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Connaissance de la
Bible

Israël
Finkelstein photo
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« La Bible
dévoilée »
les nouvelles révélations de l'archéologie
Israël
Finkelstein
directeur de l'Institut
d'archéologie de l'université de Tel-Aviv.
Coresponsable des fouilles de Megiddo.
Neil Asher
Silberman
directeur historique au Ename Center
for Public Archaeology and Heritage Presentation de Belgique
Édition Bayard. 432 pages. 24
euros
Recension Gilles Castelnau
25 juin 2002
Ce remarquable
ouvrage très clair et
documenté constitue désormais l'incontournable document
pour tout ce qui concerne la relation de la Bible avec l'histoire de
l'ancien Israël. Les larges extraits que voici en montrent
l'importance et donneront l'idée de l'acheter à bien
des internautes.
.
Prologue
page 7.
L'Exode a-t-il vraiment eu
lieu ? Canaan a-t-il vraiment
été conquis ? David et Salomon ont-ils vraiment
régné sur un vaste empire ?
Les débats publics suscités par chacune de ces
questions s'écartaient souvent des limites précises des
sciences de l'archéologie et de la critique biblique pour
s'aventurer dans les domaines brûlants de la théologie
et des croyances religieuses.
Nonobstant les passions soulevées par de tels sujets, nous
estimons qu'un réexamen des découvertes
antérieures et de celles provenant de fouilles
archéologiques actuelles démontre clairement que,
dorénavant, les savants devront aborder le problème des
origines de la Bible et de l'antique société
israélite à partir d'une perspective entièrement
nouvelle. Dans les chapitres qui suivent nous apporterons les preuves
qui étayent cette affirmation.
La Bible et
l'archéologie
page 15.
Plus de deux siècles
d'études attentives du texte hébreu de la Bible
et l'exploration, encore plus
minutieuse, des moindres recoins de la région située
entre le Nil, le Tigre et l'Euphrate ont permis de commencer enfin
à comprendre quand, pourquoi et comment la Bible a pris
naissance. Les analyses détaillées de la langue et des
styles littéraires particuliers de la Bible ont permis aux
savants d'identifier les sources orales et écrites qui ont
alimenté le texte biblique actuel. De son côté,
l'archéologie a accompli l'exploit de réunir un
trésor de connaissances innombrables, d'une ampleur quasi
encyclopédique, sur les conditions matérielles, les
langues, les sociétés de l'ancien Israël, ainsi
que sur l'histoire au cours de laquelle ses traditions se sont
graduellement cristallisées, sur une période d'environ
six cent ans, entre l'an 1000 et l'an 400 av. J.C. Et,
ce qui est le plus important, une meilleurs connaissance à la
fois du texte et des trouvailles archéologiques nous a
aidés à distinguer entre la puissance poétique
de la saga biblique et les événements et les
différentes phrases, beaucoup plus prosaïques de
l'histoire du Proche-Orient ancien.
Jamais le monde de la Bible ne nous a
été aussi proche,
jamais il n'avait fait l'objet d'aussi minutieuses explorations.
Grâce aux fouilles archéologiques, nous savons quelles
céréales les israélites et leurs voisins
cultivaient, quels mets ils consommaient, avec quels matériaux
ils bâtissaient leurs cités, avec qui ils
commerçaient. Plusieurs dizaines de villes et de
localités mentionnées dans la Bible ont
été identifiées et exhumées. On a fait
appel aux techniques de fouille les plus modernes, ainsi qu'au plus
large éventail possible de tests de laboratoire, pour dater et
analyser les civilisations des anciens Israélites et de leurs
voisins philistins, phéniciens, araméens, ammonites,
moabites et édomites. On a découvert un certain nombre
d'inscriptions et de sceaux qu'il est permis d'associer à des
personnages mentionnés dans le texte biblique. Pour autant,
l'archéologie n'a pas démontré loin s'en faut,
que la chronique biblique est véridique dans tous ses
détails. Il est aujourd'hui évident qu'un grand nombre
d'événements de l'histoire biblique ne se sont
déroulés ni au lieu indiqué ni de la
manière dont ils sont rapportés. Bien plus : certains
des épisodes les plus célèbres de la Bible n'ont
tout simplement jamais eu lieu.
L'archéologie nous permet de
reconstituer la véritable histoire qui se cache derrière la Bible, que ce soit
au niveau des grands rois et de leurs royaumes ou au niveau des us et
coutumes de la vie quotidienne. Comme nous allons l'expliquer dans
les prochains chapitres, nous savons à présent que les
premiers livres de la Bible, dont les récits
célèbres content l'histoire des premiers
Israélites, furent d'abord codifiés (et pour
l'essentiel composés) en un lieu et à une époque
désormais identifiés : la Jérusalem du
VIIe siècle av. J.C.
page 33.
