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La foi et ses raisons


Des chrétiens s'expliquent

Bernard Quelquejeu et Jacques Musset (éd)

recension Gilles Castelnau

éd. Karthala

294 pages - 25 €

22 avril  2022

 

Bernard Quelquejeu est polytechnicien, dominicain. Il a une maîtrise de théologie et un doctorat en philosophie. Jacques Musset est prêtre catholique. Il a été aumônier de lycée, puis animateur de groupes biblique. Il est l'un des animateurs du groupe « Pour un christianisme d'avenir » et se situe comme catholique libéral.

Tous deux sont sensibles d'une part à la très forte diminution de la pratique religieuse à la messe et dans les actes pastoraux que sont le baptême et le mariage et d'autre part à la très forte augmentation de l'agnosticisme par lequel les fidèles développent une spiritualité qui récuse les dogmes et les règles traditionnels.

Tous deux entendent se coordonner avec ceux qui participent au même cheminement.

Ils ont donc invité leurs amis et connaissances à rendre compte de leur propre foi, à inventer un cheminement original et à renouveler autant que possible le vocabulaire et les expressions de l'expérience chrétienne d'aujourd'hui.

Ils publient dans ce volume leurs propres réponses ainsi que celles d'un pasteur protestant !

En voici quelques passages.

 

 

 

6

Un itinéraire spirituel

Annie Crépin

Historienne, Annie Crépin a été professeur d’histoire-géographie dans l’enseignement secondaire,
puis maîtresse de conférence en histoire contemporaine.
Elle est active dans plusieurs mouvements féminins catholiques.

 

 

• Marie

Je perçus aussi cette fausse idéalisation dans le culte rendu à Marie, alibi, je le crains, pour refuser l'égalité des contemporaines dans l'Église et discréditer celles qui ne se résignent pas à un tel état de fait. Ainsi la belle figure de Marie est terriblement affadie, elle qui fut, selon les mots d'un prêtre éclairé, la première des croyant(e)s, et dont la foi en son Fils en fait un modèle à la fois pour les

hommes et les femmes, alors que trop souvent c'est sa soumission à Dieu, opportunément et abusivement confondue avec la soumission aux êtres de sexe masculin, qui en fait un modèle pour... les seules femmes.

 

Cet affadissement, s'il nous a valu les chefs-d'œuvre de l'art gothique et de celui de la Renaissance, a abouti à des images saint-sulpiciennes. Ne peut-on accepter ce que dit de Marie un rabbin plein d'humour et ce dernier n'est-il pas plus proche de sa personne quand il affirme qu'elle était une parfaite mère juive puisque son fils vécut chez elle jusqu'à trente ans, qu'il croyait qu'elle était vierge, qu'elle croyait qu'il était Dieu ? Plus sérieusement, ne peut-on concevoir que cette femme qu'on représente trop souvent comme se sachant de toute éternité mère de Dieu ait pu dire du Christ comme le ferait une contemporaine : « Ce gamin est impossible » et plus tard : « Je ne comprends plus mon fils parfois mais j'ai foi en lui et je le suis jusqu'au bout » ? Car sa foi importe plus que son état « virginal » qu'il faudrait contextualiser en montrant l'influence des religions orientales sur le judaïsme et le christianisme. Par ailleurs, cette surévaluation de l’immaculée conception de Marie et de celle du Christ nous ramène inévitablement, une fois de plus, à la dévalorisation de la sexualité et de la chair » ; pourtant les Pères de l'Église eux-mêmes ne faisaient pas de ce terme l'exact synonyme du corporel, ils l'entendaient plutôt comme équivalent de l'immédiat et du court terme, de l'éphémère — qu'il ne faut pas confondre avec la plénitude du présent — sinon du superficiel. […]

 

 

