Sea of Faith, Nouvelle
Zélande
Introduction à
John Spong
Un nouveau
christianisme pour un nouveau monde
pourquoi la foi traditionnelle disparaît
comment une nouvelle foi est en train de naître
A New Christianity for a New
World: Why Traditional Faith is Dying & How a New Faith is Being
Born.
John Shelby Spong
SanFrancisco: Harper,
2001
.
Recension
par le Rev. Alan
Webster
pasteur de l'Église
méthodiste
20 août 2006
Dans cette proclamation d'une nouvelle
Réforme, John Spong propose
trois points :
Où en sommes-nous de notre
religion
De quoi avons-nous besoin
Comment y parviendrons-nous
Nous allons commencer par la fin, par son
rêve, sa vision, sa conclusion et voir ensuite comment y
parvenir.
Sans modestie excessive, Spong est convaincu
que ses idées sont fondamentalement importantes pour le
christianisme et pour le monde.
Dans sa recherche, il demeure
profondément religieux ;
il commence chaque jour par deux heures de prière dans
méditation tournée vers le monde, vers lui-même
et vers la journée qu'il s'apprête à vivre. Comme
Richard Holloway, il pense que la prière se doit d'être
impliquée dans la vie du monde car si elle est
séparée de tout engagement personnel, elle s'adresse
à un Dieu « théiste » demeurant
à l'extérieur du monde et auquel on demanderait d'y
intervenir à notre place. Un tel Dieu est mort.
Ceci est très important, pense Spong,
dans la mesure où l'Église doit devenir, si elle veut
survivre, un organisme intéressant, inclusif, pluraliste, non
culpabilisant et introduisant dans le monde réel le Royaume de
Dieu qui est vie et amour. « Le christianisme n'est pas quelque chose
qu'il suffit de "croire" mais une foi que l'on vit, une vision qui
nous invite et que l'on ne quitte pas des
yeux. »
Spong répète toujours
l'expression « Dieu est le
fondement de l'Être » qu'il emprunte à Paul Tillich, qui a
balayé la théologie libérale au milieu du
20e siècle et dont a pensée demeure
hautement pertinente dans la quête d'une religion inclusive et
ouverte au monde. On ne peut oublier notamment sa formule de la
« préoccupation
fondamentale ».
Il est étonnant qu'il ait fallu
30 à 40 ans pour
que ces idées soient connues du grand public. Il y a des
blocages dans l'Église anglicane. Ce fut à la fin des
années 60 que Spong, Holloway, Cupitt s'y sont mis. Ce
fut alors la période de la « mort de Dieu ».
Mais quelle opposition ont-ils dû
subir, surtout Spong et Holloway, de la part de tout le clergé
anglican, qui réunissait tout son pouvoir pour défendre
désespérément ses textes liturgiques
traditionnels et sa conception mythologique du salut et faisait
assaut d'homophobie, de cruauté, de fondamentalisme et de
sexisme.
Le but de Spong est de montrer la voie qui
permet d'éviter « la
fausse sécurité qu'offre le christianisme
traditionnel », celle
où l'on attend de manière infantile un salut qui doit
venir de Dieu seul. Il ne manifeste pourtant pas d'optimisme
superficiel, nous le verrons plus loin.
Il invite aussi l'Église à se
libérer du joug du théisme, notamment dans sa liturgie
traditionnelle.
Il récuse également la
conception d'un mal universel qui rend passif au profit de la vision
du progrès graduel de l'humanité.
La piété de l'âge
post-théiste est celle de fidèles qui se sentent appelés hors de leurs limites,
de leurs préjugés et de leur égocentrisme dans
la célébration de leur véritable humanité
retrouvée, de leur capacité à être agents
de la vie, bien au contraire de la passivité infantile
traditionnelle.
Dans le culte on se souviendra naturellement
et on relira les récits saints - récits qui ne se
limiteront pas à Abraham, Moïse, le Calvaire. On
célébrera la longue marche de l'humanité, depuis
les origines jusqu'à notre humanité moderne et
consciente, en tout cas assez consciente pour abandonner
délibérément ses divisions en clans concurrents
et s'ouvrir à la sauvegarde de la création.
- Nous serons attentifs et respectueux à toutes
les formes de la vie.
- Nous respecterons la divinité de la vie comme
nous célébrons celle du Christ.
- Nous célébrerons devant le monde le
sens éternel de la vie que nous avons découvert dans la
vie de Jésus.
- Nous célébrerons ensemble l'ouverture
que nous avons trouvée au-delà ce nos réflexes
d'autodéfense, comme Jésus nous l'a montré,
« amour qui donne la vie,
la conscience et l'être ».
- Nous ferons montre d'un effort nouveau dans la
recherche de la vérité.
