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Le droit d'emmerder Dieu

Richard Malka


Ed. Grasset
96 pages - 10 €

Recension Gilles Castelnau


20 juillet 2022

 

Richard Malka a prononcé la plaidoirie de soutien à Charlie Hebdo le 4 décembre 2020, au grand procès des attentats de 2015.

Avec verve et passion il soutient la liberté d’expression dont la valeur a tout à fait été reconnue par la Cour.

Ses arguments remettent les pendules à l’heure pour ceux qui cherchent pour les islamistes des circonstances atténuantes et pour les caricaturistes des arguments à la « modération ».

Ce petit livre se lit d‘une traite avec intérêt et jubilation mais, une fois refermé, il laisse beaucoup à penser !

En voici quelques passages.

 

•.

 

 

Les attentats de Charlie Hebdo et de l'Hyper Cacher ne sont pas seulement des crimes. Ils ont une signification, une portée politique, philosophique, métaphysique. Les attentats commis par les frères Kouachi et par Amedy Coulibaly convergent vers la même idée. Ils sont indissociables, ils ont été préparés de concert, ils ont le même but. Quand Coulibaly tue des Juifs, il ne tue pas que des Juifs, il tue l'Autre. Le Juif, c'est l'Autre. Sous toutes les latitudes, à toutes les époques de l'humanité, de l'Égypte ancienne à l'Allemagne nazie, des ghettos de Pologne aux quartiers réservés du Maghreb, en passant par les shtetls de Bessarabie.

 

Le Juif, c'est celui qui est différent, qui garde son identité à travers les millénaires, qui refuse de se fondre. C'est l'idée de l'irréductible singularité, donc de la diversité. Charlie Hebdo aussi, c'est l'Autre. Celui qui est libre, libertaire, qui s'exprime sans entraves er, pire, qui rit de ceux dont la pensée totalitaire refuse la différence. Le sens de ces crimes, c'est 1'annihilation de l'Autre, de la différence.

 

[...]

 

Il y a quelques semaines, en Autriche, il y a eu un attentat. Or il n'y a pas de Charlie Hebdo en Autriche, il n'y a pas de caricatures en Autriche. C'est un des derniers pays européens à disposer d'une législation pénalisant le blasphème. Il n'y a pas de laïcité en Autriche ni de passé colonial. Et pourtant ils ont eu un attentat islamiste. Alors qu'est-ce que doivent abandonner les Autrichiens ? À quoi doivent-ils renoncer ?

 

Au Mozambique, début novembre, cinquante personnes, de jeunes musulmans, ont été décapités par une filiale d'Al-Qaïda, Ces malheureux n'étaient pas en train de caricaturer le prophète, ou de lire Charlie Hebdo. Qu'est-ce qu'ils auraient dû abandonner pour rester en vie ?

 

Il y a quelques jours, au Nigéria, plus de cent personnes ont été ligotées et égorgées. Des musulmans, par Boko Haram. Elles n’étaient pas non plus en train de revendiquer le droit de critiquer librement les religions. C'étaient de paisibles paysans. Qu'est-ce qu'on devrait abandonner ? La liberté, l’égalité, la fraternité ?

 

Ils détestent nos libertés, c'est Sonia Mejri qui nous l'a dit. Ce sont parmi les mots les plus forts qui ont été prononcés au cours de cette audience. Et elle sait de quoi elle parle. C'est une revenante de Syrie. Elle a été mariée à un cadre de Daech.

 

Ils détestent nos libertés et ils ne s'arrêteront pas. Et vous savez pourquoi ? Parce que nous aussi nous sommes l'Autre. Parce que nous sommes un des rares peuples au monde - c'est comme ça - à être porteur d'un autre universalisme, qui s'oppose au leur. Mais le nôtre, celui de notre révolution, est porteur de raison et de liberté, quand celui de ces fanatiques est construit sur le dogme er la soumission. Alors nous pourrions renoncer à tout ce que nous voudrons, ils ne s'arrêteront pas tant qu'ils ne nous auront pas transformés en poissons rouges tournant en rond dans un bocal.