Les fouilles des sites
bibliques
Avant que ne prît fin le XXe siècle,
l'archéologie avait amplement démontré que les
concordances entre, d'un côté, les découvertes
réalisées en terre d'Israël et dans l'ensemble du
Proche-Orient, et, de l'autre, le monde décrit par la Bible
étaient bien trop nombreuses pour laisser croire que cette
oeuvre n'était qu'une fable littéraire et religieuse de
composition tardive, écrite sans le moindre fondement
historique. Mais, par ailleurs, les contradictions évidentes
entre les découvertes archéologiques et la version
biblique des événements demeuraient, elles aussi, bien
trop abondantes pour affirmer que la Bible nous offre une description
fiable de la manière dont ces mêmes
événements se sont véritablement
déroulés.
page 36.
Un nouveau regard sur
l'histoire biblique
Nous allons voir combien le récit biblique doit aux espoirs,
aux craintes et aux ambitions du royaume de Juda, qui atteignit son
apogée sous le roi Josias, à la fin du VIIe
siècle av. J.C. Nous tenterons de démontrer que le
coeur historique de la Bible s'est développé dans des
circonstances politiques, sociales et spirituelles précises,
et qu'il doit tout au génie inventif et visionnaire de femmes
et d'hommes exceptionnels. Le plus gros de ce que l'on tient
généralement pour authentique - les histoires des
patriarches, l'Exode, la conquête de Canaan, la saga de la
glorieuse monarchie unifiée de David et de Salomon - est,
en réalité l'expression de l'élan créatif
d'un puissant mouvement de réformes religieuses, dont
l'éclosion a eu lieu dans le royaume de Juda durant
l'âge du Fer récent Même si ces récits se
sont greffés sur un tronc initial historique, ils
reflètent, pour l'essentiel, l'idéologie et la vision
du monde de leurs auteurs. Nous montrerons comment le récit de
la Bible a été reconstruit de manière à
favoriser la réforme religieuse et les ambitions territoriales
du royaume de Juda durant les décennies dramatiques sur
lesquelles s'est achevé le VIIe siècle
av. J.C.
L'Exode a-t-il eu
lieu ?
page 89.
Le défi au nouveau
pharaon
De 639 à 609 av. J.C. le roi Josias
règne sur Juda... Il songe à concrétiser le
rève d'une monarchie unifiée et glorieuse, de fonder un
grand et puissant État, réunissant tous les
Israélites, qui adorent un Dieu unique dans un Temple unique,
dominé par une unique capitale - Jérusalem -
sous le gouvernement d'un roi unique de la lignée de David.
L'Égypte de la XXVIe dynastie, aux
ambitions impérialistes, barre la voie qui conduit à la
réalisation des rêves de Josias. Surgissant de la brume
d'un lointain passé, certaines images et certains souvenir
servent donc de munitions dans l'épreuve de force nationaliste
qui oppose les enfants d'Israël au pharaon et à ses
régiments de chars.
Dès lors, la composition de
l'Exode nous apparaît sous une
perspective nouvelle et frappante. De même que la composition
de l'histoire des patriarches rassemblait diverses traditions
originelles mises au service de la montée du nationalisme,
à Juda, au VIIe siècle, le
même la composition élaborée du récit d'un
conflit avec l'Égypte - contant l'incommensurable pouvoir
du Dieu d'Israël et le salut miraculeux de son peuple -
servait une fin politique et militaire encore plus immédiate.
Cette grande saga, celle d'un nouveau départ et d'une seconde
chance, devait entrer en résonance avec les consciences des
lecteurs du VIIe siècle, en leur appelant leurs propres
difficultés et en les comblant d'espoir pour le futur.
L'attitude du nouveau royaume de
Juda à l'égard de
l'Égypte était faite d'un mélange de respect, de
crainte et d'aversion. D'un côté, l'Égypte
était considérée comme un refuge sûr en
période de famine, un lieu d'asile pour les fugitifs ;
elle représentait également une alliée
potentielle, en cas d'invasion par le nord. D'un autre
côté, une animosité doublée de
soupçons était ressentie en permanence à
l'encontre de cette grande voisine méridionale, qui n'avait
jamais cessé de manifester l'ambition de conserver le
contrôle du passage vital à travers la terre
d'Israël vers l'Asie mineure et la Mésopotamie. Or, voici
qu'un jeune roi de Juda se déclare prêt à
affronter la puissance du grand pharaon ; d'anciennes légendes
traditionnelles, issues de sources très variées, sont
donc rassemblées en une épopée unique pour
soutenir les visions politiques de Josias.
