Protestants dans la Ville

Page d'accueil    Liens    

 

Gilles Castelnau

Images et spiritualité

Libres opinions

Spiritualité

Dialogue interreligieux

Hébreu biblique

Généalogie

 

Claudine Castelnau

Nouvelles

Articles

Émissions de radio

Généalogie

 

Libéralisme théologique

Des pasteurs

Des laïcs

 

Roger Parmentier

Articles

La Bible « actualisée »

 

Réseau libéral anglophone

Renseignements

John S. Spong

 

JULIAN MELLADO

Textos en español

Textes en français

 

Giacomo Tessaro

Testi italiani

Textes en français


DIALOGUE INTERRELIGIEUX

 

i312.pasteur.jpeg

Jeronimo Perez, pasteur pentecôtiste,
devant les ruines du temple, détruit par des catholiques en même temps que des voitures et des maisons.
État mexicain du Chiapas, 2002


Mexique

Persécutions catholiques

  

Fausto Munz

 

article paru dans l'hebdomadaire protestant Réforme
du 8 juillet 2021

 

 

traduction Gilles Castelnau


11 juillet 2021

Dans la ville de Mitziton, un groupe de catholiques traditionalistes vient de brûler cinq maisons appartenant au pasteur évangélique Alejandro Jimenez. Loin d’être un phénomène isolé, l’agression fait remonter à la surface les conflits interreligieux qui minent la région depuis plus de quarante ans.

Des murs de briques éventrés, des blocs de béton brûlés et des débris partout sur le sol. Voilà ce qu’il reste des cinq bâtisses d’Alejandro Jimenez, pasteur de l’Église Alas de Aguila (« les Ailes de l’Aigle»).

Le jeudi 17 juin, il revenait dans son village natal pour rendre visite à sa mère, qui connaissait des soucis de santé. Mais Alejandro n’est pas le bienvenu à Mitziton. Depuis le mois de janvier de cette année, il a été expulsé de la communauté.

« Des menaces avaient été proférées à l’encontre du pasteur, explique Esdras Alonso, l’un des leaders évangéliques de la région. Les habitants de Mitziton prétendaient qu’Alejandro Jimenez voulait construire un temple pour la pratique de son culte, ce qui est interdit par les catholiques. »

Mis au courant de son arrivée, un groupe de catholiques traditionalistes avertit les autorités locales, qui procèdent à son arrestation. « Ils sont allés le chercher dans la maison de sa mère et l’ont emprisonné avec ses enfants », rapporte Esdras Alonso. La famille restera une heure derrière les barreaux, le temps pour les ennemis du pasteur de mettre le feu à ses propriétés. Cinq maisonnettes où vivaient sa famille, et dont il ne reste désormais que des ruines.

Une liberté de culte entravée

Cette violence à l’égard des populations non catholiques ne date pas d’hier. En 2016, 84 maisons ont été mises à sac dans le même village, obligeant des dizaines de familles issues du peuple autochtone tzotzil à quitter la ville. La raison invoquée ? La non-coopération de ce groupe évangélique aux fêtes de la communauté. Des faits similaires reviennent chaque année dans les journaux locaux. En vérité, cela fait quarante ans que les peuples non catholiques de la région du Chiapas subissent menaces, agressions et expulsions.

« La première référence à un conflit de cette nature date de 1981, précise Carolina Rivera Farfán, docteure en anthropologie au Centre d’investigations et d’études supérieures en anthropologie sociale (Ciesas), dans son enquête Diversité religieuse et conflit au Chiapas. Des groupes minoritaires font l’objet d’agressions et de destruction de patrimoine pour avoir épousé de nouvelles croyances non catholiques. »

Pourtant, il existe au Mexique une « loi des associations religieuses et du culte public » qui institue la liberté de foi et de pratique. Mais dans la région du Chiapas, la réalité est différente. Ne pas adhérer à la religion majoritaire est perçu comme une menace pour le vivre-ensemble. Illustration dans le journal régional Portavoz qui a publié des images montrant les messages très explicites des panneaux de la ville de San Juan Ozotlepec : « Le peuple catholique de San Juan interdit la tenue d’évènements par des sectes protestantes dans la communauté. » Mais d’où provient une telle animosité ?


Catholicisme en perte de vitesse

Pour comprendre les origines du conflit, il faut analyser la grande diversité religieuse du Chiapas, relativement aux autres régions. D’après les chiffres de l’Institut national de statistique et de géographie du Mexique (Inegi), 70 % de la population nationale est catholique. Au Chiapas, ce chiffre descend à 58 %, tandis que 19,6 % de la population régionale épouse des courants protestants, auxquels s’ajoutent les adventistes du septième jour, les mormons et les témoins de Jéhova (comptabilisés séparément dans l’étude) pour 8 %. Surtout, les recensements nationaux témoignent d’une progression constante des communautés évangéliques. Dans la ville de Las Margaritas par exemple, les protestants représentaient 33 % de la population en 2010, contre seulement 1,1 % en 1970 !

Les campagnes d’évangélisation de l’Église presbytérienne, arrivée du Guatemala, et l’influence grandissante de l’Église baptiste, en provenance des États-Unis au début de ce siècle, ont participé à ce « rééquilibrage » des communautés religieuses. « Le changement du paysage religieux chiapanèque a été perçu de manière négative. Certains catholiques voient les missions évangéliques comme une expansion de la culture nord-américaine sur le territoire mexicain. Une vision péjorative, qui se révèle même dans le vocabulaire utilisé, les communautés protestantes étant souvent associés à des “sectes” », analyse Carolina Rivera Farfán.


