève
entièrement de l’esthétique davidienne. Restant
fidèle au néoclassicisme, il exposa au Salon
jusqu’à sa mort en 1840, essentiellement des
portraits et des sujets mythologiques. Il fut
néanmoins également l’auteur de peintures
religieuses et participa au chantier de
Notre-Dame-de-Lorette avec de nombreux autres
peintres, de toute tendance, même si la nef fut
pour l’essentiel attribuée à des artistes
proches de son esthétique néoclassique (Vinchon,
Langlois…), ce qui donne malgré tout une
certaine unité à l’ensemble.
Léon Cogniet
(1794-1880)
Briséis pleurant Patrocle,
1815
Si Léon Cogniet relève
davantage de l’esthétique romantique
comme en témoigne notamment l’extraordinaire
Massacre des Innocents déjà accroché aux
cimaises du Musée des Beaux-Arts de Rennes, la
petite toile qui vient de lui être offerte est
d’une esthétique rigoureusement néoclassique. Il
s’agit en effet de l’esquisse pour le prix de
Rome de 1815, alors que Cogniet était l’élève de
Pierre-Narcisse Guérin. Le grand prix fut adjugé
à Jean Alaux, mais Cogniet obtint tout de même,
alors qu’il n’était âgé que de vingt ans, le
second grand prix. Comme le signale Philippe
Grunchec dans son ouvrage sur les prix de Rome,
il s’agit ici d’une première esquisse ; une
autre, plus aboutie, d’une composition assez
différente et probablement plus proche de
l’œuvre définitive (dont la localisation n’est
pas connue), ayant été achetée par l’École des
Beaux-Arts en 1980. Rappelons qu’outre Le
Massacre des Innocents, Rennes a récemment
acquis un important ensemble de dessins par Léon
Cogniet.
Jules Jollivet
(1794-1871)
Le Massacre des Innocents,
1844
Élève de Gros et de
Dejuinne, surtout peintre
d’histoire et peintre de genre, Jollivet est
également l’auteur d’un abondant œuvre
religieux. Rappelons qu’il est l’auteur des
laves émaillées qui se trouvent sur la façade de
Saint-Vincent-de-Paul et qui ont récemment été
remises en place ainsi que d’une chapelle
restaurée à Saint-Louis-en-l’Île.
Le dessin
offert à Rennes est une étude pour un tableau du
Musée de Rouen, Le Massacre des Innocents : la
femme qu’il prépare se trouve à droite de la
composition, avec son enfant mort à ses pieds.
Nous ne connaissions pas cette œuvre que, sauf
erreur, nous ne pensons pas avoir jamais vue sur
les murs du musée de Rouen, et qui mériterait
assurément d’y être exposée.
Retour
vers spiritualité des images
Vos
commentaires et réaction
haut de la page
|
|
|
Les internautes qui souhaitent être directement
informés des nouveautés publiées sur ce site
peuvent envoyer un e-mail à l'adresse que voici
: Gilles Castelnau
Ils recevront alors, deux fois par mois, le lien
« nouveautés »
Ce service est gratuit. Les adresses e-mail ne
seront jamais communiquées à quiconque.
|
|