Patrimoine
L'Oratoire du Louvre
17e - 21e siècles
Gilles Castelnau
paroisse de l'Église
Protestante Unie
17e siècle
En 1611, pour contrer
l'influence de la Réforme, le père
Pierre de Bérulle fonde la Congrégation de
l'Oratoire de France qui formera des prêtres
bien armés sur un plan spirituel et théologique
et capables d'argumenter contre les protestants.
Ceux-ci sont relativement protégés par l’Édit de
Nantes d’Henri IV bien qu’ils subissent des
contraintes et des tracasseries de
l’administration royale. Ils n’ont pas
l’autorisation de construire de temple à moins
de 5 lieues de Paris et vont le dimanche au
temple de Charenton où de grands prédicateurs
font retentir la parole protestante. (ce temple
sera détruit comme tous les autres lors de la
Révocation de l’Édit de Nantes en 1685). La nef
est construite entre 1621 et 1630 et la façade
entre 1740 et 1745. L'église reprend le plan des
églises de la Contre-Réforme à l’exemple du
Gesu, construite par les jésuites à Rome. La nef
unique et la bonne acoustique permettent de
vraiment écouter la prédication, comme le disent
les protestants. Le chantier se poursuit
normalement jusqu'à l'été 1623. Le surintendant
des bâtiments, le marquis de La Vieuville,
s'oppose au projet au nom du grand dessein prévu
sous Henri IV pour le palais du Louvre,
avec un quadruplement de la cour Carrée avec des
jardins et des bâtiments allant jusqu’à
l'emplacement de l'église de l'Oratoire.
La reine Marie de Médicis, veuve d’Henri IV et
mère du roi Louis XIII a l’idée de faire
déclarer l’église « oratoire du
Louvre ». Elle participera à ce titre au
« grand dessein ». Et conserve encore
aujourd’hui ce titre qui convient bien aux
protestants puisqu’un « oratoire » est
un lieu de prière. En 1750 la construction est
enfin terminée.
De magnifiques embellissements (disparus en
1792 lors de la Révolution) y ont été apportés
dans le luxe doré de l’époque : mise en
valeur du maître autel, très riches décorations
des chapelles latérales avec les peintures des
meilleurs artistes de l’époque. Des vestiges en
sont visibles dans une des chapelles. Quand les
protestants ont hérité de l’église au 19e siècle ils ont été
contents de la trouver ainsi dépouillée, car
dans un temple protestant il n’y a rien, si ce
n’est une chaire, des bancs et une bible
ouverte. « Rien que Dieu et nous »
Durant le 17e
siècle l’Oratoire royal est le lieu d’oraison de
la cour. De grands prédicateurs tels Massillon,
Bourdaloue ou Bossuet ont prêché dans cette
chaire. C’est dans cette église qu’ont eu lieu
les services funèbres de Richelieu puis de
Louis XIII et des reines Anne d’Autriche,
l’épouse de Louis XIII et en 1683 de
Marie-Thérèse, épouse de Louis XIV par
Bossuet.
Que prêchait-on dans cette
chaire au 17e
siècle ? Globalement, en présence
des grands de la cour, de la famille royale à
l’occasion, au milieu des dorures, des tableaux
et des peintures de maîtres, la spiritualité
exprimée était celle d‘une société chrétienne en
ordre avec le roi qui régnait « par la
grâce de Dieu » la foi catholique qu’il
était exclu de mettre en question et qui
excluait avec la violence que l’on sait les
juifs, les protestants, les jansénistes, les
quiétistes et les libertins. Les membres de la
noblesse étaient au premier rang. On valorisait
la grandeur et la justesse de la seule vraie
Église catholique ses rites, ses prêtres, ses
sacrements, sans réflexion critique.
