Protestants dans la Ville
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Connaissance de la Bible
« La Reine
de la nuit », plaquette de terre cuite
Babylone
Gilles
Castelnau
28 mars 2008
L'histoire et la
culture de la Mésopotamie,
entre l'Euphrate et le Tigre (l'actuel
Irak), ont exercé une profonde influence sur
la vie et la pensée du peuple de l'Ancien
Testament.
Au sud, le royaume de Babylone avec la
ville du même nom (près de l'actuelle
Bagdad), Uruk, la ville du fameux Gilgamesh
et Ur, où le livre de la Genèse situe la
naissance d'Abraham (près de l'actuelle
Bassora) ainsi que la ville de Suze.
Au nord, le royaume d'Assyrie avec les
villes d'Assour et Ninive (près de
l'actuelle Mossoul) et Mari (aujourd'hui en
Syrie).
- Au 18e siècle av. JC,
Babylone était la grande puissance
religieuse et culturelle de Mésopotamie avec
son roi Hammourabi.
Le code qu'il publia aura une grande
importance et on en retrouvera les traces
dans la Loi israélite :
« Si un homme a
crevé l'oeil d'un homme libre, on lui
crèvera un oeil » § 196.
Le
Code de
Hammurabi, musée
du Louvre
.
- Au 8e siècle av. JC,
l''Assyrie, supplanta Babylone. Le
roi Salmanassar (on dit aussi
Sargon II) envahit le nord
d'Israël (Actuelle
Galilée-Samarie) et en déporta la
population en 721 av. JC.
(2 Rois 15.29
et 17.5). Il commença la même
année la construction d'un grand
palais à Khorsabad (au nord du
pays, près de l'actuelle Mossoul).
Les malheureux déportés y ont
peut-être participé. On pensera à
eux en admirant les énormes et
magnifiques taureaux à têtes
humaines gardiens des abords, dont
certains sont actuellement au
Louvre.
Taureaux du palais de Khorsabad au Louvre
Plus tard, Assurbanipal
(Sardanapale) roi d'Assyrie
de 669 à
627 av. J.-C. fut un
homme de grande culture et fonda
une splendide bibliothèque dans
sa capitale de Ninive. C'est là
que l'on a, en particulier,
retrouvé les tablettes écrites
en cunéiforme du récit de la
création du monde d' « Enuma
Elish » et de
l' « Épopée
de Gilgamesh » qui
contient notamment le récit du
Déluge avec le personnage d'Uta-Napishtim
équivalent de Noé.
.
- A la mort
d'Assurbanipal,
Babylone redevint la puissance
dominante de Mésopotamie. Nabuchodonosor,
roi de 605
à 562 av. JC, fonda
l'empire néo-babylonien. Il fit
construire le palais royal de
Babylone, les temples, la grande
ziggourat (la « tour
de Babel ») et la
« Voie
processionnelle »
partant de la « Porte
d'Ishtar ».
La porte d'Ishtar reconstituée au musée de
Berlin
C'est lui qui envahit
Jérusalem et Juda et en
déporta la population, en un
Exil qui dura de 587
à 538 av. JC. Il
faut imaginer la foule des
déportés pénétrant dans
Babylone par la porte d'Ishtar
et la voie processionnelle,
impressionnés par sa grandeur
et la beauté de ses briques
vernissées.
Le Psaume 137 chante le
désespoir et la haine des
exilés :
Sur les
bords des fleuves de
Babylone,
Nous étions assis et nous
pleurions,
En nous souvenant de Sion.
Aux saules de la contrée
Nous avions suspendu nos
harpes.
Là,
nos vainqueurs nous
demandaient des chants,
Et nos oppresseurs de la
joie :
Chantez-nous donc des
cantiques de Sion !
Comment chanterions-nous
les cantiques de Éternel
Sur une terre
étrangère ? ...
Babylone, heureux qui
saisira tes enfants,
Et les écrasera sur les
rochers !
Il est vrai que
l'identité nationale et
spirituelle israélite
était menacée dans la
mesure où elle était
centrée sur deux monuments
qui venaient d'être
détruits par les
Babyloniens : le
Temple de Jérusalem,
symbole de la présence de
Dieu et le palais royal,
résidence du roi qui était
l' « oint »
de Dieu (« messie »
en hébreu, « christ »
en grec). Le Dieu de
Babylone, Mardouk,
semblait supplanter Yahvé !
C'est
alors que des théologiens
juifs élaborèrent une
religion transportable
partout, centrée sur la
circoncision,
l'alimentation cachère,
les lois de pureté
rituelles, les fêtes.
Les grands mythes
babyloniens de la Création
du monde, du Déluge
furent repensés en une
théologie fidèle à la
tradition hébraïque. On
expliqua par le récit de
la Tour
de Babel l'existence
de la grande ziggourat. On
raconta qu'Abraham était
originaire de la ville d'Ur
et n'avais jamais lui non
plus possédé la Terre
d'Israël.
On rédigea notamment les
livres bibliques de la Genèse
de l'Exode,
les livres dits
« historiques »
de
Josué, Juges, Samuel, Rois.
Voir l'introduction
à l'Ancien Testament.
Voici, par exemple un
passage de l'Épopée de
Gilgamesh racontant
comment Utanapishtim (le
Noé de la Bible) ayant
échappé au Déluge indiqua
à Gilgamesh comment se
procurer l'immortalité.
Pourquoi
les hommes doivent-ils
mourir ?
