Que peut-on croire
aujourd'hui ?
Dieu présent
dans les lointaines galaxies
Extraits d’une émission
à la radio Fréquence Protestante
Gilles
Castelnau
20 novembre 2013
La question de Dieu se pose de nos jours. On ne sait plus très bien si Dieu est celui de ma religion, de toutes les religions ou d'aucune. Et maintenant on découvre le cosmos. Une fusée est même sortie du système solaire avec des inscriptions à l’intention d’êtres pensants éventuels demeurant sur des planètes habitables en dehors du système solaire. On y a gravé sur des plaques de cuivre la silhouette d’un homme et celle d’une femme, nus, avec des symboles expliquant où se trouve la Terre dans le système solaire et dans la galaxie. Depuis plusieurs dizaines d’années on envoie des signaux radios et on essaye d'en recueillir provenant du cosmos afin de découvrir d’éventuels êtres pensants. Sans succès jusqu’à présent.
Je pense à un astronome de renom de l’observatoire de Meudon qui m’a dit : « Il y a dans notre galaxie des milliards de systèmes solaires ayant chacun des planètes dont certaines sont probablement habitables. Il y a des milliards de galaxies qui ont des milliards de systèmes solaires. Sur le nombre, ce serait vraiment impensable qu’il n’y ait pas de planètes habitables avec des êtres dont nous n’avons évidemment pas la moindre idée. Nous n’entrerons jamais en contact avec eux car ils sont peut-être à des millions d’années lumière de la Terre. »
On peut donc légitimement se demander s’il y a un Dieu là-bas, s’il est le même Dieu que sur la Terre. Quelqu’un m’a dit une fois qu’il y avait d’autres Dieux dans les autres galaxies.
L’idée un peu polémique et agressive se fait jour parmi nos contemporains qu’il est absurde de continuer à être religieux quand on pense que notre islam, notre judaïsme, notre christianisme seraient totalement inadaptés dans des planètes qui n’ont rien certainement en commun avec nous. D'ailleurs croyons-nous vraiment qu’ils auront eu la Chute avec Adam et Eve, le déluge et la Sortie d’Egypte avec un Moïse ? Il est absurde de penser que notre petite religion puisse être cosmique.
Jésus-Christ
On dit que Jésus est « monté au ciel à la droite de Dieu ». Mais on ne croit plus aujourd'hui que le grand ciel bleu soit la demeure de Dieu, située à une certaine hauteur et que Dieu y trône avec Jésus à sa droite.
Dire que Jésus-Christ est à la droite de Dieu vexerait grandement, s’ils l’apprenaient, les autres êtres pensant sur les planètes du cosmos qui demanderaient pourquoi un Terrien aurait cette place dominante et non un ressortissant de leur planète.
La question est la même lorsqu’on dit que « Marie est reine du ciel, reine des anges » : pourquoi serait-ce une terrienne qui serait reine du ciel et non une ressortissante d’Alpha du Centaure ou d’ailleurs ?
Immensité du cosmos et du temps
Devant l’immensité du cosmos, notre religion ne paraît-elle pas très petite, très provinciale. Nos religions prêchent un petit Dieu régional et non pas un Dieu international, intergalactique.
Il nous a fallu des siècles pour que nous commencions à élargir notre espace religieux en disant que Dieu n’était pas seulement le Dieu des humains mais aussi le Dieu de la nature, des animaux et des végétaux. Les théologiens ont déjà rencontré le problème en découvrant d’autres peuples, comme les Africains : on se demandait si les peuples noirs, lointains à l'époque, et tellement différents de nous avaient même une âme.
Sur le forum de Yahoo une question récurrente est celle de l’existence des dinosaures. Les gens ne se rendent souvent pas compte que ceux-ci ont vécu très longtemps avant qu’il y ait des hommes sur la terre, puisque l’humanité date de 500 000 ans ou au maximum d’un million d’années, alors que le dernier dinosaure a disparu il y a 65 millions d’années. Les gens pensent, peut-être à cause des dessins animés et des séries télévisées où l’on voit ensemble des dinosaures et des hommes, que c’est une absurdité totale de penser que Dieu ait laissé vivre dinosaures et hommes en même temps. En effet le christianisme, l’islam et le judaïsme enseignent un Dieu préoccupé avant tout des hommes, comptant les péchés, mesurant si les hommes se conduisent bien ou mal et s’ils doivent être envoyés au paradis ou en enfer.
On se dit qu’en ces temps très anciens, où il n’y avait que les dinosaures et pas d’hommes et que Dieu faisait pousser les plantes et les herbes dont ceux-ci se nourrissaient, il n’y avait donc pas de péchés à compter, pas de salut du monde à mettre en œuvre et Dieu se réjouissait sans doute de voir les dinosaures que nous jugeons si laids et qu'il trouvait probablement beaux.
Les gens demandent par exemple, s’il y aura au paradis les animaux qui n’ayant pas de péché ne doivent pas intéresser Dieu. Je pense que oui, et pas seulement les animaux mais tout ce qui vit et respire, Dieu n’est-il pas le Dieu de la nature ?
Cette idée de Dieu élargit énormément notre horizon et montre que nos cultes, comme d’ailleurs ceux des musulmans et des juifs, qui sont centrés sur le péché, les demandes de pardon, sont trop anthropocentriques et étroits d’esprit. Ne faudrait-il pas avoir des cultes où soit davantage manifestée la joie de Dieu qui regarde vivre les dinosaures, les hommes, les Noirs et les habitants éventuels d’Alpha du Centaure.