Il n’en demeure pas moins que les élans
spirituels n’étaient pas absents de Paris et
donc de l’Oratoire. On ne sait pas si Vincent de
Paul y a prêché. Mais on sait que ses idées
« charitables », comme on disait,
étaient populaires dans une partie de la
noblesse et notamment des dames. Il avait trouvé
le chemin de leur cœur – et de leur
porte-monnaie – pour des œuvres soulageant
un peu les misères les plus dramatiques. On ne
pouvait manquer d’en parler au moins sur le
trottoir à la sortie de la messe :
Faites-vous partie des « Filles de la
Charité ? Soutenez-vous l’aumônerie des
Galères ? Vous intéressez-vous aux
Lazaristes, la Congrégation de la Mission auprès
des pauvres de campagnes ? Avez-vous été à
l’assemblée générale des grandes dames de la
noblesse et de la bourgeoisie françaises ?
Ces œuvres avaient le soutien de la reine Anne
d'Autriche, veuve de Louis XIII, de Louise
de Gonzague, la future reine de Pologne, très
mondaine et très assidue à visiter les malades
de l'hôtel-Dieu. C’est par Vincent de Paul que
Louis XIII voulut être assisté dans ses
derniers moments et mourir dans ses bras en
1643.
Plus tard on parlait à la sortie de la messe du
Tartuffe que Molière faisait jouer tout à côté
sur la scène du Palais royal. L’évêque de Paris
l’avait fait interdire mais le roi l’av ait
finalement autorisé. On s’y moquait des dévots
hypocrites.
On entendait aussi des prédication dans cette
chaire, surtout celles de Bossuet, qui
fustigeaient la spiritualité dite
« quiétiste », trop mystique et
désincarnée, disait-on et qui critiquait le
style du pouvoir royal. On disait du mal de
Fénelon et l’excellente madame Guyon avait été
emprisonnée à la Bastille.
Et naturellement vers la
fin du siècle, lors de la Révocation de
l’Édite de Nantes, on échangeait, à mots
couverts des nouvelles des connaissances
protestantes qui avaient tout quitté et
s’étaient réfugiés en Hollande, en Angleterre,
en Allemagne. Des nobles notamment, des grands
bourgeois. On murmurait les noms des pasteurs
qui avaient été arrêtés, brûlés vifs, roués, les
hommes envoyés aux galères, les femmes à qui on
avait retiré leurs enfants. Ils avaient bien
entendu tort de s’opposer ainsi à la seule vraie
foi du roi et du pape, mais c’était tout de même
horrible, si c’était
vrai.
On parlait sans doute à la sortie de l’Oratoire
du pasteur Pierre de Salve de Bruneton qui
venait d’être nommé Paris et que la police avait
immédiatement arrêté (le
10 janvier 1690). On avait trouvé sur
lui un sermon ; le docteur catholique
chargé de le lire en avait pourtant dit :
« Il n'y a rien dans ce sermon qui paraisse
contraire aux sentiments de l'Église ». Il
était détenu dans de telles conditions que deux
mois après, on disait qu’il était devenu fou. On
ignore la date de sa mort.
En regardant l’architecture de l’Oratoire,
pensez à tout ce qui y a été dit d’excellent ou
de très discutable. Écoutez ce que ces pierres
ont entendu de la part des fidèles :
souvent des paroles passionnées, prétentieuses
ou angoissées, étonnées, polémiques,
intelligentes, progressistes souvent...
18e siècle
Durant tout la première
moitié du 18e
sècle, la vie de l’Oratoire s’est
poursuivie comme précédemment. Le Régent
Philippe d’Orléans, puis, à sa majorité, le
jeune roi Louis XV et ses conseillers, ont
continué la politique très conservatrice de
Louis XIV qui impliquait naturellement la vie de
l’Église catholique, soutien principal de
l’ancien Régime. Et la répression de la pensée
janséniste et la persécution violente des
protestants (bûchers, galères pour les hommes,
prison pour les femmes).