Le récit de la Genèse dit
qu'Adam et Ève ont été
expulsés du Jardin d'Eden
où l'on peut manger les
fruits de l'arbre de vie
procurant l'immortalité
(fruits dont l'auteur du
livre de l'Apocalypse dira
qu'ils pousseront à
profusion dans la
« nouvelle
Jérusalem ») car ils
ont « mangé le fruit
défendu »,
c'est-à-dire se sont
conduits comme la Loi
l'interdit.
L'Épopée de Gilgamesh dit
que celui-ci s'est laissé
dérober stupidement et par
étourderie le fruit
procurant l'immortalité
qu'il avait pourtant
acquis avec une habileté
et un courage remarquable.
On comprend que l'auteur
de la Genèse ait voulu
réagir au mythe de
Gilgamesh et en ait donné
une version plus
théologiquement correcte.
Voici le récit découvert
dans la bibliothèque du
roi Assurbanipal.
Utanapishtîm
dit :
- Gilgamesh tu es
venu ici, tu a peiné,
as fait grand voyage.
Que te donnerais-je
pour t'en retourner au
pays ? J
Je vais te révéler
cette chose cachée,
t'informer, toi, d'une
chose réservée aux
dieux.
Il est une plante, une
sorte d'épine,
Qui te meurtrira les
mains comme une rose,
Mais qui, si tes mains
s'en emparent, te
donnera la vie.
À
ces mots Gilgamesh
creuse à ses pieds
pour trouver de
lourdes pierres,
dont il s'empare et
qui l'entraînent
jusqu'au fond de la
mer, où il trouve la
plante, qui lui
pique les mains.
S'étant libéré de
ses pierres il
remonte et la mer le
repousse au rivage.
Il brandit la plante
et dit :
- Voici la
plante qui guérit de
la peur de la mort.
Grâce à elle on
retrouve la
vitalité.
Je l'emporte à Uruk,
Je verrais si cela
marche sur un
vieillard
Et j'en absorberais
moi même
Pour retrouver ma
jeunesse�
Ils
partent pour Uruk.
Gilgamesh,
ayant aperçu un
trou d'eau
fraîche
S'y jeta pour se
baigner.
Un serpent,
attiré par
l'odeur de la
plante,
Sortit
furtivement de
son terrier,
l'emporta et en
s'en retournant,
rejeta ses
écailles.
Gilgamesh
demeura là,
prostré, il
pleura,
Les larmes
ruisselant sur
ses joue, il
dit :
- Pour
qui mes bras
se sont ils
épuisés ?
Pour qui le
sang de mon
coeur a-t-il
coulé ?
Je n'en ai
tiré aucun
avantage.
.
- En
539 av. JC,
le roi des
Perse, Cyrus,
attaqua et envahit
Babylone en ainsi
que tout le
Moyen-Orient. Il
libéra les peuples
déportés et fit
lui-même
reconstruire le
temple de Jérusalem.
Dans son
enthousiasme, le
prophète Ésaïe lui
donne le titre de
Messie :
Ainsi
parle l'Éternel
à son messie, à
Cyrus, qu'il
tient par la
main...
Je marcherai
devant toi...
afin que tu
saches que je
suis Éternel
et que je
t'appelle par
ton
nom,
(Es. 45.1)
La tolérance de
l'immense Empire
perse,
centralisé mais
acceptant la
diversité des
différents
cultes ouvrit
l'esprit des
théologiens à
l'idée nouvelle
du
monothéisme :
jusque là il
était admis
(c'était
l'hénothéisme)
que chaque
peuple avait son
Dieu et ne
devait pas
adorer les
autres
Dieux : « Tu n'auras pas d'autres Dieux devant ma
face »,
disait le
premier des Dix
Commandements.
Désormais on
comprit qu'il
n'y avait qu'un
seul Dieu, le
même pour tous
les hommes.
En fait le
retour des Juifs
en Palestine ne
fut pas
triomphal. Le
pays était
occupé par des
populations
étrangères, la
reconstruction
du Temple avec
Esdras et
Néhémie ne fut
pas facile et
nombreux furent
les Juifs qui
préférèrent
demeurer à
Babylone où
finalement ils
ne se trouvaient
pas si mal. Plus
tard la partie
la plus
importante du
Talmud y fut
même écrite.
C'est à ce
moment que l'on
rajouta dans
l'histoire
d'Abraham que
celui-ci n'avait
pas voulu que
son fils Isaac
épouse une fille
du pays et qu'il
avait envoyé
Eliézer à
Babylone pour en
ramener celle
qui deviendrait
sa
belle-fille. (Genèse 24)
- En 332 c'est Alexandre le Grand qui envahit
Babylone
et établit son
empire jusqu'à
l'Égypte,
l'Afghanistan
et à l'Indus.
Il aimait
Babylone et
l'agrandit
encore. C'est
là qu'il
mourut à l'âge
de
33 ans.
- Babylone la ville maudite
.
Au
premier siècle
de notre ère
encore, le
Voyant de
l'Apocalypse
surnommait « Babylone » la ville de Rome
persécutrice
des chrétiens
et en
annonçait sa
destruction :
Elle
est tombée,
elle est
tombée,
Babylone la
grande !
Elle est
devenue une
habitation de
démons,
un repaire de
tout esprit
impur,
un repaire de
tout oiseau
impur et
odieux, (Apo 18.2)
Et
les peintres
s'en donnaient
à coeur joie
de peindre la
« Tour de
Babel »
symbole de
l'orgueil
humain.
Bruegel l'Ancien, La
Tour de Babel, vers 1563
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