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Léon-Étienne Duval
évêque d'Algérie 

 

Études, témoignages et documents
sous la direction de

Paul-Bernard Hodel
dominicain et professeur d’histoire de l’Église à l’Université de Fribourg

Sylvie Duval
professeure associée d’histoire médiévale à l’Université de Bologne

Jean-Robert Henry
directeur de recherches honoraire au CNRS

 


Ed. Karthala

308 pages - 29 €

Recension Gilles Castelnau


20 septembre 2024


Mgr Duval, évêque à Alger pendant la guerre d’Algérie, y a pris des positions si humanistes et libérales envers les musulmans, qu’il s’est vu attribuer – méchamment - l’appellation de Mohamed Duval.

Ce livre est le résultat d’un important colloque qui s’est tenu à l’Université de Fribourg (Suisse). Les sujets des conférences qui y ont été données ont été élargis d’une part à tout son ministère et d’autre part à toute la question des relations qu’ont eues les évêques catholiques avec le monde musulman.

Il est à noter que les contacts que Mgr Duval n’a pas manqué d’entretenir avec les protestants et, entre autres, la Cimade, n’ont été évoqués à aucun endroit.

Il en ressort le portrait global d’une hiérarchie catholique à la veille du grand concile de Vatican II, certes encore très conservatrice mais néanmoins fort attachée aux droits de l’homme, à la lutte anti-tortures et au refus de l’intégrisme de l’OAS.

 

Signalons notamment parmi les 8 « Études » de la Première Partie :

• Mgr Duval et la guerre de libération nationale algérienne à travers l’hebdomadaire Témoignage Chrétien par Malika El Korso, professeure d’histoire à l’Université Alger II

• Une nouvelle Église d’Algérie forgée par la décolonistion par Jean-Robert Henry

• Le cardinal Duval et les moines de Tibhirine par Marie-Dominique Minassian, responsable du comité scientifique Les Écrits de Tibhirine, Université de Fribourg, Suisse

 

La Deuxième Partie est composée de 7 « témoignages » dont ceux de

• S.E. Moulay Mohammed Guendil, ambassadeur d’Algérie en Suisse

• professeur Hocine Asselah

• Madame Sabah Fendi, directrice de recherches au CNRA (Algérie)

 

La Troisième Partie apporte 9 « documents » dont

• Déclaration de l’épiscopat algérien (29 novembre 1954)

• Lettre de Mgr Duval au pape Jean XXIII (décembre 1958)

• Discours tenu par Mgr Duval à huis clos au clergé algérois (19 mai 1961)

 

En voici des passages.


 

 Mgr Duval et la guerre de libération nationale algérienne


à travers l’hebdomadaire Témoignage Chrétien

par Malika El Korso

 

Témoignage Chrétien, histoire d’une naissance pas comme les autres

Mgr Duval a fait de l'invitation de saint Augustin, « commencer par », sa devise. Ses enseignements et interventions tournaient autour des valeurs fraternelles, de l'amour du prochain, du nécessaire dialogue entre les communautés musulmanes, chrétiennes et juives dans un esprit d'amitié, de fraternité pour la construction commune de l'Algérie. Faisant le descriptif de l'action sur le terrain de Mgr Duval, T.C. écrivait :

Le contact avec les réalités de l'Algérie et les drames liés â la colonisation française expliquent la volonté de l'archevêque d'Alger d'insister sur le respect, la tolérance et l'amitié entre les pauvres quelle que soit leur situation religieuse, car devant Dieu, tous les hommes sont égaux (T.C., 12 mai 1956).

 

 

La lettre de l’Épiscopat algérien : « les chrétiens et la guerre d’Algérie » (15 septembre 1955)

 

Le 30 septembre 1955, à la Une, le journal reproduit en grand titre « Les évêques d'Algérie parlent ». Il s'agit de la lettre du collectif de l’Épiscopat algérien datée du 15 septembre et signée par les quatre évêques, à savoir Léon-Étienne Duval, archevêque d'Alger, Bertrand Lacaste, évêque d'Oran, Paul Pinier, évêque de Constantine et Georges Mercier, vicaire apostolique de Ghardaïa. En préambule de cette lettre publiée in extenso, les évêques d'Algérie s'émeuvent de la répression menée par l'administration coloniale et son armée au lendemain de l’attaque de civils européens par l'ALN le 20 août 1955 dans le quadrilatère Collo-Philippeville (Skikda)-Constantine-Guelma. Cette attaque menée au grand jour a fait 123 morts dont 71 parmi la population européenne. Le bilan officiel de la répression coloniale, tel qu'il a été établi par J. Soustelle et qui sera repris par la suite par tous les historiens, dont H. Alleg, est de 1273 morts. Il est de 12 000 morts selon une enquête minutieuse, avec les noms et prénoms des victimes, menée par le FLN, un chiffre qui au demeurant ne sera jamais démenti. Cette page dramatique de l'histoire de la guerre de libération algérienne, expression extrême des violences et injustices accumulées durant plus de 130 années de colonisation par les Algériens, est au cœur de la lettre des évêques algériens.

