1
La vie
1
La vie est tout.
La vie est tout ce qui compte
pour les
êtres humains.
2 Il n'y a
rien d'autre.
La vie ne dépend de rien ni de
personne, elle n'a pas été
créée. Il n'y
a pas d'au-delà.
3 La vie ne
dépend que
d'elle-même.
Il n'y a pas d'extérieur au
monde.
Tout est immanence, déjà là.
Quand on
naît, on ne pénètre pas dans le
monde et quand on
meurt on ne le quitte pas. On ne
peut voir le monde et la vie de
l'extérieur.
4
La vie est Dieu
C'est tout simplement en la vie
que
« nous avons la vie, le
mouvement, et l'être ».
(Actes 17,28). C'est en
elle que nous sommes
formés, en elle que notre
souvenir demeurera. En elle est
notre origine première et notre
fin dernière. La vie
est notre Dieu.
5
Aimer la vie est aimer Dieu.
Chaque parcelle de vie est sans
prix, chaque
vie est un don sacré. Nous
devons respecter la vie comme
Dieu.
Il est frappant et émouvant de
constater à quel point
tous les êtres vivants aiment la
vie et lui sont
attachés comme nous le sommes.
2
La vie et ma
vie
1 La vie
individuelle est
participation personnelle
à la vie globale.
La relation traditionnelle de
l'âme
avec Dieu peut être comprise
comme la relation de la vie
individuelle avec la vie
globale. La préoccupation
fondamentale que l'on disait
être le salut de l'âme, peut
être dite comme la préoccupation
de la vie que l'on
mène et que l'on mènera.
2 La vie est
tout ce que nous avons et
tout ce que nous
aurons jamais.
C'est à nous seul qu'elle
appartient.
Nous avons à en être conscient
et à vivre notre
vie de manière libre et
responsable, sans chercher de
faux
fuyant.
3 Tous les
hommes ont droit à la
vie.
Cette conviction fonde
l'importance de la
justice et de l'amour. Le
meurtre et toute atteinte à la
vie
est également grave, quelque
soit la victime. L'amour de Dieu
est amour de la vie, de tout
être vivant et pas seulement des
hommes.
4
La justice est première en
droit mais en l'amour est
premier
en importance.
L'amour est premier mais il ne
peut exister
sans la justice car c'est elle
qui lui donne sa place.
3
Les limites de
la
vie
1 La vie est
limitée dans la durée.
On ne peut avoir qu'un « aller
simple » sans
retour. Chaque instant de la vie
est
final ; chaque occasion est
unique.
2
Dans la vie rien n'est
jamais immuable et
irrévocable,
éternel.
Tout est toujours contingent.
C'est
delà que vient l'impression de
hasard et de destin.
3 Le sens que
paraît avoir la vie n'existe
pas en
soi.
Il est créé par le langage que
les hommes élaborent. Et c'est
ce langage qui nous permet
d'expliquer le monde.
4
Lorsqu'une vie individuelle
prend fin, la vie globale se
poursuit.
Notre rôle est d'aimer tout
simplement
la vie et lui dire
« oui »
jusqu'à notre dernier jour. Nous
n'avons pas à nous
préparer à la mort.
4
Avoir foi en la
vie
1
Aimer la vie et se confier
en elle implique qu'on
l'accepte telle
qu'elle est, avec ses
limites.
La théologie considère
traditionnellement que le « mal »
a fait intrusion de l'extérieur
dans un monde
originellement parfait et qu'il
faut l'éliminer. Nous disons
tout simplement que la vie a des
limites qui font partie
d'elle-même. La vie n'est pas
Dieu. Elle est finie, imparfaite
et il faut l'accepter telle
qu'elle est, faute de quoi on
sombre dans
le nihilisme ou le pessimisme,
ce qui n'est pas acceptable.
2 La vie ne
peut pas être
négociée.
Il n'y a d'ailleurs personne
avec qui
négocier. La vie doit être
acceptée telle qu'elle
nous est donnée.
3 La vie est
aigre-douce, ce qui est au
demeurant
préférable à une pure
douceur.