Durant l'exil à
Babylone et au cours des
siècles qui suivirent, de nouvelles couches se rajouteront au
récit de l'Exode. Mais nous voyons maintenant comment, pendant
le VIIe siècle av. J.C., une tension croissante
avec l'Égypte permit à cette composition surprenante de
se cristalliser. Par conséquent, la saga de l'Exode
d'Israël hors d'Egypte n'est pas une vérité
historique, mais elle n'est pas non plus une fiction
littéraire. Elle exprime puissamment les souvenirs et les
espérances suscitées par un monde en mutation.
L'affrontement de Moïse et du pharaon reflète la
rencontre imminente et fatidique qui opposera le jeune roi Josias au
pharaon Niko II, qui vient d'être couronné. Tenter
d'attribuer à cette allégorie biblique une date
précise reviendrait à trahir sa signification profonde.
La Pâque juive ne fête pas un événement
historique précis, mais une expérience de
résistance nationale contre les pouvoirs
établis.
La conquête de
Canaan
page 91.
Le livre de Josué nous
décrit une campagne militaire éclair au cours de laquelle les tribus israélites
défirent sur le champ de bataille les puissants rois de Canaan
et héritèrent de leurs territoires. Il proclame la
victoire du peuple de Dieu sur l'arrogance des païens ; il
chante l'éternelle épopée de la conquête
de nouvelles frontières et de la capture de
cités ; quant au peuple vaincu, il doit subir l'ultime
châtiment de la dépossession et de la mort. C'est une
saga martiale et poignante, pleine d'actes d'héroïsme, de
ruses, de cruelles vengeances, ponctuée de certains des
épisodes les plus saisissants de la Bible : la chute des
murs de Jéricho, le soleil dont la course s'arrête
à Gabaôn, l'incendie qui ravage la grande cité
cananéenne d'Haçor.
Mais si, comme nous venons de le
voir, l'Exode ne s'est pas
déroulé de la manière dont nous le raconte la
Bible, qu'en est-il de la conquête ? La question est
encore plus embarrassante. Comment une armée de gueux
dépenaillés, encombrés de femmes, d'enfants et
de vieillards, surgissant du désert après y avoir
séjourné pendant des décennies, pouvait-elle se
lancer dans l'entreprise d'une invasion aussi redoutablement
efficace ? Comment une horde désorganisée
pouvait-elle s'emparer des puissantes forteresses cananéennes,
avec leurs garnisons de soldats professionnels, appuyés par
des régiments de chars de guerre ?
La conquête de Canaan a-t-elle
vraiment eu lieu ? Cette saga
qui occupe le coeur même de la Bible - et de l'histoire
ultérieure d'Israël -, fait-elle partie de
l'histoire ou du mythe ? Les antiques cités de
Jéricho, d'Aï, de Gabaôn, de Lakish et
d'Haçor, ainsi que presque toutes les villes qui figurent dans
le récit de la conquête, ont été
localisées et fouillées, mais les vestiges de la
conquête historique de Canaan par les Israélites sont,
comme nous le verrons, plutôt maigres. Ici aussi,
l'archéologie nous permettra de démêler les
événements historiques réels de ceux qui
relèvent de l'imagination puissante des auteurs de
l'impérissable contre biblique.
Un Canaan
différent
page 95.
Comme
pour le récit de l'Exode, le
Canaan que nous révèle l'archéologie
diffère radicalement de celui que nous dépeint la Bible
au moment présumé de la conquête,
c'est-à-dire entre 1230 et 1220 av. J.C. (Cette
date est calculée d'après les références
présumées aux pharaons de la dynastie des Ramsès
contenues dans l'Exode et d'après la date de la stèle
de Merneptah, de 1207 av. J.C., qui mentionne une
présence d'Israël à Canaan à cette
époque). Nous tenons pour certain
qu'en 1207 av. J.C., un groupe nommé
Israël était établi quelque part dans le pays,
mais ce que nous savons par ailleurs de la situation
générale de Canaan, sur le plan militaire et politique,
tend à prouver qu'une invasion éclair de l'ensemble du
territoire de la part de ce groupe eût été fort
peu réaliste, voire extrêmement improbable.