La pensée janséniste,
que l’attitude autoritaire et centralisatrice de
Louis XIV avait déclenchée, perdurait plus
que jamais. Et les prédicateurs de l’Oratoire ne
pouvaient manquer d’en être concernés Elle était
accusée d’être opposée à la monarchie de droit
divin. Le Régent avait rendu obligatoire la
signature par tous les prêtres du
« Formulaire » antijanséniste. De
nombreux prêtres qui s’y refusaient étaient
frappés par des lettres de cachet. On disait que
l'évêque de Vintimille faisait interdire trois
cents prêtres jansénistes dans son diocèse. Et à
Paris on fermait le séminaire Saint-Magloire, le
collège Sainte-Barbe et la maison de
Sainte-Agathe. Cette pensée se rapprochait d’une
certaine manière de celle des protestants qui
était puissante, en Suisse notamment, et
rayonnait en France et surtout à Paris avec Voltaire (Traité de
la tolérance, 1763) et Rousseau (Lettre à
l’archevêque de Paris, 1762) dont les
écrits passionnaient l’opinion. Idées aussi de
Diderot et des Encyclopédistes et des
francs-maçons. À la fin du siècle c’est tout cet
ensemble qui éclatera dans la Révolution de
1789.
En attendant, que la prédication du jour, dans
la chaire de l’Oratoire ait été hostile au
jansénisme et aux nouvelles idées ou plus
ouverte, on en discutait évidemment, à mots plus
ou moins couverts à la sortie de la messe. Et
les prédicateurs en parlaient entre eux. Nul
doute que les prédicateurs et les fidèles de
l’Oratoire, sans naturellement faire d’éclat, se
sont largement mêlés à cette question des idées
nouvelles, dont la presse même, publique ou
clandestine se faisait l’écho. Naturellement
l’attention des fidèles à la prédication de
l’Oratoire s’est fait passionnée lorsque la
Révolution a fini par éclater. Que disait-on
dans la chaire de l’Oratoire, que répétait-on
sur le trottoir de la rue Saint-Honoré lorsque
le premier Président de l’Assemblée nationale,
le pasteur Rabaut-Saint-Étienne, s’exclamait
dans son discours fameux du
23 août 1789 : « Ce n'est
pas la tolérance que je demande, mais la
liberté ».
Le 14 décembre 1792, un décret de la Convention
supprima les Oratoriens. On installa dans
l’église le magasin des effets militaires. Tous
les tableaux, qui ornaient les murs de
l’Oratoire furent enlevés et la croix, qui
surmontait le fronton de l'Oratoire sur la rue
Saint-Honoré, tomba.
L’histoire du 18e
siècle à l’Oratoire fait partie de notre
patrimoine.
19e siècle
Au début du 19e siècle, et depuis
la rage anticatholique de la Révolution
française, l’église de l’Oratoire est
occupée par les décors de l'Opéra, du Vaudeville
et du Théâtre Français. La liberté était rendue
aux protestants, dont on estime le nombre à
20 000 à Paris. Mais ils étaient
exangues, sans temple et sans argent. En 1811
Napoléon décide de leur attribuer l’église de l’Oratoire
(en même temps que trois autres églises
désaffectées, Saint-Marie, Pentemont, les
Billettes).
Le premier culte est célébré le 11 mars 1811,
jour de Pâques. Le pasteur Paul-Henri Marron y
prononce dans cette chaire le premier sermon
protestant. La spiritualité du culte protestant
n’est pas centrée, comme pour la messe
catholique, sur l’autel et le sacrifice
eucharistique au fond de l’église, mais sur
l’enseignement de la Parole qui doit être au
centre de l’assemblée. Les protestants enlèvent
donc l’autel qui était dans le chœur de
l’Oratoire et y mettent les chaises des fidèles
afin que l’assemblée entoure la chaire. Et ils
placent devant la chaire une bible ouverte
symbolisant le véritable centre de l’assemblée.