Dans l'imagerie classique du
Paradis, tout
le monde a 30 ans, tout le
monde est semblable et tout est
d'une
immobilité de mort à l'image des
fleurs en plastique
sur les tombes. Mais on peut
aimer les imperfections de la
vraie vie,
ses irrégularités, ses grains de
beauté, les
signes de sa fragilité et de la
vieillesse. La
réalité mortelle de la vie est
plus belle qu'une
immobilité idéale.
4 Il ne faut
jamais se plaindre, ni même
songer
à se plaindre.
Il faut aimer la vie tout
simplement comme
elle est. Tout le monde reçoit
le même don de la vie et
il n'y a rien d'autres à
attendre. On n'est jamais
victime de
la vie. Il ne faut jamais dire,
ni même penser
« pourquoi
moi ? »
5
Penser
« solairement »
1
La vie
est un don (sans donateur)
qui
est renouvelé chaque jour.
La vraie religion est
« solaire ».
Par la foi je m'efforce de
laisser sans restriction
la vie se couler en moi et
s'exprimer de mille manières
visibles.
2
Vivre solidairement de la
mort.
Comprendre la vie de manière
« solaire »
signifie que l'on accepte de
laisser en permanence
derrière soi une partie de
nous-même, que l'on est
dépréoccupé de soi-même et de sa
propre
vie car on prend conscience que
celle-ci ne fait que passer.
Notre être et tout ce à quoi
nous sommes attaché disparaît
sans cesse et se
renouvelle. La mort n'est pas
une menace, elle engendre la
vie. On
vit de la mort.
3 La
compréhension
« solaire » de la
vie est source de
joie.
Dans notre recherche
d'identité, nos
intérêts et nos oeuvres, la joie
nous vient des abandons
que nous ne cessons d'accepter
et des renouveaux qui nous sont
offerts. Cette joie prend la
place du « Bien
suprême » de la
pensée traditionnelle.
4 Le
« Bien suprême »
doit
être abandonné.
Il est, lui aussi,
essentiellement passager.
La vie que nous vivons a sa
valeur en soi. Il faut seulement
la
laisser se dérouler.
6
La fin du monde
« réel »
Ceux qui affirment la
nécessité de respecter la
« réalité »
le font par la force de
l'habitude ou tout
simplement pour conserver le
pouvoir.
1 La
« réalité »
n'existe pas.
La permanence et
l'invariabilité que
l'on croit constater dans le
monde
« réel »
extérieur
ne
sont en fait que des
apparences qu'entretiennent la
paresse
intellectuelle et le manque de
réflexion. Ce sont des
ornières dans lesquelles on
s'embourbe après les avoir
soi-même creusées.
2 La
« réalité »
n'existe pas à l'extérieur
de nous.
Il n'existe pas de Réalité
extérieure qui serait
gardienne de la vérité
absolue et de la signification
de toutes choses. C'est
l'esprit
humain qui élabore sa
compréhension des choses et ce
sont les pensées justes qui
découvrent la
vérité. Dans un monde en
mutation perpétuelle,
celle-ci est, d'ailleurs,
toujours nouvelle.
3 Nous
sommes les seuls
Créateurs.
Au fur et à mesure que notre
esprit
critique s'éveille, le monde
prétendument
« réel » s'estompe et
son illusion apparaît. La
véritable
réalité est ce que nous en
faisons : internet, nos
activités et nos débats
quotidiens.
4
Nihilisme et liberté
créatrice.
Le fait qu'il n'y ait pas
de monde
réel et permanent et que
nous ne soyons pas
nous-mêmes
indestructibles et immortels
n'a rien de désespérant.
Cela nous offre au contraire
la possibilité d'améliorer
les choses et de nous
renouveler nous-même.
Cette conception « solaire »
nous permet
d'apporter une petite
contribution au monde en
nous impliquant
nous-même dans la vie.
7
La vie qui
s'écoule
Libres
de toute attache mais
aimant la
vie jusqu'au bout,
nous sommes
capables, à la fin de notre
âge, d'entrer dans le grand
fleuve de la vie qui
s'écoule. La seule manière
raisonnable de nous préparer
à la mort est de pratiquer
la vie « solaire ».
Traduction
Gilles
Castelnau
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