• Dieu a besoin des hommes... et des femmes

Me voici ainsi ramenée à la question des femmes. En historienne j'avais observé un décalage entre fait religieux et fait social qui n'allait pas toujours dans le même sens : en leurs commencements, les monothéisme et plus particulièrement le christianisme, représentent une avancée pour les femmes. Mais, religions incarnées — le christianisme ayant même fait un de ses fondements de l'Incarnation — ils ont fini par sacraliser tous Ies traits des sociétés où il se sont développés, dont la « valeur différentiel des sexes » chère à Françoise Héritier. Pire, les représentations du sacré en s'anthropomorphisant se sont masculinisées : j'évoquai plus haut Dieu père — et non pas mère — barbu et de sexe masculin. On a sexualisé Dieu, s'affligent certaines croyantes ! Mais, du moins en Occident, et à l'époque contemporaine, le balancier est reparti dans l'autre sens, rendant insoutenable l'androcentrisme des monothéismes dont le catholique prétendant assigner aux femmes, par des discours émanant exclusivement d'hommes, le rôle qu'elles doivent jouer en fonction d'une « nature » féminine qui serait différente de la nature masculine et de fait inférieure malgré de belles paroles — ambiguës — sur leur complémentarité. Des esprits chagrins diront que, de même que certains sont plus égaux que d'autres, certaines sont plus complémentaires que d'autres. En effet, les tenants de telles conceptions disent toujours que les femmes sont complémentaires des hommes, jamais que les hommes sont complémentaires des femmes ! De fait une hiérarchie existe que l'on attribue à Dieu en refusant de voir ses racines dans l’histoire des sociétés humaines.

 

 

 

 

10

L'espérance qui conduit à la foi

Georges Heichelbech

Ancien président de la Fédération des Réseaux du Parvis.
Ancien professeur de mathématiques.
Membre actif de plusieurs organisations catholiques



• Et Dieu dans tout cela ?

Il est plus facile de dire ce que Dieu n'est pas que de dire ce qu'il est. Dieu n'est plus une évidence ni une nécessité dans notre monde occidental, progressivement sécularisé depuis le siècle des Lumières. On ne peut plus adhérer à des affirmations et à des représentations de Dieu qui datent d'époques culturellement révolues. Sont en effet problématiques celles qui présentent Dieu comme tout-puissant, omniscient, clé de voûte du monde, maître de l'histoire, ayant un projet sur les sociétés et sur et chacune des vies humaines, révélant ses volontés aux hommes.

 


Et qui est Dieu pour moi ?

Dieu ? Je pense qu'il faut en parler le moins possible. D'abord, parce que son nom est mis à toutes les sauces pour justifier et sacraliser des comportements simplement humains, liés, par exemple, à des traditions culturelles ou sanitaires, ou à des enjeux de pouvoir et de domination plus ou moins violents. Ensuite, parce qu'il est l'Indicible, perçu confusément au cours des millénaires à travers les religions, mais dont je peux seulement dire qu'il est « l'au-delà de l'Homme ». Jésus qui parle de son Père, qui se dit, qui nous dit tous fils et filles de ce Père, c'est d'abord pour moi non une histoire d'incarnation et de rédemption, mais la fulgurance d'un homme qui comprend et veut faire comprendre que cet « au-delà de » que l'on nomme Dieu se rencontre sur le chemin de la fraternité et de la bienveillance, pour les autres mais aussi pour soi-même. Une phrase dit pour moi l'essentiel, dans l'évangile de Luc : « Ils l'avaient reconnu à la fraction du pain ». Et je crois que nous écrivons des pages d'évangile chaque fois que nous partageons — du pain ou autre chose —, et que la vie de Jésus y est bien plus présente que dans le rite quasi magique de la consécration.

 

 


12

Lettre à des amis athées sur ma foi chrétienne

Jacques Musset


 

• Le déclic de mon déplacement

[...]

