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Théologie du protestantisme

 

 

André Gounelle

Ancien doyen de la Faculté de théologie protestante de Montpellier

 

édition van Dieren

421 pages. 25 €

 Recension Gilles Castelnau


 

7 décembre 2021


Ce gros livre est une magnifique somme théologique de toute la pensée théologique protestante. Avec une remarquable clarté d’esprit et un respect absolu, le professeur Gounelle présente les ressemblances et les différences non seulement des théologiens protestants luthériens et réformés, mais aussi évangéliques et catholiques.

Tous les aspects de la théologie sont présentés tour à tour et le lecteur peut les questionner à son gré comme on le fait dans une encyclopédie. En voici plusieurs exemples :

• Les réformes luthérienne, réforme, radicale, anglicane, catholique

• La Bible : les lectures protestantes, le canon, la science, l’histoire, l’obscurité, l’autorité

• Grace et foi : la justification par la grâce, la sanctification, le laxisme moral, la prédestination.

• L’Église : sa nature, les ministères, le sacerdoce universel, le culte, la prédication. Les différentes conceptions des sacrements, le baptême et la cène.

• L’esprit du protestantisme : Dieu seul est Dieu, je suis devant Dieu, Dieu parle dans la Bible, Dieu rend libre, Dieu fait surgir du nouveau.

Nul doute que la richesse de cette nomenclature et le prix modéré cette importante publication mettront l’eau à la bouche du protestant fidèle comme aussi du curieux et du sympathisant…

En voici, d’ailleurs quelques exemples :

 


 


Deuxième partie :  La Bible


 La Réforme et la Bible


La Réforme, une nouvelle lecture de la Bible

La contestation de l’Église interprète autorisée

Dans un livre célèbre de controverse paru en 1832, Symbolique, le théologien catholique Johann Adam Moehler définit ainsi la position romaine : « L'Église est l'interprète infaillible de l'Écriture sainte. Or de ceci quelle est la conséquence ? C'est que la doctrine de l'Église et la doctrine de l'Écriture sont une seule et même chose ». En reprenant les termes mêmes de Moehler, on pourrait formuler ainsi la position de la Réforme : « L'Église est l'interprète faillible de l'Écriture sainte. Or de ceci quelle est la conséquence ? C'est que la doctrine de l'Église doit être sans cesse confrontée à celle de l'Écriture ». La Bible ne doit pas servir seulement à légitimer institutions et doctrines, à justifier croyances et pratiques. Sa fonction essentielle consiste à les mettre en cause, à les contester et à les ébranler. « Il faut lire la Bible pour s'y cogner le nez » écrit Zwingli ; la Confession de La Rochelle déclare que « toutes choses doivent être examinées, réglées et réformées selon icelle. »

 

Encore aujourd'hui, dans le catholicisme, on ne confronte que rarement ce que dit la Bible avec ce qu'enseigne l'Église. Il en va de même des textes du Conseil œcuménique des Églises. On cherche dans la Bible des bases, des arguments, des illustrations, rarement des critiques ou des contestations. On trouve une attitude analogue dans les milieux fondamentalistes ; on utilise la Bible pour se justifier, se légitimer et se conforter. On se repose sur elle au lieu de s'exposer à elle. On en fait un fondement, autrement dit quelque chose sur quoi on s'assied ou qu'on foule aux pieds. Certes, la Bible est fondatrice, toutes les Églises chrétiennes le proclament. Les Réformes luthérienne et réformée soulignent qu'elle est également interpellatrice ; elle porte une parole qui, telle une épée à deux tranchants, dérange, bouscule, oblige à bouger et à se réformer. La Bible exerce son autorité, non lorsqu'elle nous installe dans une demeure, mais quand elle nous met en marche.

 



Troisième partie :  Grâce et foi


 Objections et difficultés

Un laxisme moral ?

Péché et malheur

Spontanément, nous assimilons le péché à une faute morale. Il consisterait à faire quelque chose dont nous avons envie et qui enfreint une loi ou une règle éthique. Pour notre agrément ou pour notre bénéfice, nous nous autorisons ce que nous devrions nous interdire. Il y a un attrait du péché (on l'appelle « tentation »), contre lequel il nous faut lutter. La peur d'une sanction et l'espoir d'une récompense nous aident à résister à sa séduction et à nous imposer une discipline. Ce sont d'utiles contrepoids qui refrènent des penchants forts.

 

Or, dans le Nouveau Testament, le péché ne relève pas de la morale mais de la religion, autrement dit du lien avec Dieu et avec le prochain (à tort ou à raison, on a fait dériver religio du verbe latin religare qui signifie « relier »). Nous devenons pécheurs quand nos relations avec Dieu et avec les autres se dégradent et se détériorent, même si nous n'avons rien fait de mal du point de vue d'une éthique si exigeante soit-elle. Dans une famille, un groupe ou un pays, les rapports des uns avec les autres peuvent s'envenimer, sans que personne n'ait accompli d'actes délictueux.

