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Protestants, catholiques

ce qui nous sépare encore

 

de François Clavairoly et Michel Kubler

Éd. Bayard

 

Jacques Musset

catholique libéral

 

15 avril 2017

Les auteurs de ce livre, tous deux théologiens, dressent un bilan des positions officielles des deux Eglises, l'une protestante, l'autre catholique romaine. Ils pointent leurs convergences et leurs divergences et s'interrogent sur les possibles chemins qui pourraient manifester une unité visible des chrétiens. Ils sont représentatifs de ces deux Eglises ; le protestant, F. Clavairoly, est président de la Fédération Protestante de France, le catholique, M. Kubler, a été rédacteur en chef du journal La Croix et dirige actuellement à Bucarest le centre œcuménique St Pierre-St Paul.

L'intérêt de ce livre, qui paraît lors du 500e anniversaire de la réforme luthérienne, est d'exposer avec authenticité et clarté ce qui est commun aux protestants et aux catholiques romains mais aussi ce qui les laisse profondément divisés, si l'on se rapporte aux doctrines officielles dont voici un très bref résumé.

Ce qui est commun est pour sûr essentiel, à savoir la foi confiante en un Dieu qui se révèle à travers l'enseignement et la pratique libératrice de Jésus de Nazareth. Et il a fallu du temps depuis le XVIe siècle pour que l'Eglise catholique s'accorde sur cet essentiel qu'avaient remis en honneur les réformés.

Mais pour le reste, les conceptions demeurent très différentes, tant en ce qui concerne l'Ecriture, l'identité de Jésus, Marie et les saints, l'Eglise, les ministères, l'eucharistie (la cène), le pape, l'éthique et la morale, ce qui au bout du compte n'est pas mince.

Pour les protestants, les textes bibliques sont entre les mains des baptisés « les référents incontournables pour tout ce qui concerne la compréhension de la foi » encore faut-il les interpréter pour ne pas les lire d'une manière littérale.

Pour l'Eglise catholique, l'interprétation authentique de ces textes a été confiée par Jésus-Christ au magistère de l'Eglise (pape et évêques).

Pour les protestants, la compréhension de Jésus, nourrie par l'Ecriture, résulte d'une interprétation : à chacun mais aussi en communauté d'inventer, dans les mots d'aujourd'hui, une manière de brosser un portrait crédible du Christ.

Pour l'Eglise catholique, les conciles des IVème et Vème siècle ont tranché définitivement : Jésus est homme et Dieu.

Pour les protestants, Marie et les saints catholiques sont des croyants comme tous les autres avec leurs ombres (dans certains cas bien sombres) et leurs lumières ; Dieu seul connaît leur mystère profond ; par ailleurs la « mariologie » catholique obscurcit le message évangélique.

Pour l'Eglise catholique, le témoignage des saints canonisés est chemin vers la vie évangélique.
Pour les protestants, l'Eglise est essentiellement le lieu où s'annonce l'Evangile dans la prédication et où se célèbrent des sacrements. Elle est de l'ordre d'un simple outil au service de l'Evangile. Pour l'Eglise catholique, l'Eglise est, par contre, instrument actif : elle est médiatrice de salut, dépositaire de moyens de salut confiés par le Christ, ce qui est inacceptable pour les protestants. Sa prétention à être la véritable Eglise fondée par le Christ et son refus d'accorder le titre d'Eglise aux protestants qui ne sont à ses yeux que des communautés chrétiennes sont également irrecevables et infondés.

Pour les protestants, les ministères peuvent être très divers, comme au début de l'Eglise, et peuvent varier au cours de l'histoire ; pour eux, la « succession apostolique », c'est le témoignage ininterrompu du témoignage évangélique.

Pour l'Eglise catholique, la « succession apostolique » désigne la chaîne jamais rompue historiquement entre les apôtres et les évêques ; les ministères du pape, des évêques, considérées les successeurs en direct des apôtres, ont été créés par le Christ.

Pour les protestants, même s'ils aspirent à un service manifestant l'unité visible des chrétiens, la conception catholique du pape à qui le Christ aurait confié la gouvernance de l'Eglise universelle et l'infaillibilité dans le domaine de la foi est inacceptable. Pour les catholiques, le pape est le successeur de Pierre désigné par le Christ pour assurer l'unité visible de l'Eglise dans la même foi.
Pour les protestants, la cène manifeste la présence mystérieuse du Christ à travers le pain rompu et le vin partagé en mémoire de lui. Mais il n'y a pas de changement de nature du pain. Pour les catholiques, il y a présence réelle du Christ dans le pain et le vin consacrés, donc transformation de ce pain et de ce vin, ce qui est incompréhensible pour les protestants. Il en découle que ces derniers ne peuvent être admis à la communion catholique.

En ce qui concerne l'éthique et la morale, chez les protestants elle est toujours en situation. Les réponses aux questions et situations ne sont jamais données d'avance, ce qui n'empêche pas d'avoir des règles, mais ce ne sont pas des tabous.

