L'évêque
John Spong
Réponses
de l'évêque Spong
.
Dieu, la prière,
l'au-delà
17 juillet 2006
Question
Vous dites que vous passez du temps
à prier. Mais qui priez-vous
donc ? Vous parlez du « Fondement de l'
Être », mais c'est
très impersonnel. Je trouve difficile d'abandonner l'image du « Père » avec laquelle j'ai appris à prier.
Comment un « Fondement de
l'Être » s'occuperait-il de moi et des miens ?
Je sais bien, intellectuellement, que Dieu
ne peut naturellement pas s'occuper de moi qui suis un être
minuscule sur la planète Terre parmi toutes les victimes des
tsunamis, des cyclones, des famines, des incendies etc. Et pourtant
je veux croire que quelque
chose ou quelqu'un le fait.
Sinon à quoi servirait-il d'être né, de traverser
une misérable vie pour, finalement, mourir et
disparaître.
Vous enseignez qu'il faut vivre pleinement.
Mais si rien n'a de sens, pourquoi vivre pleinement et pourquoi se
préoccuper de quoi que ce soit ?
Une partie de moi - qui est sans doute
enfantine - a besoin de quelqu'un qui ait
autorité et qui s'occupe de moi et des miens.
Évêque
John Spong
Réponse
Il est sûr que devant
l'immensité de l'univers et toutes les questions
qui surgissent du sens de la vie, il est normal que l'on ressente le
besoin d'une protection, que l'on s'imagine un Père
céleste qui veillerait sur nous de façon surnaturelle
et donnerait un sens à notre existence.
Nous avons sans doute une telle image paternelle depuis notre
enfance où nos parents nous semblaient invincibles,
tout-puissants et capables de résoudre tous les
problèmes qui pouvaient nous arriver.
Mais cette conception se heurte à deux difficultés.
Premièrement, cela ne
fonctionne pas.
Les tsunamis ravagent le monde, ignorent les malheurs qu'ils
provoquent et personne n'est
là pour protéger au moins les petits enfants.
Des hommes meurent victimes des guerres en dépit de toutes
les prières.
Deuxièmement, ce
désir nous maintient dans un état
d'irresponsabilité infantile parfaitement illusoire.
L'illusion peut être plaisante mais elle n'aide pas à
vivre.
D'autre part, vous dites que
si nous n'avons pas au ciel de parent divin surnaturel il n'y a pas
de raison de prier et la vie n'a pas de but. Vous dites aussi que
s'il n'y a pas de vie après la mort, il n'y a pas non plus de
Dieu.
Au fond vous pensez que si Dieu n'existe pas comme vous le
concevez, il n'existe pas du tout !
Je voudrais, à ce propos, citer le philosophe grec
Xénophane qui a dit : « Si les chevaux avaient des Dieux, ceux-ci
ressembleraient à des chevaux ».
Vous rendez-vous compte à quel point l'image que vous avez
de Dieu ressemble à un être humain très grand et
tout-puissant ?
Les humains ne pensent évidemment qu'à la
manière humaine.
Un cheval ne saura jamais ce que c'est
que d'être humain et un humain ne saura jamais ce
que c'est que d'être Dieu. Et pourtant les humains passent leur
temps à expliquer Dieu à d'autres humains, comment il
est et comment il se comporte.
La première chose est de commencer par admettre que nous ne
savons pas.
Cela ne signifie pas que les chevaux n'ont pas l'expérience
de vivre avec des humains ni que les humains n'ont pas
l'expérience de vivre avec Dieu.
Cela signifie que ce n'est pas parce que nous aimerions vivre dans
l'illusion que nous devons nous y complaire.
Le cerveau humain est-il l'ultime
réalité ? Peut-on avoir le sens de
l'altérité ? de la plénitude de la
vie ? du pouvoir de l'amour ? du Fondement de
l'Être ? Notre conscience peut-elle être
élargie ? les frontières
dépassées ? L'humanité peut-elle
connaître l'inconnaissable ? La sainteté peut-elle
pénétrer notre entendement limité ?
Serait-ce cela le temps de Dieu ?
On ne peut pas parler de Dieu avec des mots humains. C'est
d'ailleurs pourquoi toute voie religieuse devient mystique.
Prier n'est pas écrire une lettre
au Père Noël, c'est rejoindre la
transcendance. C'est du moins ainsi que je conçois la
prière. Fonctionne-t-elle ? Ce n'est pas à moi de
le dire.
- qui priez-vous donc ? Vous parlez du « Fondement de l' Être », mais c'est très impersonnel. Je trouve difficile d'abandonner l'image du « Père » avec laquelle j'ai appris à prier.
- Comment un « Fondement de l'Être » s'occuperait-il de moi et des miens ?
-- - - - L'amour
environne-t-il ceux que vous aimez ? Aide-t-il à
guérir ? Accroît-il la puissance vitale ?
L'amour est-il la présence de Dieu en nous ?
- Les plantes
poussent-elles mieux si on leur parle ?
- L'univers
est-il vivant, vibrant de la présence divine ?
- Dieu est-il
un être au milieu de tous les autres êtres ou est-il le
Fondement de tout ce qui existe ?
- Jésus
était-il une incarnation, un Dieu surnaturel venu pour un
temps en ce monde ? Ou était-il un homme en qui l'on
pouvait discerner la source de la vie et de l'amour, en qui on
pouvait reconnaître l'action de Dieu ?
Telles sont les questions que je voudrais
poser.
Dieu est, pour moi, tout à fait réel mais
indéfinissable. On ne peut pas le définir mais
seulement « expérimenter » sa présence. C'est lui qui donne sa profondeur à chaque
moment de notre vie et sa signification fondamentale.
Je ne crois pas que l'au-delà donne sa signification
à ce qui n'en a pas aujourd'hui. Je crois en la vie
après la mort parce que je touche dès maintenant
à l'éternité et à la signification.
Et cela me comble.
Traduction Gilles
Castelnau
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