 

Il importe de séparer très nettement, même si ces notions s'entremêlent constamment et inévitablement, péché et immoralité. Il est clair que des comportements éthiquement mauvais relèvent toujours du péché, c'est-à-dire d'une perturbation des relations. Il ne s'ensuit nullement que des actes impeccables d'un point de vue moral en soient exempts. Selon Augustin, les vertus des païens, par exemple des stoïciens, sont des péchés (« des péchés splendides »), car elles ont pour source l'amour-propre et l'orgueil. En ce sens, classiquement on distingue les « péchés honteux », scandaleux, moralement et socialement condamnables, et les « péchés honnêtes » qui ne contreviennent à aucune loi, ce qui ne les empêche pas d'être religieusement mauvais.

Le péché n'est ni attirant ni plaisant. Des relations faussées avec Dieu et avec les autres pourrissent la vie ; elles entraînent ennuis et mal-être. « Les démons et les méchants ne sont pas heureux écrit le « radical » Valentin Weigel. Ne voyons pas dans le pécheur un épicurien épanoui ; il est plutôt un mécontent aigri. Loin d'apporter une satisfaction coupable, le péché véhicule déconvenues et tracas. Il est pénible et nullement agréable. Il n'est pas un plaisir défendu qu'on s'accorde en contravention avec une norme qui nous pèse et nous contraint. Il est un malheur subi, une situation douloureuse dont nous sommes prisonniers.

 


 Envoi :  L'esprit du protestantisme


Dieu parle dans la Bible

Livre et parole

Pourtant, nous le sentons et l'expérimentons constamment, la parole et l'écrit touchent leur destinataire différemment et n'établissent pas la même relation entre celui qui s'exprime et son auditeur ou son lecteur. Lire un article n'équivaut pas à écouter un cours ou une conférence. Correspondre par lettre ou par email ne revient pas au même que se parler face à face, même si ce qui est communiqué reste identique. L'écrit comporte une distance, un écart et un éloignement. Chacun reste de son côté. On n'a pas directement affaire à quelqu'un, mais à quelque chose qui provient de lui. Au contraire, la parole implique une présence vivante, une rencontre personnelle, une proximité et un contact immédiat.

La plupart des livres de la Bible sont nés de prédications, d'harangues (celles des prophètes, des évangélistes, des apôtres et, bien sûr, de Jésus). Prononcées de vive voix, elles ont été ensuite couchées sur le papier. Dans les Écritures, nous avons de la parole figée, mise en conserve ou congelée. Quand on veut consommer des conserves ou des aliments surgelés, on les réchauffe pour qu'ils deviennent mangeables et qu'ils nourrissent. De même, il faut que le texte retrouve vigueur et chaleur afin qu'il nous atteigne comme une parole. Nous avons déjà cité au chapitre XVI l'affirmation de Paul Ricœur selon laquelle la tâche du prédicateur consiste « à restituer en parole vivante [...l ce qui vient à nous à travers des textes ». Le terme « restituer » peut se discuter, car il ne s'agit pas tant de revenir à la situation originale que de susciter, dans un contexte différent, une situation analogue de sorte que ce qui a été dit demeure actuel.

 

La Bible n'est pas parole de Dieu en tant que texte. Elle ne l'est pas quand on l'enferme dans un placard ou qu'on en fait un usage strictement littéraire. Mais lorsqu'elle suscite une prédication authentique, qui transforme le texte en message vivant et actuel, alors à travers elle Dieu parle.

 

Écriture et Esprit

« La lettre tue, l'Esprit fait vivre », écrit l'apôtre Paul (2 Co 3,6). Les réformés, nous l'avons vu au chapitre IV, insistent beaucoup sur la complémentarité de l'Écriture et de l'Esprit. Pour Calvin, le texte de la Bible est en lui-même « lettre morte », « sans vigueur », inerte, inefficace. Il ne devient parole vive de Dieu que par l'action du Saint-Esprit dans le cœur et l'intelligence de ceux qui le lisent. Le langage n'agit pas par lui-même, il faut que Dieu intervienne. « Les mots, déclare Pierre du Moulin, frappent l'oreille, mais Dieu change les cœurs. Ils exhortent, mais Dieu persuade ». Les discours restent des mots, même s'ils sont justes. La Parole de Dieu se fait entendre lorsque le souffle intérieur de l'Esprit vient rendre efficaces les mots enregistrés « en papier ou en parchemin » ou prononcés dans la prédication.


 

L’Écriture et le Christ

On a parfois soutenu que l'islam et le christianisme ont en commun d'être des religions du livre (ou, plus exactement, des religions d'interprétation du Livre), même s'il ne s'agit pas du même livre. Les deux religions se fondent en effet sur une Écriture sainte et se montrent soucieuses de fidélité au texte inspiré. Sans nier cette parenté, on ne doit pas oublier qu'elle s'accompagne d'une grande différence. Pour la grande majorité des musulmans, l'autorité suprême réside dans le Coran, dont l'original se trouve de toute éternité dans le ciel et que Dieu dicte à son prophète. Mohammed est le serviteur du Coran, il lui est subordonné ; son rôle consiste à le transmettre aux fidèles. Dans le christianisme, l'autorité suprême réside dans le Christ, parole incarnée de Dieu. La Bible est au service du Christ, sa mission est de lui rendre témoignage. Comme le dit Luther, elle est la servante dont il est le Seigneur. La foi chrétienne n'est pas foi en la Bible, mais bien foi en Christ. La valeur et l'importance décisives de la Bible viennent de ce qu'elle permet de connaître le Christ, de le rencontrer, d'entendre et de recevoir ce qu'il dit.

 


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