« Pas que… »
Billet sur France Inter à 8 h 55 le lundi de Pâques 2018
Sophie Aram
2 avril 2018
Delphine Horvilleur a proposé jeudi dernier à ce micro la fête du « pas que... » où on se rappelle chacun qu’on n’est « pas que juif », « pas que musulman ».
Quelle belle idée ! A l’heure où certains chrétiens font rôtir leur agneau pascal, où les juifs digèrent leur mazot, j’aimerais que l’on profite de ces fêtes pour en célébrer une autre, celle des « pas que... », rassemblant tous les « pas que... » : les « pas que juif », les « pas que chrétiens », « pas que musulmans », « pas que athées », « pas que gay », « pas que hétéros », « pas que bis », « pas que femmes », « pas que hommes », « pas que trans », « pas que de gauche », « pas que de droite », « pas que noirs », « pas que arabes », « pas que arméniens », « pas que druzes », « pas que profs », « pas que cheminots », « pas que rabbins », « pas que imams », et « pas que prêtres ».
Une fête des « pas que... ». Parce qu’au moins ça, c’est une certitude, c’est un dénominateur commun à toutes et à tous. Nous sommes tous des « pas que... » de quelque chose dont on vient, auquel on croit, auquel on adhère.
Arrêtons tout simplement de nous cacher derrière un étendard, une bannière, une religion, une origine et concentrons-nous tous sur le « pas que... » qui, à défaut d’être précis, a au moins le mérite d’être universel. Vous pouvez être ce que vous voulez, vous êtes fatalement aussi autre chose. On a tous beau être convaincu d’être quelque chose, on est toujours des « pas que... ».
Imaginez qu’un député au lieu de se définir par le fait d’être communiste, de droite, de gauche, « en marche », mais le soit avant tout comme un défenseur du « pas que... » : eh bien là, on aurait assurément créé le premier mouvement politique de France. Mais « pas que... » : du monde aussi.
Imaginez qu’à chaque fois qu’une personne vienne représenter une communauté, une religion, une corporation, une préférence sexuelle, elle concentre son discours et ses revendications sur la partie essentielle de ce qui la caractérise, c’est-à-dire la partie « pas que... ». Et si tous les « pas que... » du monde entier voulaient bien se donner la main, ce serait quand même vachement chouette.
Imaginez deux minutes qu’au nom de notre « pas que...tude », on se mette à faire des choses ensemble, à fréquenter les mêmes restaurants, les mêmes écoles, les mêmes musées : il n’y aurait pas de « nous » qui s’opposeraient à « eux », il n’y aurait qu’un grand « nous » : « nous les pas que... ».
C’est pourquoi je souhaite à tous les « pas que... » de passer un bon lundi de « pas que... » !
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