L’acoustique à laquelle tenaient justement les
Oratoriens convient parfaitement au culte
protestant, ainsi d’ailleurs que le titre même
de l’église : « l’Oratoire » qui
désigne la prière. Quant aux statues et
peintures qui ont été vandalisées sous la
Terreur de 1792, les protestants ne les
regrettent pas : rien, disent-ils, ne doit
détourner l’attention de la relation que l’on
doit établir personnellement avec Dieu.
Les protestants sont réhabilités. Ils ont une
belle église au centre de Paris.
En 1815, après Waterloo, lorsque les Alliés
entrent dans Paris en vainqueurs, l’Oratoire
ouvre ses portes aux Anglais dont le culte ami
anglican a lieu à midi après le culte français.
Un communiant protestant de marque, participa un
jour au culte : le Roi de Prusse en
personne.
Après la défaite de 1870 et la Commune de Paris,
lors de l’alliance du gouvernement versaillais
avec la Prusse, un autre protestant, l'Empereur
Guillaume II, y aurait aussi assisté au
culte, dit-on.
Le dimanche 2 juin 1912 la reine Wilhelmine des
Pays-Bas est venue rendre hommage à son illustre
ancêtre l’Amiral de Coligny qui avait été
assassiné lors de la Saint-Barthélemy et dont la
statue se trouve devant l’Oratoire rue de
Rivoli.
L’Oratoire fonctionne
régulièrement comme une des paroisses
protestantes de Paris. Il y en a six en
ce 19e siècle,
que les pasteurs desservent à tour de rôle sans
qu’aucun soit rattaché plus particulièrement à
l’une d’entre elles. L’Oratoire est considéré
comme la plus prestigieuse, la paroisse
« centrale ». Les bustes de certains
pasteurs qui l’ont illustrée par leur
prédication se trouvent sur les murs de la
sacristie. Ainsi entre autres, les pasteurs
Marron, Adolphe Monod ou Athanase Coquerel.
L’Oratoire est aussi connue
comme étant de tendance « libérale ».
A la suite de la liberté de pensée des Lumières
(principalement Voltaire et Rousseau), l’esprit
critique s’est développé dans le monde religieux
catholique comme protestant. Si les prestigieux
théologiens et biblistes qu’étaient Ernest Renan
et Alfred Loisy ont rapidement été condamnés par
le Vatican, l’esprit de liberté protestante a
permis au libéralisme théologique de se déployer
considérablement. La polémique des pasteurs
prêchant à l’Oratoire était virulente avec les
orthodoxes qui demeuraient attachés à une
lecture traditionnelle de la Bible et à la
doctrine des Réformateurs Luther et Calvin.
Cette polémique se développait notamment à la
Faculté de théologie protestante de Paris,
boulevard Arago où, entre autres, le pasteur
Wilfred Monod de l’Oratoire était devenu
professeur.
Séparation entre orthodoxes
et libéraux. Lorsqu’en 1870
l’empire s’écroula et laissa la place à la
République, la pleine liberté de s’organiser et
de convoquer des synodes fut rendue aux
protestants et le protestantisme se partagea
alors en deux Églises, une libérale centrée
sur l’Oratoire et la paroisse amie du Foyer de
l’Ame, près de la Bastille et une orthodoxe.
L’unité ne fut rétablie qu’en 1938.
Un grande question surgit entre les paroissiens
de l’Oratoire et aussi avec leurs amis
catholiques : Jules Ferry organisait
l’école laïque gratuite et universelle pour
tous. En 1881, les protestants avaient en France
1535 écoles protestantes, dont évidemment un bon
nombre à Paris. Devait-on continuer d’y envoyer
nos enfants ou allait-on jouer la carte
laïque ? C’est la confiance envers l’État
qui a entraîné l’adhésion :
1000 écoles protestante ont été
immédiatement remises à l’État et les 500 autres
plus tard.
L’affaire Dreyfus fut aussi, à la fin du siècle
une grande question qui souleva des débats
intense et souvent très violents, parfois entre
certains paroissiens de l’Oratoire mais surtout
les protestants alliés aux Républicains aux
catholiques monarchistes. Il faudrait rechercher
dans quelle mesure les prédicateurs de
l’Oratoire y prirent part.
