On a parfois de la difficulté à parler de Dieu, de la foi chrétienne, à nos enfants et petits-enfants, à nos contemporains. Il se produit des blocages. Dans nos Églises, bien des parents n’envoient plus leurs enfants à l’école biblique ou au catéchisme, non pas tant parce qu’ils n’ont pas le temps (ils ont bien le temps de faire du judo ou du piano) mais parce qu’ils trouvent que ce que nous leur enseignerons n’a pas grand intérêt dans la vie actuelle et peut même s’avérer aliénant : « quels dogmes incroyable allez-vous leur faire entrer dans le crâne ? ».
Nos contemporains se font souvent une idée caricaturale de Dieu : un tout-puissant céleste intervenant parfois souverainement dans nos vies, dans l’histoire des hommes de manière incompréhensible et manifestant une volonté et des exigences éthiques qui nous semblent étranges et bien éloignées de notre réalité quotidienne. Comme disait un enfant : « la foi c’est croire des choses dont on sait bien que ce n’est pas vrai »
J’ai rencontré le philosophe Comte Sponville, pourtant très humain et fort sympathique déclarer à la radio Fréquence protestante qu’il était athée car il ne pouvait pas croire à l’existence d’un Dieu tout-puissant qui organisait ou permettait les tsunamis, les catastrophes, les cancers... Alors qu’il sortait du studio, nous avons échangé quelques mots - dans une ambiance d’ailleurs très courtoise. Je lui ai dit que moi non plus je ne croyais pas en un tel Dieu. Mais il m’a surpris en répondant qu’il n’y avait pas d’autre Dieu que celui-là et que d’ailleurs il n’existait pas !
Je crois, justement en un autre Dieu que ce Jupiter terrifiant. Je dialogue intérieurement avec Comte Sponville, avec moi-même, avec les idées que j’ai eues jadis et que je n’ai plus, avec des gens que je rencontre qui émettent - pour les rejeter - les idées qu’ils ont reçues jadis dans les cours de récréation de leur école...
Naturellement l’important est l’idée que l’on élabore soi-même après avoir lu, débattu avec les autres.
Dieu
Croirai-je en un Dieu tout-puissant ? Mais ses interventions sont si rares et si incompréhensibles qu’il me semble plus raisonnable de ne pas trop compter sur lui !
Je dirais plutôt : Une force monte en nous, on peut facilement l'expérimenter lorsqu’on a des difficultés, des angoisses, des souffrances.
Un apaisement monte en nous lorsqu’on a des occasions de stress, de colère, de haine.
Une fraternité monte en nous alors que les personnes devant nous ne méritent, pensons-nous, que mépris, agressivité, vengeance.
Cet élan, ce souffle, cette force qui nous dépasse, est, au fond de nous, la Source de la vie. Elle est plus que nous mais elle n'est pas sans nous. Elle nous permet d’affronter les forces de mort qui nous agressent et nous tirent vers le bas, nous dépriment et nous déshumanisent. C’est le Dieu de vie, le Dieu qui nous rend humains.
Il est plus que nous, il n'est pas sans nous, il est en nous.
La prière se fait, en nous, méditation. Prendre conscience de cette Présence en nous, regarder le monde, la vie, notre existence avec le regard même que Jésus nous a enseigné. Enracinement dans son éternelle activité créatrice, responsabilisation, mobilisation, apaisement…
Et si quelqu’un me suggère de demander à Dieu de s’occuper des malheurs de ce monde, je lui réponds que justement Dieu vient de me demander de le faire !
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Jésus-Christ
Croirai-je en un Dieu ou un Fils de Dieu aux pouvoirs surnaturels, marchant sur l’eau, guérissant les malades, multipliant les pains et puis quittant le monde des hommes sans communiquer à personne ces pouvoirs pourtant si bienfaisants ?
Croirai-je en un Fils sacrifiant volontairement sa vie en une mort atroce afin d'apaiser un Dieu en rage de voir les humains se détourner de lui ?