La documentation sur le Canaan de
l'époque abonde : on la
trouve dans des documents égyptiens datant du Bronze
récent (1550-1150 av. J.C.), sous la forme de
lettres diplomatiques, de listes de villes conquises, de
scènes de siège sculptées en bas-reliefs sur les
murs des temples égyptiens, d'annales de princes
égyptiens, d'oeuvres littéraires et d'hymnes de toutes
sortes. La meilleure source d'information nous vient des lettres de
Tell el-Amarna. Ces textes représentent une partie de la
correspondance diplomatique et militaire des grands pharaons
Aménophis III et Akhénaton, son fils, qui
régnaient sur l'Égypte au XIVe
siècle av. J.C.
Les quatre cents tablettes de Tell
el-Amarna, éparpillées
dans les musées du monde entier, contiennent des missives
envoyées en Égypte par des dirigeants de puissants
États comme les Hittites d'Anatolie et les rois de
Babylone ; la plupart émanent des dirigeants des
cités-États de Canaan, qui étaient vassales de
l'Égypte durant cette période ; ces dirigeants
comprennent ceux des villes cananéennes dont le nom deviendra
célèbre grâce à la Bible, comme
Jérusalem, Sichem, Megiddo, Haçor et Lakish. Mais
surtout, les lettres de Tell el-Amarna révèlent que
Canaan était une province égyptienne,
étroitement contrôlée par l'administration
pharaonique. La capitale provinciale était établie
à Gaza, mais les garnisons égyptiennes étaient
stationnées en des lieux clés de la mer de
Galilée, ou au port de Jaffa (aujourd'hui
intégré dans la ville de Tel-Aviv).
Dans la Bible, on ne rencontre aucun Égyptien en dehors de
l'Égypte ; pas un seul Égyptien n'est
mentionné dans les batailles qui se déroulent à
Canaan. Or les documents contemporains et les découvertes
archéologiques attestent que l'Égypte administrait et
surveillait étroitement les affaires publiques de cette
contrée. Les princes des cités cananéennes (que
le livre de Josué présente comme de puissants ennemis)
étaient, en réalité, d'une faiblesse
pathétique. Les fouilles prouvent qu'à l'époque
les cités de Canaan n'étaient pas les
« villes » qu'elles deviendront p)lus tard. Elles
n'étaient tout au plus que des places fortes abritant
l'administration et la petite élite du pays : le roi, sa
famille et un entourage réduit de bureaucrates ; les
paysans vivaient alentour, éparpillés dans des hameaux.
La cité typique consistait en un palais, un temple, et
quelques édifices publics : résidences
privées des officiels, auberges, bâtiments
administratifs. Il n'y avait pas de mur d'enceinte. Nulle
fortification ne protégeait les formidables cités
cananéennes décrites dans le récit de la
conquête !
Apparemment la protection de l'Égypte, qui veillait sur la
sécurité de la province, dispensait de murailles
défensives.
page 97.
Les lettres de Tell
el-Amarna détaillent la
situation de Canaan au XIVe
siècle av. J.C., soit un siècle environ avant
la conquête présumée des Israélites. Nous
ne possédons pas de source d'information équivalente
sur la situation de Canaan au XIIIe siècle. Mais le
pharaon Ramsès II, qui régnait sur l'Égypte
durant une bonne partie de ce siècle, n'était pas du
genre à négliger la surveillance militaire de Canaan.
C'était un puissant souverain, peut-être même le
plus puissant des pharaons, et les affaires étrangères
le passionnaient au plus haut point.
D'autres indications - à la fois archéologiques et
littéraires - tendent à démontrer que,
durant le XIIIe siècle av. J.C., le contrôle
égyptien sur Canaan était plus étroit que
jamais. Au moindre trouble, l'armée égyptienne aurait
traversé le désert du Sinaï en longeant le
littoral méditerranéen pour marcher contre les
cités rebelles ou les peuples insurgés.
On imagine mal les garnisons égyptiennes, chargées de
la sécurité de Canaan, se tourner les pouces pendant
qu'une horde de réfugiés (échappés
d'Égypte) répandait la terreur à travers toute
la province.
page 101.
Les trompettes ont-elles vraiment
retenti ?
Nous le disions plus haut, les cités de Canaan
n'étaient pas fortifiées : aucune muraille ne
pouvait donc s'écrouler. Dans le cas de Jéricho, la
situation est encore plus simple, car on n'y décèle pas
la moindre trace d'occupation au XIIIe
siècle av. J.C. ; l'habitat
précédent, du Bronze récent, date du
XIVe siècle ; très modeste,
pauvre, presque insignifiant, il ne comportait pas de mur d'enceinte.