20e siècle
Le 20e
siècle commença avec la séparation des Églises
et de l’État en 1905. Les protestants
s’y soumirent d’autant plus volontiers qu’ils
étaient largement à l’origine de cette loi qui
interdisait toute influence de l’Église
catholique sur la vie du pays dont les
protestants avaient tellement souffert. Pourtant
les pasteurs n’étant plus rémunérés par l’État,
les paroissiens de l’Oratoire durent faire leurs
comptes et... augmenter très largement les
offrandes qu’ils consentaient à leur paroisse.
La grande Guerre de 14-18 n’épargna pas ses
souffrances à l’Oratoire. Une plaque énumérant
les paroissiens morts pour la France est
toujours dressée à l’entrée du temple.
L’unité protestante de 1938.
La séparation de 1872 entre une Église libérale
– à la pensée critique - dont
l’Oratoire était la principale et une Église
orthodoxe attachée aux doctrines traditionnelles
prit fin en 1938. L’Église réformée de France
fut fondée sur une confession de foi élaborée
par les orthodoxes et qu’un
« préambule » modérateur rendait
acceptable aux libéraux. Le pasteur de
l’Oratoire André-Numa Bertrand fut le premier
vice-président de cette Église unie.
Guerre de 1939. Le
pasteur Marc Bœgner, président de la Fédération
protestante de France, ayant choisi de
poursuivre son ministère en zone libre, le
pasteur de l’Oratoire A-N. Bertrand joua
alors le rôle de leader du protestantisme et
signifia publiquement et notamment dans la
chaire de l’Oratoire l’opposition du
protestantisme aux mesures iniques de l’État
français. Par exemple le serment de fidélité au
chef de l'État exigé des fonctionnaires, les
réquisitions du Service du Travail Obligatoire
en Allemgne (STO), le port de l’étoile jaune par
les Juifs, l’arrestation du Vel d’Hiv. Il
exprima sa solidarité avec le Grand rabbin de
Paris. Il déclara regretter le refus de la
hiérarchie catholique d'entreprendre une
démarche commune auprès des autorités
d'occupation : « J’ai toujours reçu
auprès de ces prélats une parfaite courtoisie et
bienveillance, mais aussi un refus très net de
s'opposer en quoi que ce soit aux interventions
des maîtres de l'heure. »
La « Clairière », œuvre sociale de
l'Oratoire fondée en 1910 par Wilfred Monod,
dont le pasteur de l’Oratoire Paul Vergara était
le directeur aida au sauvetage de
63 enfants juifs en février 1943 et
servit de « boîte aux lettres » à la
Résistance. Le pasteur Vergara fuit la Gestapo
en juillet 1943.
Puis les paroissiens de l’Oratoire eurent à
réfléchir à la naissance du Conseil Œcuménique
des Églises à Amsterdam en 1948 qui
réunissait toutes les Églises du monde à
l’exception de l’Église catholique.
Il y eut la grande question de l’ordination des
femmes au ministère pastoral en 1965, les
troubles de mai 68, la lutte contre la Faim
dans le monde, la fondation de l’ACAT
(Association des Chrétiens pour l’Abolition de
la Torture, la Cimade et son aide aux personnes
déplacées, l’aide aux Église d’Afrique issues de
la décolonisation.
Tous sujets vaillamment affrontés par les
pasteurs et paroissiens de l’Oratoire dans leur
esprit de libéralisme évangélique.
