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Sur le seuil

Les protestants au défi du témoignage

 

pasteur Laurent Schlumberger

 

Ed. Olivétan

88 pages,   16 €

 

Recension Gilles Castelnau

 

2 juillet 2016

Le pasteur Laurent Schlumberger a été plusieurs années président du Conseil Régional de la Région Ouest de l’Église réformée de France et il s’est rendu compte de la difficulté que rencontre actuellement le protestantisme pour demeurer connu.
Dans un langage très clair et agréable à lire, il analyse d’abord la situation des Églises protestantes - dont les catholiques trouveront sans doute qu’elle est semblable à la leur - puis il propose un nouvel esprit, largement inspiré des réflexions des travaux de l’école américaine de Palo Alto. Ceci est la réédition de l'ouvrage paru en 20015.

Il intéressera les fidèles qui vont à l’église. Il fera peut-être comprendre à ceux qui n’y vont plus les raisons de leur désamours.

Voici quelques passages de son petit livre :

 

page 27

On n’a plus besoin des Églises pour croire
[...]
Si croyance et appartenance sont séparées, cela signifie que l'on peut croire sans appartenir. L'individu construit son propre système de convictions en empruntant aux courants qu'il rencontre et non pas en se référant à une institution unique. Il construit son tableau de significations à la manière impressionniste ou pointilliste, il choisit ses références spirituelles « à la carte », non pas en fonction des injonctions d'une tradition donnée, mais selon ce qui fait sens aujourd'hui pour lui. Il pourra par exemple combiner la croyance en un « karma » avec le souci écologique, l'amour du prochain et la croyance au progrès, le tout dans un vocabulaire ou des références culturelles celtes, sans pour autant inscrire ces choix dans aucune communauté. Ici, l'expérience prime sur la cohérence, l'émotion sur la réflexion, le sentiment d'authenticité sur la durée.
Mais dire que croyance et appartenance sont séparées, cela signifie aussi que l'on peut appartenir sans croire.
[...]
Pour l'individu contemporain fragilisé, la secte ou l'Église sectaire joue le même rôle que la bande de jeunes, le club de supporters, l'ultra-militantisme gay ou le groupe ethnique. Elle n'attire pas tant par sa doctrine que par la sécurité qu'elle offre. Plus le groupe enserrera l'individu en le distinguant de l'entourage, plus elle lui donnera ce sentiment d'existence et de sécurité. À la manière d'un entrepreneur dynamique qui exploite une niche d'un marché, plus le leader créera de la dépendance en cultivant émotion, autorité et relation personnelle, plus il attirera. C'est pourquoi, même si je le regrette, le protestantisme fondamentaliste, émotif et moralement rigide, a de beaux jours devant lui.

 

page 58

Sortir d'une alternative paralysante

Changeons notre culture d'Église
[...]
En caricaturant le trait, on pourrait dire que le protestantisme est confronté à une alternative mortelle. D'un côté, il y a le protestantisme historique, disons : le protestantisme luthéro-réformé. Il se caractérise notamment par une pensée riche et pertinente. Les convictions y sont articulées avec précision. La nuance est reine. Le dialogue avec la culture y est entretenu et valorisé. La réflexion y est élevée. Mais la vie de l'Église y est souvent terriblement étroite. Le vocabulaire est réservé aux initiés. Le répertoire musical semble quasiment immuable. Les activités sont confidentielles. Le fonctionnement est participatif, mais à condition qu'on ait montré patte blanche. L'émotion et le corps sont étroitement bridés. Les vieilles pierres sont vénérées. L'héritage du passé est survalorisé.

D'un autre côté, il y a le protestantisme dit évangélique, plus ou moins « relevé » de transculturel (anglo-saxon, asiatique, africain, etc.) et de pentecôtisme. La pensée y est plus sommaire. Les convictions sont carrées. La rupture est valorisée. La culture et la réflexion sont assez volontiers suspectées. Mais la vie de l'Église y est très évolutive. Les nouveautés dans ce domaine sont non seulement accueillies mais recherchées. L'expérience de chacun est admise et plus encore sollicitée. Le vocabulaire, les locaux, les activités sont largement ouverts, même s'ils restent souvent contrôlés par des dirigeants à l'autorité ombrageuse. Les sentiments et même la sentimentalité sont bienvenus et pris en compte. Les hangars réaménagés sont appréciés. La fidélité qui compte n'est pas tant celle que l'on doit au passé qu'à l'avenir.

Bref, l'alternative offerte au protestantisme semble être la suivante : ou bien des convictions nuancées et pertinentes, qui s'expriment sur un mode sclérosé ; ou bien des formes de vie d'Église adaptées à notre temps, qui s'adossent à des convictions rigides et étroites.