Il ne révèle non plus aucune trace de destruction. Par
conséquent, la fameuse scène des forces
israélites, massées derrière l'Arche d'alliance,
en train de défiler autour des puissantes murailles,
lesquelles s'écroulent quand retentissent les trompettes de
guerre, se révèle n'être rien de mieux, pour
parler simplement, qu'un mirage romanesque.
Nouveau retour vers le futur
p.113. Cette accumulation progressive de contes et de
légendes - et leur incorporation finale dans une chanson
de geste unique et cohérente porteuse d'un message
théologique précis - fut le résultat de
cette période d'intense créativité et de grande
production littéraire qui caractérisa le royaume de
Juda pendant le VIIe
siècle av. J.C. L'indice le plus probant que le
livre de Josué fut bien écrit à cette
époque nous est fourni par la liste des villes appartenant au
territoire de la tribu de Juda Josué 15.21-62. Cette liste correspond exactement aux
frontières du royaume de Juda sous le règne de
Josias.
page 117.
Une nouvelle conquête de la terre
promise ?
C'est le visage du roi Josias qui se cache derrière le masque
de Josué lorsque ce dernier proclame que le peuple
d'Israël doit rester totalement séparé des peuples
natifs de la région. Le livre de Josué illustre
brillamment les soucis les plus profonds et les plus pressants du
VIIe siècle av. J.C.
page 143.
Qui étaient les
Israélites ?
Le processus que nous décrivons ici est à
l'opposé de celui que décrit la Bible :
l'émergence d'Israël fut le résultat, non la
cause, de l'effondrement de la culture cananéenne. La plupart
des Israélites ne venaient pas de l'extérieur de
Canaan ; ils étaient indigènes. Il n'y a pas eu
d'exode de masse en provenance de l'Égypte. Le pays de Canaan
n'a pas été conquis par la violence. La plupart de ceux
qui ont constitué le premier noyau d'Israël
étaient des gens du cru, ceux-là mêmes qui
peuplaient les hautes terres durant les âges du Bronze et du
Fer. Les premiers Israélites étaient - comble de
l'ironie - d'origine cananéenne !
L'exil et le
retour
page 351.
La reconstruction de l'histoire
d'Israël
L'histoire de l'Exode devint particulièrement signifiante
pendant et après l'exil. Le récit de cette
libération devait exercer une fascination sur les
exilés de Babylone. Comme le fait remarquer le bibliste David Clines : « L'esclavage en Égypte rejoint leur
propre esclavage à Babylone et l'Exode du passé devient
l'exode qui n'a pas encore eu lieu ».
Bien plus, la similitude des
récits de l'Exode égyptien et du retour de Babylone dénote une probable
influence réciproque. La sage de l'Exode faisait écho
à leur propre situation de rapatriés. D'après
Yair Hoffman, bibliste attaché à
l'université de Tel-Aviv, les deux récits racontent
comment les Israélites avaient quitté leur terre pour
un pays étranger ; comment cette terre d'Israël
était censée appartenir à ceux qui l'avaient
quittée ; comment ces derniers devaient y revenir en
raison de la promesse divine ; comment, après un
douloureux séjour en exil, ils retournèrent dans leur
pays de naissance ; comment sur le chemin du retour, les
rapatriés durent traverser un dangereux désert ;
comment leur rapatriement entraîna des conflits avec la
population locale ; comment les rapatriés
réussirent à occuper une partie seulement de la Terre
promise ; et comment les chefs des rapatriés prirent les
mesures qui s'imposaient pour éviter aux Israélites de
s'assimiler aux peuples de la terre.
Ainsi l'histoire d'Abraham
qui avait émigré de
Mésopotamie vers la Terre promise de Canaan pour y devenir un
grand homme et y bâtir une nation prospère devait aller
droit au coeur du peuple, pendant et après l'exil.
L'avenir de
l'Israël biblique
page 358.
L'intégrité de la Bible et, en fait, son historicité, ne se fondent
pas sur les preuves historiques d'événements ou de
personnages donnés, comme le partage des eaux de la mer Rouge,
les sonneries de trompettes qui abattirent les murs de
Jéricho, ou David tuant Goliath d'un seul jet de fronde. Le
pouvoir de la saga biblique repose sur le fait qu'elle est
l'expression cohérente et irrésistible de thèmes
éternels et fondamentaux : la libération d'un
peuple, la résistance permanente à l'oppression, la
quête de l'égalité sociale, etc.
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