Spiritualité des images

« L’Angélus » de Millet
Des peintres réinterprètent
l’Angélus de Millet
Exposition à Barbizon
jusqu’en décembre 2010
.
Gilles Castelnau
3 juin 2010
Ce célèbre tableau de Millet se trouve actuellement à Shanghai au pavillon français de l’Exposition universelle. Mais il a été peint il y a environ 150 ans à Barbizon, où les peintres impressionnistes se donnaient rendez-vous et la municipalité de ce village organise à cette occasion une étonnante exposition de sculptures, de peintures, de photographies d’artistes modernes qui lui redonnent vie.
L'Angélus est une prière à la Vierge. Les cloches des églises en y appelant les catholiques trois par jour rythmaient ainsi leur vie et leur travail à 6 h, 12 h et 18 h.

Gérard Rancinan
Gérard Rancinan pense à ce couple rencontré sous un ciel étonnamment noir, sans doute à la sortie d’un super marché d’une de nos banlieues (leur caddie est plein et ils ont même acheté le tableau de Millet). Ils ne sont pas recueillis dans une prière rituelle scandée par les cloches de leur paroisse mais par la contemplation d’un enfant nu et geignant abandonné peut-être par ses parents dans une étrange bulle. Peut-on parler de spiritualité, ce couple éprouve-t-il un sentiment de transcendance analogue à celui de Millet dans sa prière de l’Angélus ?
Gérard Rancinan suggère-t-il que sous la vulgarité de ces vêtements de bas-fonds défavorisés monte une méditation digne d’une humanité analogue à celle des paysans défavorisés d’il y a 150 ans ?

S. Léger
S. Léger place son couple méditatif au milieu de la pièce que parcourent les visiteurs. Elle donne la même attitude pieuse à ce renard et à cette fouine que Millet à ses paysans ce qui détonne, surprend et émeut le visiteur distrait et peu enclin au recueillement.

Martine Orsoni
Martine Orsoni qui aime peindre des personnages heureux et sympathiques dans une ambiance colorée, onirique, respecte un peu la pauvreté des personnages de Millet en mettant à l’homme un pantalon rapiécé. Mais elle n’y croit pas vraiment et lui donne un jolie veste et surtout une belle chevelure, une grande bouche rouge et d’immenses yeux baissés. Quant à sa femme elle est vêtue en japonaise de couleurs vives et son regard est mutin et interrogateur. Le panier de Millet est maintenant plein de fruits et de légumes magnifique. La brouette donne naissance à une immense plante magique elle aussi. Quant à la fourche elle ressemble à une patte de poule qui serait verte et rouge sur un fond bleu et rose. La petite église d’où vient le son de l’Angélus semble flotter dans le ciel.
L’homme et la femme sont bien humains mais leur cadre est bien divin. Martine Orsoni semble avoir compris la transcendance apportée par la prière.
Cette grande exposition présente, paraît-il, 150 œuvres – chiffre qui fait écho aux 150 ans de l’Angélus de Millet. Que le visiteur ne s’imagine pas qu’elles sont toutes de la même qualité. Ben a apporté son œuvre lui aussi : c’est tout simplement une photo du tableau de Millet sur lequel il a écrit au stylo : « O Dieu délivre-nous de l’art moderne et post-moderne »
C ‘est évidemment ce que nombre de visiteurs ne pourront s’empêcher de s’écrier en regardant certains de ces tableaux !
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Réaction de Martine Orsoni
Etre agnostique ne me prive pas d'analyse et de spiritualité, et j'ai trouvé dans vos mots le même élan et la même fraîcheur qui furent ressenti lors de mon séjour japonais. Mais plus encore, ce que les shintoïstes appellent « faire le vide » pour mieux se rapprocher de l'irréel, le divin. C'est celà ! « l'Angélus semble flotter dans le ciel ».
D'ailleurs la traduction des estampes japonaises se dit ainsi : les images du monde flottant. J'ai voulu m'en rapprocher et apporter cette note du merveilleux qui est la face cachée des poètes et en plus, la référence au japon vient tout naturellement de l'influence de l'École de Millet sur l'art moderne japonais.
« Quand à la fourche elle ressemble à une patte de poulet ». Je n'y avais pas pensé ! Est-ce la référence inconsciente à la poule au pot que tous paysans devaient manger le dimanche ? Merci encore pour cette critique
Martine ORSONI
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