En 1968, durant le fameux mois de mai — j'étais aumônier de lycée — un collègue et ami […] me montra qu'avec l'avènement des sciences humaines (sociologie, histoire, psychanalyse, structuralisme, ethnologie), nous étions entrés dans une ère nouvelle, celle du soupçon porté sur les antiques représentations dont on croyait jusque-là qu'elles exprimaient la vérité de ce qu'est la réalité. Je l'entends encore prononcer ces « gros mots » : « le socle épistémologique est désormais définitivement ébranlé », ce qui revenait à dire que le monde ancien des certitudes bétonnées était révolu et qu'il y avait un immense travail de réinterprétation à opérer. Chantier dont n'étaient pas exclues nos propres références religieuses marquées, elles aussi, par des cultures et des langages qui étaient irrémédiablement périmés. En écoutant mon collègue développer les perspectives toutes neuves qu'il m'ouvrait et qui auraient pu me paraître iconoclastes, je fus au contraire comme saisi d'un vif appétit d'en savoir plus, car elles relevaient chez lui d'une exigence intellectuelle authentique. […]

 



• Mon expérience de Dieu et celle de Jésus


[...] Permettez-moi de terminer par une transcription que j'ai faite du « Notre Père » (Matthieu 6, 9-13), dans un vocabulaire non religieux.

[...]


Ô réalité secrète
enfouie en nos profondeurs,
Source inépuisable
d'où naît le goût et le souci de vivre vrai !

 

Que nous soyons attentifs
à ta présence discrète
sans cesse à l'œuvre en chacun de nous
quel que soit le nom qu'on te donne.

Qu 'à ton inspiration
s 'ouvrent largement les cœurs.

Que tes appels perçus au plus intime
soient notre pain quotidien.

Que suscités inlassablement
à la foi en nous-mêmes,
nous croyions en notre prochain,
en dépit de nos médiocrités
et de nos manques de fraternité.

 

Et qu'ainsi nous évitions,
autant que possible,
les impasses.

 

Que nous y étant fourvoyés,
nous puisions en toi la force
de nous relever
et de poursuivre le chemin.

 


 

14

Dieu sans superstition

James Woody

Pasteur de l'Église protestante Unie à Montpellier
Ancien dirigeant du mensuel protestant libéral Évangile et liberté

 



• Foi et esprit scientifique

[...]

En lisant La prière d'un homme moderne de Louis Évely (1910-1985), j'ai été frappé d'une vérité qui m'avait échappé jusque-là : Dieu n'a vraiment pas besoin qu'on lui dise ce qu'il doit faire. Ne serait-ce que la prière que Jésus a enseignée à ses disciples, le Notre Père, ne saurait être comprise comme la dictée faite à Dieu de ce qu'il doit faire promptement. Le christianisme a eu la fâcheuse tendance de tout inverser au point qu'on s'est mis à penser que prier c'est parler à Dieu alors que prier, « c'est écouter Dieu qui te parle ». Comment se fait-il que cette vérité d'une simplicité évangélique échappe à la majorité des croyants qui pensent savoir mieux que Dieu ce que Dieu devrait faire — si nous gardons l'image d'un Dieu qui serait une personne ? Peut-être parce que nous confondons la parole et la conversation. Parce que nous confondons la parole de Dieu avec nos verbiages. Or, comme l'a écrit le théologien Paul Tillich (18861965) dans Religion biblique et ontologie, « le Dieu de la Bible ne parle pas ou n'entend pas » de la même manière que nous parlons et entendons lorsque nous discutons avec quelqu'un. Tillich rappelle que la parole de Dieu a un rapport avec ce qui a un caractère ultime, avec la réalité dernière, avec le sens profond de notre vie.


La prière nous évite de nous réfugier dans une bulle, hors du monde, ce qui nous mettrait à distance de la vie. La prière nous fait tenir notre place dans le monde comme Jésus l'a fait pour ses disciples selon Jean 17 : sans être du monde, c'est-à-dire sans adopter la manière courante de vivre, c'est dans le monde que nous sommes appelés à déployer nos talents et à éprouver un véritable bonheur, car c'est ce monde que Dieu aime (Jean 3, 16), pas un monde parallèle. La foi n'offre pas un paradis artificiel, elle nous rend capables de faire de notre vie un véritable paradis, dans ce monde-ci.




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