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La religion woke

Jean-François Braunstein


Ed. Grasset

288 pages – 20,90 €


 
Recension Gilles Castelnau

 

30 mai 2023

Le wokisme est une idéologie nouvelle
qui se développe rapidement de nos jours dans les milieux intellectuels américains et français, parmi les professeurs des universités, des lycées, des collèges et pénètre désormais aussi les instituteurs des écoles primaires.

Ils s’« éveillent » (c’est ce que signifie le terme de woke) et s’aperçoivent qu’ils vivaient inconsciemment  jusque-là dans un monde mensonger et maléfique qu’ils se doivent de dénoncer.

Ainsi les Blancs n’asservissent pas seulement les Noirs par égoïsme et prétention mais par le fait qu’ils ont constitué un système totalitaire de domination raciste. Les hommes en font autant avec les femmes, les pays riches avec les peuples colonisés. Et même la science la plus officielle (les mathématiques !) ne fait que refléter cet état de chose.

Jean-François Braunstein est professeur émérite de philosophie contemporaine à l’Université Paris-I Panthéon-Sorbonne. Il nous introduit à cette nouvelle pensée mythologique en citant des textes, des thèses, des conférences américains et français d’une manière qui fait froid dans le dos.

En voici des passages.

 


 

 I. La première religion née dans les universités

Une religion universitaire

Une religion sans pardon : le « privilège blanc »

Ce qui est le plus caractéristique de cette religion woke, c'est qu'elle est « sans pardon ». Le « privilège blanc » semble alors être l'équivalent d'une sorte de péché originel. Le Blanc est coupable du fait que ses ancêtres ont opprimé, et qu'il continue d'opprimer, les Noirs et toutes les personnes de couleur, même et surtout s'il ne s'en rend pas compte.

 

Les purs et les impurs

L'excommunication et les dénonciations d'hérésies sans cesse renaissantes sont au cœur de la religion woke. II ne s'agit pas pour elle d'annoncer un avenir meilleur, ni de promettre un quelconque au-delà, il s'agit surtout de purger ce monde des méchants et de combattre les injustices qui sont faites aux divers groupes discriminés. C'est ce qu'avait noté Alain Finkielkraut, à l'occasion d'une réflexion sur le livre de Roth, La tache : « le politiquement correct est un gigantesque effort pour redresser le bois tordu de l'humanité », une lutte sans fin pour désigner des coupables.

 

 II. Une religion contre la réalité
La théorie du genre

Le monde imaginaire du genre


De toute façon, se fier à l'apparence d'une personne est considéré comme tout à fait répréhensible, par exemple lorsqu'on « mégenre » un non-binaire en le prenant pour un homme ou une femme. On en a un exemple fameux en France, avec une séquence d'une émission Arrêt sur images de Daniel Schneidermann, consacrée à la Gay Pride. L'animateur s'excuse de ne pas avoir fait place sur son plateau à des femmes lesbiennes et de n'avoir invité que des hommes. À ce moment-là l'un des invités, carré, barbu, au crâne dégarni, à la voix grave, proteste, extrêmement agacé : « Je ne suis pas un homme, Monsieur, je ne sais pas ce qui vous fait dire que je suis un homme. » À l'animateur interloqué qui lui répond : « Votre apparence », cet invité rétorque : « Ah bon ? Il ne faut pas confondre identité de genre et expression de genre, sinon on va déjà mal partir. Je suis non-binaire, ni masculin ni féminin. » Et il conclut très en colère : « Ne dites pas qu'il y a quatre hommes sur le plateau, c'est me mégenrer et ce n'est pas très agréable. » On pourrait se contenter de rire de cette séquence mais le ton très acrimonieux et revendicatif de ce « non-binaire » montre bien que la question est complexe.

 

 

Les trans contre les lesbiennes et les féministes

Les femmes qui refusent aux trans hommes devenus femmes l'accès à leurs toilettes, les prisonnières qui se plaignent qu'on les incarcère parmi elles, alors qu'ils peuvent être des agresseurs sexuels, les sportives, dont les records sont pulvérisés par des hommes biologiques, toutes ces femmes-là seraient des transphobes.

[…]

Si les trans disent qu’ils sont des femmes, personne ne devrait mettre leur parole en doute, et surtout pas les lesbiennes.

 


III. Une religion contre l’universalisme

La théorie critique de la race

 

L'autre sujet qui enflamme les wokes est celui de la race.

[…]

Selon eux il faut toujours considérer et traiter les humains différemment en fonction de leur race. Ceux qui refusent cette approche en termes de race sont stigmatisés comme étant les vrais racistes.

[…]

En France l'antiracisme a été acclimaté, en remplaçant le plus souvent les Noirs par tous les immigrés, issus des anciennes colonies françaises, qui seraient toujours « colonisés » dans les quartiers et mériteraient ainsi d'être qualifiés d'« Indigènes de la République », selon le parti qui prétend les représenter.