21e siècle
Ce magnifique bâtiment a été
construit au 17e siècle par les Oratoriens lancés
dans le grand mouvement catholique de la
Contre-Réforme. Il a été attribué aux
protestants par Napoléon qui voulait compenser
la destruction des temples lors de la Révocation
de l’Edit de Nantes. N’en regardez pas seulement
l’architecture. Une église n’est pas un bâtiment
de pierres anciennes et refroidies. Celles-ci
sont le cadre séculaire d’une Parole qui résonne
ici, notamment tous les dimanches et lors
d’autres cérémonies depuis sa construction, en
s’adaptant toujours à nouveau aux besoins et aux
recherches humaines des Parisiens. On ne pense
plus à Dieu, à la vie, à l’homme aujourd’hui
comme jadis. Et ce n’est pas seulement parce
qu’ici les protestants ont succédé aux
catholiques mais aussi parce que la réflexion
humaine évolue. Dieu est le même mais la manière
dont on en parle change. L’Oratoire est
résolument lancé dans une recherche protestante
libérale.
Le libéralisme est une manière d’aborder dans
un esprit libre et de manière historique et
critique les doctrines chrétiennes et la lecture
de la Bible. Il est né avec les Lumières du 18e siècle, notamment
Voltaire et Rousseau.
Voltaire, mourant, griffonne ces derniers
mots : « Je meurs en adorant Dieu, en
aimant mes amis, en ne haïssant pas mes ennemis,
en détestant la superstition. »
Jean-Jacques Rousseau, écrit une longue lettre à
l’archevêque de Paris :
« Monseigneur, je suis Chrétien, &
sincèrement Chrétien, selon la doctrine de
l'Évangile. Je suis Chrétien, non comme un
disciple des Prêtres, mais comme un disciple
de Jésus-Christ. Mon Maître [...] n'ordonnoit
de croire que ce qui étoit nécessaire pour
être bon. »
Le libéralisme s’est développé dans le
catholicisme avec, entre autres, Ernest Renan et
Alfred Loisy. Mais cette attitude de liberté
dans la réflexion spirituelle a effrayé les
autorités catholiques qui craignaient que l’on
se détourne de l’autorité du pape et de
l’Église. Elle effraye également les protestants
conservateurs et les évangéliques craignant que
l’on se détourne de l’inspiration divine de la
Bible et de l’enseignement traditionnel des
Réformateurs du 16e siècle. Nous ne partageons
pas la conviction des fondamentalistes,
catholiques ou protestants, qui enseignent qu’il
ne faut pas mettre en question les affirmations
considérées comme « fondamentales »
- qui sont en général la divinité du
Christ, sa naissance virginale, le sacrifice
substitutif de la croix, le retour glorieux du
Christ et le jugement dernier, la vérité
historique de la Bible.
L’Oratoire fait sienne la
tradition libérale. Le journal Evangile
et liberté en transmet mensuellement les idées.
Je cite le résumé de sa spiritualité :
Par souci de vérité et de fidélité au message
évangélique, refusant tout système
autoritaire, nous affirmons :
- La primauté
de la foi sur les doctrines. Nous n’aimons pas
les vérités intangibles qui prétendent
enfermer le divin dans une expression
définitive.
- La vocation
de l’homme à la liberté. La constante
nécessité d’une critique réformatrice. Les
textes bibliques sont le produit de contextes
particuliers et n’apportent pas des réponses
toutes faites aux questions
d’aujourd’hui : ils sont à interpréter.
- La valeur
relative des institutions ecclésiastiques. Les
Églises, en tant qu’institutions, sont utiles
pour aider chacun à forger ses convictions,
mais elles n’ont pas à imposer des normes de
croyance ou de comportement.
- Notre désir
de réaliser une active fraternité entre les
hommes et les femmes qui sont toutes et tous,
sans distinction, enfants de Dieu. Le service
du prochain nous paraît toujours supérieur à
l’exactitude des discours sur Dieu. Nous
sommes des croyants optimistes. Nous voulons
être une école de la tolérance : nous ne
condamnons pas ce qui nous est étranger et
nous reconnaissons la valeur de l’autre.
Nous voulons être attentifs aux questions
d’aujourd’hui plutôt qu’aux réponses d’hier.
Favoriser le dialogue entre les religions et
l’athéisme, avec les cultures contemporaines,
au lieu de se résigner à un choc des cultures.
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