D’ailleurs certaines églises font des célébrations avec des animaux. Cela se fait beaucoup en Angleterre. Cela se fait à Paris dans l’église catholique dissidente du Père Philippe dans le 15e arrondissement, à la cathédrale américaine de l’avenue George V et à Meudon dans l’église Sainte Jeanne d’Arc du Père Ronald Cosic, début octobre lors de la fête de saint François d’Assise. Dans ces célébrations il ne peut pas y avoir de confession des péchés, de demande de pardon, de confession de foi ni de dogmes. Il ne peut y avoir qu’un grand enthousiasme pour le Dieu de la vie.
Le temps
Il n’y a pas que l’immensité cosmique qui pose question mais aussi celle du temps. La Terre existe depuis 4 milliards d’années et le soleil éclatera et brûlera tout dans également 4 milliards d’années. Nous sommes donc actuellement au milieu de la vie de la Terre. Il y a par conséquent autant de différence entre les hommes que nous sommes aujourd’hui et l’amibe originelle d’il y a 4 milliards d’années, qu’il y en aura entre nous et nos très lointains descendants qui vivrons dans 4 milliards d’années et qui nous considéreront évidemment comme proches des animaux les plus primitifs.
Ces êtres (aussi différents de nous que nous le sommes des amibes) pourront-ils encore lire la Bible ? Jésus-Christ, cet homme qui sera pour eux ancien de 4 milliards d’années, représentera-t-il pour eux, comme pour nous, le fils de Dieu symbole de l’humanité telle que Dieu la veut, symbole aussi de la présence de Dieu parmi les hommes ? Ou penseront-ils à un tout autre Christ remplaçant Jésus de Nazareth ?
Le sacrifice du Christ
En ce qui concerne Jésus, certains pensent - comme le symbole des Apôtres ou celui de Nicée - que son seul rôle était de se sacrifier sur la croix pour expier le péché originel. Mais peut-on penser que les êtres pensants d’autres galaxies, auraient eu comme nous un couple d’Adam et Eve qui auraient eux aussi été tentés par le fruit défendu sans succomber à la tentation, sans le manger et devenir « pécheurs » ? Peut-on imaginer des êtres qui ne soient pas « pécheurs », qui – pour reprendre l’imagerie du récit biblique – ne soient pas « condamnés à travailler « à la sueur de leur front », des femmes accouchant sans douleur et qu’ils demeurent immortels, puisque la mort est, selon le texte de la Genèse, la conséquence directe de la Chute ?
La question de la nécessité du péché humain est ainsi posée et demande réflexion, ainsi que la question du sacrifice de Jésus qui n’aurait donc pas forcément eu lieu.
De plus si on pense au Dieu du cosmos, intergalactique, et à nos lointains descendants dans 4 milliards d'années, peut-on encore parler de Trinité ? Et on repose la question : les êtres d’ailleurs pourraient se demander pourquoi la 2e Personne de la Trinité serait un Terrien du premier millénaire ?
Ceux qui croient en la Trinité, qui voient en Jésus-Christ le Fils éternel de Dieu destiné à sauver l’humanité de la Chute doivent se demander si la comparaison avec l’humanité d’autres planètes n’oblige pas à revoir leur théologie.
Si on prend conscience qu’il n’est pas possible d’enfermer Dieu dans un ensemble de doctrines qui nous sont familières (et je dirais la même chose pour les doctrines juive et musulmane) mais qui ne correspondent plus à notre connaissance du cosmos et du temps, peut-on penser que ces doctrines et des dogmes auraient été révélées par Dieu de façon surnaturelle aux prophètes, au Vatican, aux pasteurs et aux prêtres ?
La vérité objective des doctrines
Lorsque nous parlons de la Trinité, parlons-nous d’une réalité objectivement vraie présente dans le monde surnaturel ? Un prêtre m’a dit une fois qu’il y avait réellement trois Personnes au ciel qui communiquent entre elles, s’aiment et dont l’amour était un modèle pour l’humanité. Ou bien la Trinité, et les autres doctrines ont été développées, imaginées et par des hommes de Dieu cherchant à rendre compte de l’élan de foi qu’ils sentaient monter en eux dans les structures spirituelles, théologiques, philosophiques de leur époque, ou bien, comme je le pense elles sont, à l’évidence, métaphoriques.
Nous devrions donc repenser les formulations théologiques de nos catéchismes, de notre enseignement ecclésiastique pour ne pas donner l’impression à nos contemporains que nous savons tout de Dieu et que nos petites doctrines rendent compte d’une réalité objective cosmique.
La théologie du Process qui nous dit de penser Dieu comme le Dynamisme créateur de la vie permet sans doute de ne pas sombrer dans des affirmations peu crédibles désormais pour nos contemporains contemplant le cosmos d’un Dieu juge focalisé sur les péchés des hommes, leurs qualités et leurs défauts pour les récompenser du paradis ou les punir de l’enfer ou les affirmations également peu crédibles d’un Dieu n’acceptant qu’une religion, l’islam, vérifiant si l’on mange hallal et si l’on pratique le ramadan, le judaïsme, le catholicisme ou le protestantisme. Le Dieu de la vie, qui ressort d’ailleurs parfaitement des récits bibliques, est une conception moderne et heureuse pour les hommes d’aujourd'hui.
Cela nous libère de l’anthropocentrisme étriqué d’un Dieu régional en élargissant notre compréhension de Dieu qui est plus grand et permet de respirer largement un air vivifiant.