25 avril 2009
Lors du grand combat du 19e siècle contre l’esclavage, les voix de chrétiens évangéliques comme William Wilberforce, John Wesley et l’évêque de Londres Beilby Porteus jouèrent un rôle important en faveur de l’abolition, avec aussi les Quakers et d’autres, religieux comme non-religieux.
La Bible était, pour eux, l’autorité suprême et ils savaient que l’on y trouve dans des passages que l’on peut utiliser en faveur de l’esclavage. Mais ils ont été sensibles au fait que le message de l’Évangile est tout de même plus ample que ces quelques versets et qu’il débouche inexorablement sur l’affirmation « aux captifs la liberté » comme disait Jésus dans l’évangile de Luc.
C’est pourquoi il interprétèrent les passages pro-esclavagistes comme étant laminés par le message de compassion apporté par Jésus.
Une telle manière de penser se rencontre actuellement chez certains chrétiens évangéliques à propos de la reconnaissance du statut des homosexuels. Ces évangéliques ne sont encore qu’une minorité, mais une minorité grandissante et ils apportent sur les plans moral et théologique des arguments capables d’influencer les autres membres de leurs communautés avec le même sérieux que leurs prédécesseurs du mouvement anti-esclavagiste.
Cette semaine, quatre communautés évangéliques se sont associées pour faire prendre conscience au « peuple de la Bible » qu’utiliser un langage de haine à l’encontre des homosexuels - comme le fait en ce moment la secte baptiste Westboro - est tout à fait contradictoire avec la lutte que nous menons à l’intérieur de nos communautés contre les préjugés et les discriminations.
Les plus engagés dans ce mouvement sont les « Accepting Evangelicals ». Ce sont des chrétiens qui prennent la Bible tout à fait au sérieux mais qui considèrent que les versets cités contre les homosexuels ne visent en réalité pas les relations homosexuelles amoureuses et fidèles mais plutôt la pédérastie avec de jeunes adolescents, la prostitution sacrée ou certains abus sexuels.
Ils sont soutenus par d’importants travaux bibliques et par des chrétiens d’autres tendances qui sont également convaincus qu’être disciples de Jésus dans le monde d’aujourd’hui implique une attitude de libre responsabilité et non un combat d’arrière-garde frileuse.
La récente déclaration a également été signée par le réseau baptiste des Affirming Lesbian and Gay Christians, la Fraternité évangélique des chrétiens gay et lesbiennes, le réseau Ekklesia (qui comprend de nombreux évangéliques) et par l’association Courage UK qui, au début, était anti-gay mais qui a changé et considère désormais l’acceptation et l’accueil de l’homosexualité comme un impératif de l’Évangile, bien que l’alliance évangélique la pousse à démissionner.
Les dirigeants des principales organisations évangéliques sont prévenus de la présence dans leurs rangs de fidèles qui ne partagent pas leurs idées, mais ils ne veulent pas risquer les polémiques qui s’ensuivraient s’ils les mettaient ouvertement en cause. D’ailleurs les membres conservateurs de leurs communautés se plaisent à se situer du côté des justes qui sont supposés résister aux « libéraux » qui bradent l’Évangile. C’est du reste l’argument que l’on utilisait au temps de l’esclavage pour réfuter les thèses abolitionnistes.
Il est d’ailleurs étonnant que l’opposition aux relations homosexuelles soit devenu dans certains milieux évangéliques, un test révélant la qualité de leur orthodoxie, malgré le fait que le Christ n’en ait jamais parlé. Bien au contraire il battait en brèche les tabous religieux de l’ordre établi et promouvait le pardon et le partage parmi ses disciples et non pas des interdictions rituelles.
De toutes façons, l’évolution est amorcée dans le monde évangélique. Le refus de tout débat sérieux sur l’homosexualité y est fréquemment mis en question, notamment parmi les jeunes.
En novembre dernier, le très respecté Richard Cizik, vice President de la National Association of Evangelicals (50 millions de membres) a démissionné à la suite des critiques qui se sont élevées contre lui, lorsqu’il a fait savoir qu’il changeait d’avis en ce qui concerne l’homosexualité. Beaucoup de ses amis se sont - en privé - déclarés d’accord avec lui. Des responsables évangéliques influents comme Tony et Peggy Campolo ont ouvert un débat public sur l’homosexualité et Peggy y a pris une position explicitement ouverte.
En Grande-Bretagne des évangéliques pro-gay ont également fait leur « coming out ».
Il y a quelques années, le pasteur méthodiste George Hopper a publié un livre online présentant la difficulté de ce changement ainsi que l’espérance qu’il suscitait : « Reluctant Journey - A pilgrimage of faith from homophobia to Christian love » (Voyage difficile - un pèlerinage de l’homophobie à l’amour chrétien)
La lutte contre les préjugés anti-gay n’a pas lieu que dans les églises. Dans les cafés, dans les journaux tabloïds, dans les maisons et sur les lieux de travail, l’intolérance transparaît derrière un voile léger de libéralisme.
Les chrétiens évangéliques sont profondément impliqués dans cette question. Mais s’ils réfléchissent à leur histoire passée et relisent le message biblique à la lumière de son cœur lumineux qu’est le Christ, ils seront capables d’être des agents actifs d’un changement historique.
Traduction de Gilles
Castelnau
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