 


Tous les Blancs ont racistes

Si le racisme est « systémique », cela veut dire qu'il est indépendant de la volonté de chacun, qu'il est lié à la domination blanche et au « privilège blanc » et que donc tous les Blancs sont racistes. Cette idée est clairement exprimée par la militante racialiste Barbara Applebaum : « Le point pertinent, pour l'instant, est que tous les Blancs sont racistes ou complices du fait qu'ils bénéficient de privilèges auxquels ils ne peuvent pas volontairement renoncer. »

[…]

Comme toujours dans la pensée woke, DiAngeIo appelle à en finir avec la responsabilité individuelle et souhaite revenir à une vision grégaire de la responsabilité : « les Blancs » sont coupables à l'égard « des Noirs ». Toujours cette volonté dont parlait Bret Easton Ellis de se « débarrasser de l'individu ».

[…]

De toute façon, pour les Blancs, c'est sans espoir. Ils ne pourront se débarrasser seuls de leur racisme

[…]

Et les choses sont encore plus mal parties lorsqu'il s'agit de Blancs « gentils ». Dans son dernier livre, Nice Racism, DiAngelo explique que la culture de la « gentillesse » promeut le racisme car les Blancs bien intentionnés sont plus difficiles à combattre : le sous-titre du livre est précisément Comment les Blancs progressistes perpétuent le préjudice racial.

 

Contre l’indifférence à la couleur

Pour ces militants racialistes, il est hors de question d'en rester à la position des antiracistes classiques qui voulaient établir un monde « aveugle à la couleur ». Un exemple typique de cet antiracisme « périmé » serait la phrase célèbre de Martin Luther King : « Mon rêve est qu'un jour mes quatre enfants vivront dans un pays où ils ne seront pas jugés sur la couleur de leur peau, mais sur leur personnalité. » Aujourd'hui ne pas juger quelqu'un sur la couleur de sa peau n'est plus un idéal à valoriser. C'est bien plutôt une preuve d'insensibilité voire de racisme : un bon antiraciste est celui qui juge les autres en fonction de la couleur de leur peau. Et il n'y a que les Blancs qui peuvent être ainsi insensibles à la couleur de la peau.

 


IV. Une religion contre la science

Les épistémologies du pont de vue

 Des « savoirs situés » contre la science

 

On a appris en décembre 2021 que le très woke gouvernement de Nouvelle-Zélande avait décidé qu'il faudrait désormais enseigner dans les facultés de sciences le « mâtauranga maori », le savoir autochtone maori, à parité avec les sciences occidentales (pakeha), pour les jeunes entre seize et dix-huit ans. La « science européenne » n'a rien d'universel, elle est juste la science de cet Occident qui a établi sa domination sur les Maoris et les autres peuples indigènes. Le mâtauranga comprend des références à diverses divinités, comme Tane, le dieu de la forêt, créateur des humains et de toutes les plantes et créatures de la forêt, ou la déesse Papatuanuku, dont les pleurs sont à l'origine de la pluie. Les militants maoris demandent que ces mythes soient considérés comme des connaissances scientifiques, à l'égal de la science occidentale.

 

[…]


Des universitaires occidentaux interviennent alors dans le débat. Jerry Coyne, professeur de biologie à Chicago, écrit à la Royal Society de Nouvelle-Zélande : « la façon de savoir des Maoris inclut le créationnisme : le genre de créationnisme que les chrétiens fondamentalistes épousent aux États-Unis sur la base d'une lecture littérale de la Bible. Les créationnismes américain et maori se trompent complètement — réfutés par tous les faits de la biologie, de la paléontologie, de la biogéographie, etc. J'ai passé ma vie à m'opposer au créationnisme. Que votre société expulse des membres pour avoir défendu des points de vue tels que l'évolution contre des points de vue non empiriques sur la création et autres, est honteux ».

 


Une épidémie d’épistémologies

Kuhn plutôt de Foucault

Les wokes sont beaucoup plus radicaux et relativistes que Foucault, puisque pour eux il s'agit de mettre les considérations de race et de genre au cœur de toutes les disciplines, y compris les mathématiques ou la logique. Il n'y a pour eux que des jeux de pouvoir dans les sciences et la notion de vérité n'existe plus en tant que telle.

 

Il est aujourd'hui admis que la justesse politique ou morale est plus importante que la connaissance exacte. Nous sommes bien en deçà de la science et précisément dans une vision fidéiste et anti-intellectualiste. On en a un exemple remarquable dans une formule de la wokissime élue à la Chambre des représentants, Alexandria Ocasio-Cortez. Au journaliste de CBS qui lui avait fait remarquer que les chiffres dont elle se servait pour justifier son financement de l'assurance maladie étaient inexacts, elle avait répondu sans la moindre gêne : « Je pense que beaucoup de gens sont soucieux d'être précis, factuels et sémantiquement corrects » alors que pour moi, il vaut mieux « être moralement correct ». Et de toute façon, poursuit-elle, « si je fais des erreurs ce n'est pas la même chose que lorsque Trump ment à propos des migrants ». Ce sont des erreurs pour le bien. Peu importe l'exactitude, ce qui compte c'est d'être dans le camp du bien. On a rarement vu un tel cynisme.

 

 

 



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