- Nous serons une communauté de compassion et
d'entraide.
- Nous serons unis, « non pas nos dogmes mais par notre
expérience commune qui est, finalement, tout ce qui est divin
en nous. »
Faire table
rase
Spong balaye tout surnaturel, autant
celui de Dieu que celui de Jésus.
Dieu n'est pas un être à part
et Jésus ne peut donc pas en être l'incarnation et
n'avait aucun pouvoir surnaturel lui permettant d'apaiser les
tempêtes, de marcher sur l'eau ou de nourrir
5000 personnes avec 5 pains.
- Il ne ressuscitait pas les morts, ne
guérissait pas la paralysée, ne rendait pas la vue ou
l'ouïe.
- Il n'est pas venu au monde dans le sein d'une vierge
parmi les chants des anges et annoncé par une
étoile.
- Il n'est pas ressuscité physiquement le
3e jour pour ensuite monter au ciel de Dieu.
Il n'a pas fondé d'Église. Les
hommes ne sont pas nés dans le péché originel
dont un sacrifice sanglant devrait les libérer.
Toute discrimination pour des raisons
d'orientation sexuelle, de race ou de sexe est inacceptable pour des
croyants adultes et formés dans la science moderne. De
même en ce qui concerne toute la mythologie de la Bible qui
serait exclusive et littéralement Parole de Dieu : les
mythes et légendes religieux ne doivent pas être
interprétés littéralement.
Spong attache beaucoup d'importance et
écrit de nombreuses pages à propos des puissants
préjugés anti-homosexuels et anti-avortement et
généralement à propos du lobbying de la
majorité morale de la Droite américaine. Il estime que
c'est la pensée théiste qui est responsable du manque
de compassion et de la bigoterie de cette attitude.
Pourquoi le
théisme est mourant
Les théologiens de la
« mort de Dieu »
n'avaient évidemment pas l'idée qu'il fallait faire
mourir Dieu ! Ils constataient que l'idée traditionnelle
d'un Dieu responsable de tout se qui se produit dans le monde et dans
la vie des hommes était une conception qui avait cessé
d'exister. Ce qui subsistait était une culture que Dieu avait
quittée.
C'est dans cette ligne que Spong pense que
considérer Dieu comme « un être au pouvoir surnaturel,
demeurant en dehors du monde et y intervenant périodiquement
pour accomplir sa volonté » est une idée mourante ou déjà
morte : le domaine réservé à Dieu est
considérablement rétréci, sa présence
dans la conscience des gens a pratiquement disparu. Mais surtout, il
n'apporte plus guère de soulagement à leur
anxiété et se voit désormais largement
remplacé par le tabac, la caféine, l'alcool, la drogue
et la surconsommation de médicaments.
La religion que nous avons autrefois connue
n'est plus considérée comme une solution efficace aux
problèmes de violence et d'inquiétude
générée par notre monde.
Comment le
théisme a pris naissance
C'est le Dieu théiste qui, au
début, dans notre culture
judéo-chrétienne, contrôlait nos angoisses. La
croyance en son existence faisait que dépendre de lui
accordait une protection contre l'inconnu.
Mais progressivement, les connaissances et
les progrès techniques ont permis aux hommes de se rendre
davantage maîtres des réalités et il est devenu
moins nécessaire de s'en remettre aux interventions de
l'ancien Dieu et de ses prêtres. Il faut bien reconnaître
que Dieu n'exerce plus aujourd'hui qu'une fonction symbolique. Le
fondamentalisme littéraliste n'est que « le dernier sursaut du
passé ».
Nous avons toujours besoin de la
vérité fondamentale et éternelle mais il nous
faut désormais la chercher dans la prise de conscience de ce
que représente une véritable humanité.
Un nouveau Dieu, un
nouveau Christ, une nouvelle humanité
Dieu. Pour la pensée
moderne le Dieu théiste n'est plus crédible.
« Nous ne pouvons plus
être des enfants dépendants d'un Dieu théiste
paternel. »
« Dieu ne peut pas être
défini de manière absolue par les formulations humaines
des credo ou des dogmes. »
« Nous ne pouvons
évidemment parler de Dieu qu'avec des mots humains mais nos
anthropomorphismes sont toujours trompeurs. »
Bien que Dieu soit ineffable, nous
expérimentons sa communion. Nous ne pouvons jamais savoir s'il
est présent, mais nous pouvons reconnaître sa
présence passée.
- Les qualités attribuées à Dieu
étaient celles de la vie communautaire des hommes.
- On ne dit plus « Dieu est amour »
mais la phrase « l'amour est
Dieu » s'est
progressivement imposée.
