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Libre opinion
Ouvre ta bouche...
pasteur Luc Wenger
ICANS
Institut de Cancérologie Strasbourg
texte paru dans Le Nouveau Messager
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4 mai 2021
« Ouvre ta bouche pour celui qui ne peut pas s’exprimer,
pour la cause de tous les délaissés ! »
Proverbes 31:8
Mais d’où vient cette injonction à oser une parole engagée qui pourrait faire penser à un slogan de campagne politique ? Cette première impression n’est pas si fausse puisque son origine est dévoilée au verset 1 où il est dit : « Paroles du roi Lemuel, que sa mère lui a enseignées. »
Le roi Lemuel est très largement tombé dans l’oubli et sa mère avec tous ses conseils de vie n’a pas vraiment fait la une des records de vente de librairie au rayon « coach de vie ou développement personnel ! »
Pourtant ce conseil maternel en vue d’exercer le pouvoir est empli de sagesse.
Dommage qu’il ne soit pas donné ou du moins rappelé lors de chaque investiture de quelque mandat politique que ce soit ! Peut-être serions-nous alors non pas dans une société « Babel » où personne ne s’écoute ni ne s’entend ; mais dans un après Pentecôte où cet Esprit de compassion, de respect et d’écoute permet de se comprendre, de se respecter et de vivre ensemble, dans le respect du bien commun.
Mais loin de moi l’idée de polémiquer et de réserver cette sagesse « aux autres ou aux seul élus ». Ce conseil m’est aussi adressé à moi, là où je suis acteur existentiel. Que ce soit au sein de ma famille, de mon travail, de ma paroisse, de mes lieux de loisirs…
Je ne pense pas qu’il me soit simplement demandé de signer de temps à autre une pétition ou de participer à un défilé sous la bannière d’un slogan pro ou anti quelque chose ; ou uniquement à faire un don à une association militante.
C’est bien de le faire, de prendre conscience de cet engagement de certains au bénéfice des plus faibles et de les soutenir, mais il me semble que cette injonction va plus loin que l’action épisodique.
Mon engagement se doit d’être pérenne, discret et authentique. Je suis invité à ne pas caresser dans le sens du poil, mais à avoir une parole qui reflète cette parole d’espérance du Christ, une parole qui replace l’individu au centre du débat. Ma parole ne devrait pas ressembler à une brève de comptoir, ni à un réquisitoire bon marché.
Je suis exhorté à avoir le courage de ma « foi » dans toutes mes prises de position lors de mes échanges au sein des groupes que je fréquente.
Et ils sont nombreux ceux qui ne peuvent plus s’exprimer, parce que malades, âgés, déprimés... et j’en passe de ces situations où les mots ne franchissent plus les lèvres faute de maux étouffants. Le discours ambiant invite à des solutions faciles comme la légalisation de l’euthanasie pour ne citer qu’un exemple où il me semble que ma parole peut différer de celle de la majorité de mes concitoyens.
Une dernière piste pour que cette parole qui est attendue de ma part puisse exister est celle de l’intercession. La prière pour les autres est aussi une forme d’engagement qui me donne l’occasion de faire monter à Dieu, en les amplifiant, tous les soupirs des hommes exploités, tous les cris des enfants opprimés, tous les pleurs des femmes abusées, tous les soupirs de ceux qui ont perdu l’espoir d’un lendemain où ils ne seront plus un numéro de chambre mais un humain.
Vie et mort s'opposent comme angoisse et espérance. Depuis Pâques je me sais débarrassé des pierres qui alourdissent mon chemin et invité à avoir non pas une parole égoïste, plaintive ou mortifère mais une parole de vie pour que l'espérance prenne le pas sur la désespérance et que la mort et l'angoisse n'aient plus de prise sur moi… et que de fait « s’ouvre ma bouche pour celui qui ne peut pas s’exprimer. »
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