 […]

Le commentaire que fait T.C. situe le problème algérien dans toutes ses dimensions : « La solution n'est pas dans la répression, ni dans la guerre, ... elle est politique et passe par la libre expression des aspirations légitimes » (T.C., 15 octobre 1956).

T.C. reprendra assez souvent cette phrase dans ses colonnes car il y soit l'amorce d'une reconnaissance du droit des peuples à leur indépendance.

  […]

T.C., qui avait publié la Lettre collective des évêques, évoque la résistance de son entourage ecclésiastique.

Les quatre évêques, n'avaient pas la même position sur l'Algérie. Duval est toujours allé plus loin que ses confrères de l'épiscopat. Ses analyses et ses prises de positions ont toujours été très courageuses, il n 'a cessé de manifester son intérêt pour tous les habitants du pays sans exclusive… d'où le sobriquet de Mohamed Duval,

conclut Georges Montaron.

Ce sobriquet ne quittera jamais Mgr Duval qui restera pour les pieds-noirs, même une fois rapatriés, « Mohamed Duval ». T.C. ne s'est pas trompé, qui a considéré cette lettre collective comme l'un des textes fondamentaux de l'épiscopat algérien.

 


Mgr Duval et le procès des « chrétiens libéraux »


Les faits

- En pleine « Bataille d'Alger », les militaires du général Massu perquisitionnent chez certains catholiques accusés d'aide au FLN.

- Entre février et début mars 1957, plus d'une trentaine de personnes catholiques et musulmanes sont arrêtées. Elles avaient pour caractéristiques d'appartenir de près ou de loin aux Services sociaux, œuvre de Germaine Tillon, créés le 17 octobre 1955.

[…]

• Qui sont les « Chrétiens libéraux » ?

Des prêtres inculpés d'atteinte à la sûreté de l'État, des religieuses mises en cause, des presbytères fouillés, une certaine presse déchaînée avec à la Une des titres sensationnels, des articles qui attisent les passions et les haines, révélant le soi disant « complot des chrétiens progressistes » ou encore « les curés fellagas ». Pêle-mêle, prêtres et laïcs sont accusés de complicité avec les « poseuses de bombes » et « les tueurs de femmes et d'enfants ». Mgr Duval ne pouvait faire preuve d'indifférence devant les multiples campagnes de presse qui s'apparentaient à des attaques directes contre l'Église et sa hiérarchie.

Dès le 10 mars 1957, il réagit contre « les informations inexactes et tendancieuses… atteignant plusieurs membres du clergé, publiées par une certaine presse ».

 


 
En conclusion

Je n'ai pas trouvé meilleure description de ce qu'a enduré Mgr Duval, et meilleur hommage que les lignes signées par le directeur de T.C., Georges Montaron :

Mgr Duval a payé le prix de son courage, tout comme nous à T.C. avons payé le prix de nos engagements en faveur de l'Algérie. En 1962, nous avons été saisis plus de quatre-vingts fois et interdits dans les casernes dès 1955. Nos journalistes ont connu la prison, notre journal a été brûlé sur les parvis des églises, notre librairie plastiquée J'ai été agressé et menacé. Mais qu'importe, comme Mgr Duval, nous étions du côté de la justice, des Droits de l'Homme pour la paix et la fraternité et ceci n 'a pas de prix.

 

 


Mgr Duval et Rome


Marco Impagliazzo

professeur à l’Université Roma Tre

 

En dépit des difficultés que traversait l'Algérie dans la première période après l'indépendance, acquise en juillet 1962, et de la situation compliquée de l'Église d'Algérie du fait de l'émigration d'une grande partie de ses fidèles, l'archevêque d'Alger participe au concile Vatican II, qui s'ouvre à Rome le 11 octobre 1962.

 

[…]

La réception de Vatican II en Algérie se produit au même moment qu'une nette mutation du contexte social et politique : dans cette perspective, le Concile apparaît comme une compréhension nouvelle du rôle de l'Église et l'élément qui inspirera les choix de cette période. Bien sûr la problématique de l'aggiornamento conciliaire ne concerne pas seulement la petite communauté algérienne, mais la vie entière de l'Église dont Mgr Duval se sent responsable. En décembre 1965, il écrit à propos de l'aggiornamento :

Il convient assurément de faire dans l'Église des réformes de structures. D'autre part, il faut reconnaître que celles-ci ont déjà commencé et qu'elles se succèdent à un rythme soutenu. Si l'on regarde par exemple le renouveau de la liturgie, l'institution des conférences épiscopales, la création du synode des évêques ! Mais l'aggiornamento ne sera authentique qu'à la condition que ces réformes soient le fruit (dans l'Église) d'une surabondance de vie spirituelle. S'il n'en est pas ainsi, elles pourraient entraîner l'abandon de valeurs traditionnelles incontestables et constituer une perte pour le peuple de Dieu. La grandeur du Concile, ce qui lui attire de la sympathie aussi de la part des non-chrétiens, réside dans le fait qu'il invite tous les enfants de l'Église à revenir à l'Évangile.




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