- On comprend Dieu comme, « la source de la vie, la source de
l'amour, le fondement de l'Être. »
- La disparition du théisme nous oblige à
avoir courageusement et par nous-mêmes une attitude de
responsabilité qui nous ouvre à une plénitude de
vie.
- Si Dieu est le Fondement de l'Être, notre
être est donc forcément enraciné dans la
réalité divine.
- Comprendre Dieu ainsi, se savoir enraciné dans
la réalité divine, nous rend capables d'accepter notre
responsabilité dans la vie du monde.
Le Christ
La question que nous pose l'abandon du Dieu
théiste est de savoir comment présenter son
ministère.
- On ne peut plus dire qu'il est l'incarnation sur
terre d'un Dieu résidant au ciel. Comme le dit Robert Funk, du
« Jesus
seminar », il faut calmer
notre langage à son sujet et détricoter les dorures
dont le théisme l'a affublé.
- Ce qui compte est de comprendre Jésus comme un
simple homme qui « fait
connaître le Fondement de
l'Être ». Il n'est
pas nécessaire d'ajouter une naissance virginale ni une
Résurrection physique. C'est le monde humain qui est
concerné par l'Être. La Résurrection n'arrive pas
après la mort, elle se produit pour les vivants,
peut-être aussi pour les mourants. Paul a fait
l'expérience de la Résurrection sur le chemin de Damas,
lors de sa conversion.
- Paul était incontestablement théiste,
comme on l'était à son époque. Néanmoins
il n'enveloppait pas Jésus de surnaturel, il n'utilisait pas
à son égard le vocabulaire théiste et ne parlait
ni d'incarnation ni de la relation des « trois personnes de la
trinité. »
- Paul voyait Jésus comme ayant
pénétré le domaine du divin, comme étant
entré dans la communion avec Dieu, comme ayant pris part
à l'Être divin, c'est-à-dire ayant vécu la
pleine réalisation de son être.
En fait, l'Être divin ne peut
être séparé de sa présence dans la vie
humaine, comme d'ailleurs en toute vie.
C'est cela qu'il faut comprendre et qui rend
possible une « nouvelle
Réforme » :
nous ne concevons plus Dieu comme un être séparé,
existant indépendamment de notre être.
Bien sûr, Paul et les autres ne
possédaient qu'un langage théiste par lequel ils
pouvaient rendre compte de leur rencontre avec Jésus. Mais
cette rencontre précédait toute la construction
théiste qui fut élaborée par la suite et c'est
cette rencontre qui demeure importante pour nous après que
nous ayons abandonné la construction théiste.
L'humanité et ses mythes
fondateurs
Si l'on renonce au théisme, la
compréhension traditionnelle des doctrines de l'incarnation et
du salut perdent toute signification. La naissance virginale n'a pas
de sens pour un esprit moderne. Nous savons aujourd'hui que la
structure de l'univers rende l'Ascension impossible.
La doctrine du salut provient de
l'idée inacceptable que les hommes sont
désespérément pécheurs jusqu'à ce
que Dieu les sauve, ce qu'il ne peut faire que par le paiement
mythique de leur dette par le sang de Jésus répandu sur
la croix.
L'intervention d'un sauveur devient inutile.
Le baptême destiné à s'assurer que Dieu donne
bien le salut à tel enfant devient un non sens.
Une nouvelle manière de dire
l'histoire de Jésus est la seule solution.
Jésus a peint un
tableau nouveau
Il a ouvert la voie d'une pleine
humanité. Il nous a
délivrés des préjugés basés sur
l'orientation sexuelle, le sexe, la maladie, le handicap, la
pauvreté, les classes sociales, l'appartenance religieuse,
etc. Dans chacun de ces cas, il révélait une nouvelle
manière de penser qu'il nommait le Règne de
Dieu.
Il possédait une qualité
d'amour inconnue jusque là qui accroît l'élan
vital dans un esprit de guérison. Ceux qui en étaient
témoins étaient saisis et se sentaient en
présence de Dieu, ils découvraient une humanité
nouvelle et profonde, le monde de Dieu.
C'était la véritable
humanité que Jésus incarnait ainsi, une humanité
libérée de ses préjugés. En union avec
lui, la présence de Dieu est offerte à tous.
Jésus est véritablement pour nous le "chemin" vers
Dieu.
Spong récuse donc le mythe du
péché originel. Le mal existe, certes, et
représente un danger fondamental pour ceux qui ne comptent que
sur eux-mêmes, leurs capacités humaines. La nouvelle
théologie, sans en faire un mythe, prend le mal tout à
fait au sérieux mais en s'appuyant sur la puissance de
guérison du fondement de l'Être, source de vie, source
d'amour
Traduction un peu
résumée Gilles Castelnau
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