Chez les catholiques, on prétend être porteur d'un impératif éthique venant de Dieu sur lequel on ne peut transiger et qui est un idéal vers lequel chacun doit avancer à son pas.

 

Sur tous les sujets qui viennent d'être évoqués, on ne peut que constater que les positions divergent grandement. Empêchent-elles les Eglises protestantes et catholique romaine de cheminer vers une communion visible ? Pour les protestants, les différences d'interprétation de l'Ecriture d'où découlent représentations et conceptions différentes de part et d'autre ne sont pas un obstacle. Pour eux, il est nécessaire et suffisant que les Eglises s'acceptent dans leurs différences sans vouloir devenir semblables. L'expérience de la diversité est d'ailleurs originelle aux origines du christianisme. L'obstacle actuel, c'est la revendication de l'Eglise catholique romaine de son exclusivisme doctrinal qu'elle ne veut pas abandonner pour l'instant. A quoi le catholicisme répond qu'en cela il a la certitude d'être fidèle au Christ qui l'a instituée comme son unique Eglise. Cette prétention est clairement exprimée dans les textes de Vatican II et répétée depuis avec fermeté.

La perspective d'une unité visible est-elle dès lors une chimère ? Les deux interlocuteurs ne peuvent s'y résigner, mais par quelle voie avancer tant que dure la prétention catholique romaine de détenir la Vérité ? On ne le voit pas à moins d'un déplacement copernicien de l'Eglise catholique qui reconnaîtrait qu'elle n'est qu'une Eglise parmi les autres, ce qui est plus qu'incertain, du fait de ses certitudes coulées au cours des siècles dans des dogmes irréformables.

Comment son auto-compréhension actuelle pourrait-elle bouger ? Le lecteur que je suis du livre de F. Clavairoly et M. Kubler avance une piste. Ne serait-ce pas pour le catholicisme de vérifier, sans a priori et dans une démarche d'honnêteté foncière, si elle peut tirer de l'Ecriture, comme elle le fait, les doctrines qu'elle professe concernant le Christ, l'Eglise, les ministères, l'eucharistie, la mariologie, l'éthique ?
Depuis deux siècles, on a produit un travail exégétique très poussé sur les écrits du Nouveau Testament, qui témoignent objectivement d'un large faisceau d'interprétations sur Jésus, autant de témoignages de foi des premières communautés chrétiennes. Ainsi peut-on actuellement faire assez bien la différence entre le Jésus historique et le Jésus de la foi des premiers chrétiens. Les interprétations multiples et différenciées que professent les auteurs et leurs communautés dans leurs langages, leur culture et situations singulières, s'imposent-elles aujourd'hui telles quelles alors que nous sommes dans un contexte très différent du leur ou devons-nous surtout retenir le mouvement de foi qui les a conduits à proclamer à leur manière que pour elles Jésus était « voie, vérité et vie » ? Si oui, ce qu'elles font dire au ressuscité (ses affirmations, ses discours, ses consignes qui sont en grand nombre) n'est-ce pas la formulation de ce qu'elles estiment être leur propre fidélité à son égard ? En effet Jésus n'étant plus physiquement là, il leur a fallu en leur temps inventer des façons de vivre et de croire en communauté dans l'esprit de leur maître.

Si l'exégèse manifeste ainsi que les paroles du ressuscité sont les fruits divers de la méditation de ses disciples, dès lors comment l'Eglise catholique peut-elle revendiquer que son autocompréhension actuelle corresponde à une volonté expresse du Christ et de Dieu ? Il y a même plus : comment ne voit-elle pas que les dogmes christologiques des IVe et Ve siècles qui se réclament du Nouveau Testament excèdent de beaucoup les affirmations de celui-ci concernant l'identité de Jésus ? Il en en est de même pour les ministères dont les formes étaient à l'origine très différenciées, sans rapport avec la forme épiscopale qui est apparue au second siècle et qui a été par la suite fortement sacralisée. Il en va pareillement pour l'eucharistie catholique : quel rapport entre ce qu'en dit la doctrine officielle de Rome et le dernier repas de Jésus à la veille de sa mort ?

Il me semble que pour s'astreindre à cet exercice, il est capital que l'Eglise catholique s'ouvre à la question sans préjugé : que valent mes convictions affirmées et réaffirmées ? sur quoi reposent-elles ? sont-elles fondées ? sont-elles des absolus ? Il est indéniable que cette révision ne peut que lui coûter spontanément ? C'est pourtant la seule voie pour des humains de sortir par le haut des incompréhensions et des conflits : tout mettre ensemble sur la table sans arrière-pensées et en évaluer la pertinence ou non. Si la véritable prière n'est pas ce que l'on dit mais ce que l'on est, comment cette disponibilité, cette humilité et ce souci du vrai ne seraient-ils pas féconds ?

 



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