Étant bien entendu qu'il s'agit là de deux extrêmes entre lesquels toutes les nuances existent, cette typologie est opératoire et notamment éclaire la fascination et la répulsion des protestants « historiques » à l'égard des protestants « évangéliques », qui se traduisent par du mépris parfois, du suivisme d'autres fois, et le plus souvent par un mutisme pétrifié.

Or, je ne crois pas que nous soyons condamnés à cette alternative. Je fais le pari non seulement que nous devons mais aussi que nous pouvons modifier notre culture d'Église, afin de traduire nos convictions dans des formes profondément renouvelées. Ce renouvellement se fera si nous avons chevillé à l'âme le souci prioritaire de rendre ces convictions accessibles à des non-initiés.
[...]

 

Toute communication est composée de contenu et de relation, telle que la seconde englobe le premier
[...]
Une communauté chrétienne qui déclare vouloir faire leur place aux jeunes, mais qui ne leur fournit pas de local ou dont les membres jettent un regard courroucé aux parents d'un enfant qui babille pendant le culte, est une communauté qui donne un message très clair aux jeunes, mais pas celui qu'elle croit.

La relation prime sur le contenu, le recadre et lui donne son sens véritable. Une communauté chrétienne qui entend proclamer l'Évangile, c'est-à-dire communiquer un certain message, doit prendre conscience que les mots qu'elle emploie seront lus à la lumière de la relation qu'elle noue avec ceux à qui elle s'adresse. Pas l'inverse.

 

 

page 66

Passer d'une Église de membres à une Église de témoins
[...]
L'Église existe  pour ceux qui n'y sont pas
[...]
La Bible représente depuis quelques années un phénomène d'édition. Les traductions se multiplient, les émissions télévisées font des succès d'audience, les hypermarchés ont des Bibles et des ouvrages para-bibliques sur leurs gondoles, les formations qui s'adressent de manière non-confessionnelle à des personnes qui ont envie de découvrir ces textes font le plein. Bref, il y a un réel engouement, une attente quasi-mesurable de la part de nos contemporains. Pendant ce temps, nous nous contentons, la plupart du temps, d'offrir des études bibliques (quel titre alléchant pour des gens qui n'y connaissent rien !), à des heures impossibles (quelle mère de famille, quel banlieusard rentrant chez lui à 20 h, seront disponibles à 20 h 30 ?), dans des lieux introuvables (j'ai vu des études bibliques organisées dans des arrière-salles auxquelles on accédait par des temples plongés dans la nuit).

Je force à peine le trait. Nos Églises s'organisent et vivent en fonction de leurs membres connus et même de leurs membres assidus. C'est à ce public-là qu'elles offrent prioritairement et avec constance leurs services. Ce faisant, elles dressent des murailles autour d'elles, car il faut être bien téméraire pour franchir tous ces obstacles et vouloir quand même s'intégrer à la communauté.

[...]

Outil : le recentrage de la vie communautaire sur la mission

Comment faire ? C'est assez simple : prenons concrètement au sérieux la conviction selon laquelle l'Église est missionnaire ou n'est pas. Ainsi, l'Église réformée de France place en tête de ses textes constitutifs qu'elle « a pour raison d'être d'annoncer l'Évangile au monde » (article premier de sa Discipline) et il est très aisé à une de ses Églises locales d'examiner toute son activité à la lumière de cette conviction fondatrice. La difficulté, très réelle cette fois, sera seulement de tirer les conséquences de cet examen, d'aller jusqu'au bout de la démarche, pour ne pas se payer de mots mais pour réformer sa vie concrète !

La méthode suivante a déjà été expérimentée :

1. Toutes les activités d'une Église locale sont listées, sans exception, du conseil presbytéral au thé de l'amitié, de l'entretien des immeubles au culte, de la catéchèse au bulletin paroissial, etc.

2. Les membres de chaque activité sont invités à se retrouver entre eux. Car c'est à eux qu'il appartient de faire ce travail et non pas à je ne sais quels inspecteurs qui viendraient distribuer de bons ou de mauvais points. Deux questions sont posées :
. a) Si cette activité n'existait pas, est-ce que, en vue de l'annonce de l'Évangile au monde, qui est la raison d'être de notre communauté, nous nous lancerions aujourd'hui dans cette activité ? Si la réponse est non, que fait-on ?
. b) Si la réponse est oui, alors demandons-nous: si nous nous lancions aujourd'hui dans cette activité, est-ce que nous la mènerions de la manière dont nous la menons aujourd'hui ? Si la réponse est non, que fait-on ?

Il appartient bien sûr au conseil qui gouverne l'Église de lancer ce processus, d'y veiller et d'en coordonner les résultats. C'est tout ! Ce sont des questions toutes simples, mais extrêmement fécondes, pourvu qu'on y réponde en vérité et qu'on tire sérieusement les conséquences des réponses que l'on apporte.

 


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