 

 


 L’histoire du blasphème

 

C'est Clémenceau, qui, à l'Assemblée, répondra à l'évêque d'Angers invoquant la blessure des catholiques outragés : « Dieu se défendra bien lui-même, il n'a pas besoin pour cela de la Chambre des députés. » C'est quasiment cette même formule qui sera reprise plus d’un siècle plus tard par le mufti de la mosquée de Marseille à propos des caricatures de Mahomet : « Un musulman qui croit que Dieu n'est pas assez grand pour se défendre tout seul est un musulman qui doute de la toute-puissance divine et n'est pas un bon croyant. » Ce n'est pas compliqué à comprendre. Dieu peut se défendre tout seul contre les pauvres mortels que nous sommes, ce n'est pas la peine de supprimer ses créatures.

 

Alors vous voyez, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la cour, Madame et Monsieur du parquet, nous n'avons pas le choix. Renoncer à la libre critique des religions, renoncer aux caricatures de Mahomet, ce serait renoncer à notre histoire, à l'Encyclopédie, à la Révolution et aux grandes lois de la Troisième République, à l'esprit critique, à la raison, à un monde régi par les lois des hommes plutôt que par celles de Dieu. Ce serait renoncer à enseigner que l'homme est cousin du singe et ne provient pas d'un songe, renoncer aussi à ce que la Terre ne soit pas totalement ronde. Ce serait renoncer à considérer la femme comme l'égale d’un homme. Ce serait renoncer à ce que les homosexuels ne soient pas punis de mort après d'atroces supplices, et je précise que, curieusement, les 72 pays au monde où l'homosexualité reste une abomination sont à peu près les mêmes que ceux où le délit de blasphème continue à exister. Ce serait renoncer à jouer la pièce de Charb sur les escrocs de l'islamophobie qui font le jeu des racistes comme on a déjà renoncé à jouer l'Idoménée de Mozart ou le Mahomet de Voltaire parce que la peur a gagné. Les auteurs ont bien compris que, lorsque les islamistes désapprouvaient une œuvre, ils voulaient non seulement supprimer celle-ci, mais aussi l'auteur de l'œuvre. Ce serait renoncer à l'indomptable liberté humaine pour vivre enchaînés.

 

Ce serait renoncer à ce merveilleux droit d'emmerder Dieu ! Et ça Cabu, tout gentil qu'il était, eh bien il ne pouvait pas !

 

C'était ça Charlie. C'est ça Charlie. On ne renoncera pas. Jamais, jamais, jamais. Et c'est notre droit. Celui consacré par nos tribunaux. Mais également par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, il faudrait aussi y renoncer ? C'est ce qui lie des centaines de millions d'Européens.

 

[...]

 

Mais le plus fou, c'est que le 25 septembre dernier, le jour même de l'attentat au hachoir rue Nicolas-Appert, le Premier ministre du Pakistan, Imran Khan, ce merveilleux pays qui condamne pour blasphème des gamines de 14 ans, est venu se plaindre à la tribune de l'ONU de l'islamophobie de Charlie Hebdo et du monde, sans aucune réaction diplomatique de la France. Cela relève de l'hystérie pathologique.

 

Oui, il faut prendre des risques pour essayer de faire en sorte que nos enfants ne vivent pas dans le monde des Kouachi, des Coulibaly et des Imran Khan. La liberté de critique des idées et des croyances, c'est le verrou qui garde en cage le monstre du totalitarisme.

 

Ce qui souille l'humanité, ce qui insulte Dieu s'il existe, ce ne sont pas nos caricatures, c'est le meurtre d'innocents, ce sont les propos de comptoir du pape, ce sont les délires paranoïaques d'un Premier ministre pakistanais, c'est l'absence de doute qui caractérise le fanatisme, c'est ce puissant venin pour l'esprit qu'est l'idéologie victimaire, celle du fameux deux poids, deux mesures, ou de l'accusation d' « islamophobie », là où, en réalité, le droit s'applique de la même manière pour tous. Ce poison-là configure les esprits dans le rejet de l'Autre et la violence. Ce qui souille l'humanité, c'est la bêtise de ces tribunes, de ces articles, de ces prises de parole expliquant qu'il serait responsable d'abandonner les caricatures de l'islam pour en faire une religion d'exception.

 

 

 

 


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