La dictature des « caciques »

La concurrence entre les communautés chrétiennes, le caractère prosélyte de certains courants évangéliques et la perte d’influence du catholicisme ont creusé les tensions, jusqu’à créer un véritable conflit religieux dans la région. Menaces, destructions de biens, détentions arbitraires et expulsions des populations évangéliques deviennent des thèmes d’actualité réguliers dans les journaux locaux. « Face aux agressions, les non-catholiques ont parfois riposté avec les mêmes moyens que ceux utilisés par leurs adversaires, commente Jean-Pierre Bastian, professeur de sociologie des religions, auteur d’une étude sur le protestantisme chez les Mayas du Chiapas. Mais de manière générale, les persécutions les ont conduits à s’organiser en associations, comme le Conseil de représentants indigènes des Altos de Chiapas, pour négocier avec les autorités. »

Aussi les communautés autochtones évangéliques doivent endurer le diktat des « caciques », une autorité plus ou moins formelle qui sert d’intermédiaire entre la population et les structures politico-administratives. « Le cacique exerce un pouvoir sur l’accès à l’exploitation des ressources humaines, naturelles et politiques dans une localité. Il établit une relation de clientélisme avec la population qui se traduit par des relations de patronage, ou de coercition politique envers des groupes sociaux », précise l’avocate Guadalupe Elizalde Molina.

D’après son étude sur le fondamentalisme religieux dans les milieux indigènes du Chiapas, à Mitziton, à Chamula et dans la région des Altos, les caciques ont directement ordonné, participé ou couvert les agressions et expulsions des communautés évangéliques.

Dans une région déjà minée par la pauvreté, l’analphabétisme ou le manque d’infrastructures publiques, le conflit religieux apparaît comme une plaie de plus, qui dure depuis trop longtemps et qui ne guérit pas. Malgré les appels à l’aide, la réaction des gouverneurs du Chiapas et des agents de l’État demeure faible, sinon inexistante. Le refus des autorités de faire appliquer la loi, en l’occurrence la liberté de culte, le régime des caciques et le climat d’impunité empêchent ou ralentissent toute forme de résolution.




.

i312.reveil.png

Prière d'une communauté évangélique de Brasilia pour le président Jair Bolsonaro, au Brésil en 2018



Le réveil évangélique
de l'Amérique du sud

 

Fausto Munz


L’influence grandissante des courants protestants évangéliques s’observe dans toute l’Amérique latine. Panorama du Nicaragua au Brésil.


C’est une constante dans toute l’Amérique latine. D’après les chiffres du Pew Research Center, depuis 1970 les populations évangéliques progressent partout, au détriment de l’influence catholique. Un réveil qui s’observe avec plus ou moins de force selon les espaces géographiques.

« Les zones où les populations évangéliques sont les plus présentes se situent au Brésil et en Amérique centrale, détaille David Stoll, auteur d’un mémoire intitulé L’Amérique latine devient-elle protestante (University of California Press, 1990). Au Guatemala par exemple, si on s’intéresse aux pratiquants, à ceux qui assistent au culte chaque semaine, la population évangélique est devenue majoritaire. Elle est également devenue très importante au Honduras et au Salvador. » À l’inverse, le Paraguay présente le plus faible taux, avec moins de 10% de la population nationale.


Progression évangélique, déclin catholique


Depuis le XIXesiècle, les ex-colonies anglaises et hollandaises de la région des Caraïbes, telles que la Jamaïque, les Bahamas ou le Belize, ont été historiquement peuplées d’évangéliques. Mais depuis les années 1970, la recrudescence s’observe également dans les pays andins, tels que le Pérou ou la Colombie. À l’inverse, le déclin de l’influence catholique concerne la totalité du continent, notamment chez les jeunes générations.

Au-delà des campagnes d’évangélisation qui ont jalonné le XXesiècle, cet accroissement de la population protestante s’explique par des motivations personnelles. « Pour les populations rurales notamment, l’évangélisme représente une défense contre les vices qui minent la stabilité familiale, analyse David Stoll. Par exemple, un père qui lutte contre l’alcool ou une mère fatiguée par les gaspillages financiers du papa. » La possibilité de former facilement une église autour d’un pasteur charismatique « sans passer par huit ans de séminaire » et l’organisation « moins hiérarchique, plus ouverte » des courants évangéliques permettent aussi d’expliquer ce phénomène.

Les estimations du Pew Research Center montrent qu’entre 1970 et 2014, la part de la population protestante en Amérique latine est passée de 4 à 19 %. Les catholiques restent largement majoritaires, avec 69 %, soit 23points de moins qu’en 1970.

 






Retour vers la page d'accueil
Retour vers interreligieux
Vos commentaires et réactions

 

   

 


Les internautes qui souhaitent être directement informés des nouveautés publiées sur ce site
peuvent envoyer un e-mail à l'adresse que voici : gilles@castelnau.eu
Il ne s'agit pas du réseau Linkedin auquel nous ne sommes pas rattachés.
Ils recevront alors, deux fois par mois, le lien « nouveautés »
Ce service est gratuit. Les adresses e-mail ne seront jamais communiquées à quiconque