Croirai-je en un Fondateur de religion n’acceptant que ceux qui pratiqueront certains rites difficilement compréhensibles avec du vin, de pain et de l’eau et exigeant que l’on admette certains dogmes théologiques et abstraits ?
Je dirais plutôt que l’Élan vital qui émanait de lui et ré-animait ceux qu'il rencontrait, que Souffle qu'il partageait avec ceux dont la vie s’éteignait, était l’Esprit de Dieu lui-même dont il était animé et qu’il nous révélait à la place de l’esprit légaliste et asphyxiant des intégristes juifs de son époque contre lesquels il a lutté jusqu’à la mort.
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Le salut
Croirai-je en un Paradis et un Enfer qui rétribueraient ma vie présente ? Devrais-je me préoccuper de mon salut éternel ? Réciter des litanies, demander à la Vierge de prier pour moi maintenant et à l’heure de ma mort ? Déposer avec conviction mes « péchés » au pied de la croix ? Confesser la divinité de Jésus et la proximité de son retour en gloire ? Ou au contraire affirmer que Mohamed est le prophète ?
Je dirais plutôt qu’en nous manifestant le dynamisme créateur de Dieu, son esprit de paix et de fraternité qui nous libère de nos tabous, de nos blocages, de nos angoisses et de nos dépressions, Jésus n’a jamais dit que nous devions nous préoccuper de solliciter le pardon ou l’attention de Dieu, que nous devions adhérer à certains dogmes ou pratiquer certains rites nécessaires à nous obtenir la bienveillance et l’indulgence de Dieu. C’est dans la confiance que je me laisse réorienter, relever, encourager, fortifier et mobiliser par l’élan vital dont je sens bien que Dieu le fait monter en moi, comme il le fait en « tout ce qui respire ».
Je suis d’ailleurs bien certain que cette vie ainsi renouvelée n’a certainement pas pour but de me faire acquérir un billet d’entrée au Paradis de Dieu !
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Euthanasie
Croirai-je que la vie est un don de Dieu sacré dès sa conception et que lui seul peut la reprendre ? Refuserai-je alors les techniques de contraception non « naturelles », les fécondations artificielles, les IVG et l’euthanasie ?
Je dirais plutôt que ces conceptions s'enracinent trop dans la philosophie païenne grecque d'Hippocrate. Les pays protestants ne l’ont jamais partagée. Il y a longtemps que les femmes françaises se rendaient dans les pays d’accueil traditionnel, en Angleterre, aux Pays-Bas et en Suisse pour des IVG et pour y acheter ou en faire venir les moyens anticonceptionnels gérés par le Planning Familial. Les Pays-Bas, la Suisse, la Suède, la Grande-Bretagne ont déjà légalisé ou admis l’euthanasie active.ou le suicide assisté.
Le monde protestant trouve dans la lecture de la Bible l’idée que la vie que donne Dieu n’est en tous cas pas purement physiologique ou biologique. Elle est tissée d’amour et de la chaleur de relations humaines, comme le ministère de Jésus le montre bien : vie épanouie, apaisée et digne. C’est la vie du paralysé guéri, de la prostituée réhabilitée. Devant Dieu, l’homme ne se réduit pas à une vie physique mais à la vie renouvelée et portée par la présence intérieure du saint Esprit. On ne peut pas dire que seul Dieu peut reprend à sa guise la vie qu’il a donnée : Jésus ne fait jamais mourir.
Jésus souligne cette présence aimante : « Ne vend-on pas deux moineaux pour un sou ? Cependant, il n'en tombe pas un à terre sans votre Père. Et même les cheveux de votre tête sont tous comptés. » Matthieu 10.29
Certains traducteurs ont compris que c'était Dieu qui faisait tomber les cheveux des chauves et mourir les oiseaux : ils ont ajouté dans le texte le mot que Jésus n'avait justement pas prononcé : sans la « volonté » de votre Père. Mais Jésus disait « seulement » que Dieu est le père aimant qui accompagne même les moineaux dans leur chute.
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